Goudjil: la France appelée à assumer pleinement sa responsabilité dans l'élimination des déchets des explosions nucléaires dans le désert algérien pendant la période coloniale    Conseil de sécurité: Guterres remercie l'Algérie pour l'avoir invité à présenter une allocution sur la situation au Moyen-Orient    Le président de la République reçoit le président du parti "Sawt Echaâb"    Foot/Coupe de la Confédération: "les quarts de finale promettent des affrontements palpitants", estime la CAF    Recouverte de neige, la station climatique de Tikjda draine de plus en plus de visiteurs    L'OPEP prévoit une croissance de la demande de pétrole en 2025 et en 2026    Ghaza: le bilan de l'agression sioniste s'alourdit à 47.035 martyrs et 111.091 blessés    Le ministre de la Justice tient une réunion avec la Haut-commissaire à la numérisation    Athlétisme/Championnats d'Afrique 2025 (U18 et U20): la ville d'Oran candidate à l'organisation de l'évènement    Bourse d'Alger : ouverture du capital de la BDL avec 44,2 millions de nouvelles actions mises en vente    Chlef: lancement de travaux d'aménagement de monuments historiques et de cimetières de chouhada    Tlemcen: plus de 25 heures de témoignages vivants sur la glorieuse Guerre de libération collectées    Protection civile: réunion du Comité bilatéral mixte algéro-tunisien à El Oued    Palestine: les agressions continuent de colons sionistes confirment le caractère raciste de l'occupant    Agrément du nouvel ambassadeur d'Algérie en Libye    Ligue 1 Mobilis: le CRB vise le podium, les "Canaris" pour conforter leur leadership    Batna: une délégation de l'APN en mission d'information dans la wilaya    Tous les symboles de la résistance et de la révolution doivent avoir leur juste part dans les œuvres cinématographiques    Derbal pose le bilan 2024 et poste les grandes attentes de l'année 2025    JSK : Mehdi Boudjemaâ signe pour deux ans et demi    Trois défaites, une élimination et des questions    MC Saïda : Omar Belkhira rejoint le club égyptien «Ceramica Cleopatra»    Des clusters pour répondre aux besoins du marché national    Le décryptage… (Partie 1)    Trump commencera à expulser les migrants des Etats-Unis après son investiture    Une bande de cambrioleurs neutralisée    La sécurité routière en période d'intempéries    13 morts et 290 blessés en 48 heures    Le Président sud-coréen a décidé de participer aux sessions de la Cour constitutionnelle    Le soutien à la femme rurale au centre des priorités    Journée nationale de la Commune    Comment faire pour lire plus de livres ?    Le Caftan coLe Caftan constantinoisnstantinois    Caravane de formation sur les opportunités d'investissement et d'entrepreneuriat au profit des jeunes    Comment faire pour lire plus de livres ?    Le ministre présente ses condoléances suite au décès du Moudjahid Mohamed Hadj Hamou,        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La place et le r�le des �lites de l�Alg�rie de l�occupation coloniale � nos jours
Publié dans Le Soir d'Algérie le 02 - 10 - 2011


Par Badr�Eddine Mili
Le sujet de cette contribution d�passe, �videmment, le cadre limit� d�une simple communication et requiert une recherche et une �tude autrement plus approfondies que les quelques rappels et les quelques esquisses que je me propose de soumettre � l�attention et � la r�flexion des lecteurs. Je ne m�y serai, d�ailleurs, pas aventur� si le nouveau roman que je viens de publier aux Editions Chihab sous le titre Les Miroirs aux alouettes n�avait pas r�serv� de longs d�veloppements aux ambitions et aux actions des �lites du d�but des ann�es 60, prises entre les grandes esp�rances de l�Ind�pendance et les am�res d�sillusions essuy�es face aux dures r�alit�s de la conqu�te des libert�s promises par la proclamation du 1er novembre 1954.
Je ne m�y serai pas, non plus, int�ress�, si les bouleversements politiques qui secouent, aujourd�hui, plusieurs pays arabes ne posent pas avec une certaine acuit� la question de l�influence des �lites sur le cours des changements induits par les profonds mouvements qui traversent les soci�t�s. Il m�a, alors, sembl� opportun, � la lumi�re de cette actualit� qui nous interpelle � divers degr�s :
1) de rappeler comment les �lites alg�riennes se sont comport�es par le pass� face aux �v�nements qui ont fa�onn� le destin de la nation depuis 1830 ;
2) de savoir de quel poids elles pourraient, �ventuellement, peser, maintenant, sur les contenus et les orientations des transformations des modes de gouvernance politique, �conomique et soci�tale vers lesquelles nous nous dirigeons.
Il me faut, avant cela, dire que les �lites ne se d�finissent plus, de nos jours, comme une n�buleuse d�intellectuels confin�s dans des cercles d�initi�s et de directeurs de conscience producteurs de v�rit�s absolues et d�oukases id�ologiques que la soci�t� doit imp�rativement appliquer, faute de quoi, elle sombrerait dans les abysses de la mal�diction et de l��chec. Cette acception du concept est, on s�en doute bien, pass�e de mode depuis l�effondrement du bloc communiste et des pouvoirs autoritaires dans le monde. Les �lites dans les soci�t�s avanc�es comme dans les soci�t�s �mergentes sont nombreuses et participent de tant de registres, scientifique, culturel, artistique, politique, �conomique, militaire et autres, qu�elles pr�sentent rarement le profil d�une entit� monolithique. En Alg�rie, les �lites ont �t�, dans et face � l�histoire, si diff�renci�es, si disparates, de matrice sociale, de formation et de langues si vari�es, porteuses souvent de projets divergents pour ne pas dire carr�ment oppos�s qu�elles n�ont, � aucun moment, form� une force unie capable d�occuper une place strat�gique dans les centres de d�cision et donc d�inspirer et de conduire des politiques d�Etat dans une position de direction comme ce fut et c�est le cas dans certains pays du Maghreb et du Machrek. Leur �parpillement et leur tragique solitude de coureur de fond s�expliquent par leur histoire, leur origine sociale, leur conscience politique et les choix qu�elles ont �t� amen�es � faire, dans diff�rents contextes historiques o� elles ont �volu�, qu�elles aient �t� proches ou autonomes du syst�me colonial, proches ou autonomes du pouvoir d�Etat install� � l�ind�pendance. Le cumul de tous ces handicaps les a conduit � ne jamais pouvoir agir pour leur propre compte et � devoir, dans chaque circonstance capitale, s�arrimer � une force sociale pr�dominante pour s�int�grer dans un processus en cours, sous peine d�en �tre exclues. A travers l�analyse de quatre �tapes fondamentales de l�histoire contemporaine de l�Alg�rie, � savoir l�occupation coloniale, le mouvement national, la r�volution arm�e et l�apr�s-ind�pendance, je tenterai de recenser quelques-uns des facteurs qui ont inhib�, objectivement ou subjectivement, les �lites alg�riennes et les ont emp�ch�es, � chaque fois, de se positionner comme source de la d�cision strat�gique.
1- Les �lites alg�riennes et l�occupation coloniale
Rappelons, tout de suite, que l�Alg�rie pr�coloniale comptait de nombreuses universit�s cr��es au fa�te de la splendeur des empires des Mouwahidine et des Mourabitine puis des royaumes hammadite, zianide, ziride, hafside, rost�mide, auxquels le Maghreb central a d� des �lites de grande valeur qui, d�Ibn Khaldoun � El- Ouargalani, ont propag� les sciences exactes, la m�decine et la philosophie auxquelles venaient s�initier de nombreux �tudiants d�Europe et d�Afrique. Ces universit�s ont conserv� leur rayonnement jusqu�� l��clipse de l�Etat alg�rien fond� par l�Emir Abdelkader, une date qui marque une rupture dans l�histoire des �lites alg�riennes dans la mesure o� c�est � partir de cette date que nous assisterons � la mise en �uvre par le syst�me colonial d�une politique d��radication de tout ce qui constituait le fondement de l�identit� alg�rienne, en premier lieu, la langue, la religion et la culture. Cette politique connue pour avoir �t� pens�e comme le moyen d�assimilation par excellence du peuple alg�rien par la d�personnalisation a g�n�r� :
a - la promotion d�une �lite d�origine f�odale con�ue par l�administration coloniale comme une force d�interm�diation utilis�e dans la relation que cette administration entretenait avec la population autochtone. Ce sont les ca�ds, les bachaghas, les percepteurs, interpr�tes et autres auxiliaires de justice ;
b - l��mergence, suscit�e par la m�me administration, d�une mandarinat maraboutique charg� d�encadrer la pratique religieuse par la perversion, la manipulation et l�obscurantisme. Cette situation a men� � l�isolement, de facto, de cette partie des �lites alg�riennes par rapport au combat national, r�duit, � cette �poque, aux soul�vements paysans, certes dirig�s par des chefs de tribus et des chefs religieux anti-colonialistes comme cheikh El-Haddad, El-Mokrani et Boua�mama, mais de faible r�sonance, vou�s � l��chec et finalement �cras�s.
2- Les �lites alg�riennes et le Mouvement national
Les �lites alg�riennes ne se reconstitueront et ne se manifesteront dans des formes autrement plus modernes, soit dans une posture d�inf�odation vis-�-vis de l�occupation, soit dans une attitude d�opposition qu�� partir des ann�es 20 lorsque l�Emir Khaled lance El-Iqdam, et Messali Hadj cr�e l�Etoile nord-africaine, suivis, � partir des ann�es 30, par l�apparition de l�Association des ul�mas, de l�UDMA et du Parti communiste alg�rien favoris�s, l�un par l�essor de la Nahda au Proche-Orient, l�autre par l�arriv�e au pouvoir du Front populaire en France. Il va en r�sulter le tableau suivant. Nous aurons en face de nous plusieurs �lites :
- les �lites f�odales issues des chefferies traditionnelles tr�s influentes en milieu rural ;
- les �lites bourgeoises de souche citadine form�es de propri�taires, de m�decins, d�avocats, de magistrats, d�universitaires et d��crivains ;
- les �lites petite-bourgeoises constitu�es d�instituteurs et de fonctionnaires. Elles sont form�es, essentiellement, en langue fran�aise, soucieuses de gagner une place dans la hi�rarchie de la soci�t� coloniale, revendiquant les m�mes droits que les Fran�ais. La F�d�ration des �lus de Bendjelloul et de Belhadj Mostefa, les universitaires comme Bencheneb, les instituteurs comme Soualah, dont la m�thode de l�enseignement de l�arabe par le fran�ais a connu son heure de gloire � l��cole indig�ne, des journalistes comme ceux d� Ennadjah, certains �crivains li�s au courant litt�raire alg�rianiste et aux cercles d�Emmanuel Robl�s et d�Albert Camus et bien d�autres segments de ces �lites se sont mobilis�s autour de ces revendications ;
- face � eux, nous trouvons les �lites d�origine pl�b�ienne, ind�pendantistes, ouvertement hostiles au colonialisme, s�duites par le k�malisme, le r�veil de la Chine et de l�Indochine et la personnalit� de Mossadegh et de Orabi. Ces �lites qui ont fait le choix de traduire en actes les aspirations de la grande majorit� de la soci�t� alg�rienne se recrutaient, en r�gle g�n�rale, parmi les �migr�s qui s��taient familiaris�s avec la grande production capitaliste et le militantisme dans les syndicats internationaux, � l�instar de Belkacem Radjef, Inal et Messali lui-m�me. Elles se recrutaient �galement parmi les �lus du PPA-MTLD, les syndicalistes, les enseignants de l��cole libre, les scouts, les �crivains, les po�tes et les hommes de th��tre comme Reda Houhou. Num�riquement faibles, elles sont traqu�es et r�prim�es.
3- Les �lites alg�riennes et la r�volution arm�e
A l�exception de ces �minorit�s agissantes� qui s��taient retrouv�es, d�embl�e, dans la locomotive du 1er Novembre 1954 et qui s��taient engag�es, d�s le d�part, dans la guerre de Lib�ration, en s�int�grant dans une large alliance qui va de la paysannerie pauvre aux ouvriers en passant par les ch�meurs, les jeunes et les femmes, toutes les autres expressions des �lites ont opt� pour l�attentisme, certaines esp�rant trouver les clefs de la d�livrance chez les lib�raux comme Jacques Chevalier, le maire d�Alger. Les udmistes, les ul�mistes, les communistes et naturellement tous les intellectuels qui s�y apparentaient, toutes vocations confondues, n�ont rejoint les rangs de la R�volution qu�� partir de 1956 apr�s que celle-ci ait consolid� ses assises � l�int�rieur et � l�ext�rieur, � la suite de l�offensive militaire du 20 ao�t 1955 dans le Nord- Constantinois. Raison pour laquelle les �lites qui suscitaient, de ce fait, une certaine m�fiance au niveau des instances dirigeantes de la R�volution, avaient d� se contenter, malgr� les efforts de Abane Ramdane et du colonel Lotfi, de places secondaires dans la hi�rarchie de la R�volution, sans grand poids politique face aux chefs de la paysannerie, colonne vert�brale de l�ALN. Certains les appelaient �les scribes�, d�autres �les compagnons de route�. Ils seront bient�t doubl�s par les embryons d��lites envoy�s par le FLN-ALN puis par le GPRA se former dans de nombreuses disciplines civiles et militaires aviation, transmission�) au sein des universit�s des pays socialistes et des pays arabes. Dans le m�me temps, d�autres �tudiants alg�riens choisirent de poursuivre leurs �tudes � Aix-en- Provence, Grenoble et Montpellier, ou en Suisse et en Allemagne, encourag�s, dans ce sens, soit par la F�d�ration FLN de France, soit par des cercles fran�ais int�ress�s � disposer d�atouts favorables apr�s une ind�pendance, consid�r�e, de toutes fa�ons, � partir de 1960, comme in�luctable. Les n�gociations d�Evian puis la crise entre le GPRA et l��tat-major de l�ALN ont montr�, encore davantage, la faiblesse de la marge de man�uvre des �lites cantonn�es au CNRA ou GPRA, d�pass�es, en fin du compte, par les �v�nements. Et malgr� le concours d�cisif qu�elles ont apport� dans la pr�paration technique des dossiers des n�gociations avec l�ancienne puissance coloniale et dans le r�sultat final obtenu, elles ont d� c�der face � un rapport de force qui leur �tait d�favorable, contraintes qu�elles �taient de s��parpiller et de choisir un nouveau camp pour s�y rallier.
4- Les �lites alg�riennes apr�s l�ind�pendance
D�passant le choc ressenti eu �gard aux conditions non consensuelles dans lesquelles les premiers fondements de l�Etat ind�pendant furent pos�s, pratiquement toutes les �lites rentr�rent au pays, manifestant leur disponibilit� � servir dans un pays organis�, pour la premi�re fois dans son histoire, en R�publique, dans des fronti�res sans pr�c�dent. Parmi ces �lites, les �tudiants rentr�s d�Europe de l�Est font figure d�avant-garde. Ils investissent les organisations de masse, transforment l�Ugema en UNEA, nouent une alliance avec le courant nationaliste progressiste et deviennent avec d�autres sensibilit�s politiques, la gauche du FLN. C�est l��poque des r�dacteurs de la Charte d�Alger et des th�ses d�Avril, celle de Benyahia, R�dha Malek, Harb, Zahouane, Ouzegane, Benzine, dirigeant d� Alger R�publicain devenu organe du FLN. Raptis, Bourges et les �pieds rouges� officiaient en tant que conseillers � la pr�sidence de la R�publique. Alger �tait la capitale du monde et accueillait tout ce que la plan�te comptait de puissants chefs d�Etat, Khroutchev, Nasser, Tito, Chou-En-La�, qui remontaient la rue Didouche- Mourad, � pied, sous les confettis et les p�tales de roses. L�universit�, la cin�math�que, le th��tre �taient anim�s par Jacques Berque, Andr� Mandouze, Galissot, Perregua, Maxime Rodinson, Jacques Arnaud, Langlois, Serge July, Boudia, Kateb Yacine, Mostefa Lacheraf, Malek Haddad, Mourad Bourboune, Bachir Hadj Ali, les r�dacteurs de la revue Novembre et les peintres du mouvement �Aouchem�, un melting-pot d�tonnant qui avait fait d�Alger et de l�Alg�rie un carrefour et une adresse r�volutionnaire de r�f�rence. A c�t� de ce rush de gauche essentiellement francophone, les �lites arabophones se regroupent autour de l�Institut d��tudes arabes nouvellement cr�� et autour de l�Humanisme musulman, la revue lanc�e par El-Hachemi Tidjani et les premiers fondamentalistes alg�riens. Le Dr Aroua, Malek Benabi, cheikh Sahnoun, Abbas Madani y �crivent, proposent une autre voie, invoquant l�exemple de Ali Jinah, Iqbal, Bamatte, El-Afghani, etc. C�est dans ce climat de diff�rends, r�currents li�s, encore une fois, aux origines sociales, � la formation, � la langue, aux positionnements id�ologiques et aux conditions de ralliement pr�coce ou tardif des �lites alg�riennes � la R�volution qu�intervient le 19 Juin qui met fin � ce qu�il pensait �tre une d�viation, proclamant comme priorit� la construction �d�un Etat appel� � survivre aux �v�nements et aux hommes�. Le nouveau r�gime ayant un besoin urgent de doter les nouvelles institutions en cadres loyalistes s�employa � cr�er deux centres strat�giques pour le recrutement, la formation et la dotation de l�Etat en grands commis : le premier fut l�ENA ; le second, l�ANP, � travers plusieurs acad�mies et instituts, garants, dans l�esprit de leurs concepteurs, de la souverainet�, de la stabilit� et de la continuit� de l�Etat. Apr�s avoir r�duit � la clandestinit� les anciens soutiens du pr�c�dent r�gime regroup�s dans l�ORP puis dans le PAGS, le pouvoir se r��quilibre, d�s 1966, nationalise les mines et plus tard les hydrocarbures, lance les trois r�volutions, agraire, industrielle et culturelle, baptis�es �les grandes t�ches d��dification nationale �, ou �la voie de d�veloppement non capitaliste �, sous le sceau du non-alignement et de la grande proximit� avec les pays socialistes. Les �lites de gauche reviennent dans le jeu politique, s�engagent dans le volontariat et au sein de l�ANP lors de la guerre isra�lo-arabe de juin 1967. C�est l��poque de la th�se du soutien critique. La r�forme de l�universit� men�e par Mohamed Seddik Benyahia et l�absorption de l�UNEA par l�UNJA ouvrent une voie royale � de nouvelles �lites, les �lites d�Etat auxquelles sont confi�es la r�alisation et la gestion des combinats et des complexes industriels d�cid�s par le plan, l��pine dorsale de l��conomie administr�e. De nombreux segments d�autres �lites, s�duites par les lambris de la nouvelle R�publique, se convertissent. C�est l��poque de l�article 120. La mort du pr�sident Boumedi�ne signe la fin de cette �poque. Le 4e congr�s du FLN sonne le d�clin du socialisme et l�arriv�e des lib�raux, les chefs d�orchestre de l�infitah. Assis sur une base sociale lamin�e par les d�sillusions g�n�r�es par l��chec du socialisme d�Etat et des politiques de d�veloppement �conomiques sous-jacentes, la survenue, au milieu des ann�es 80, du mouvement islamiste, encadr� par des dirigeants de formation moyenne, rencontre peu de r�sistance au niveau d�une bureaucratie politique plut�t encline � la composition. La seule opposition qu�il rencontre vient de l�Arm�e nationale populaire, visc�ralement r�publicaine, des intellectuels, des syndicalistes, du mouvement des journalistes, de la soci�t� civile et des premi�res Ligues des droits de l�homme. La crise exacerb�e par les atermoiements d�une Pr�sidence d�pass�e semble se d�nouer � la suite de l�instauration du pluralisme politique mais la radicalisation du fondamentalisme menace de remettre en cause le caract�re r�publicain de l�Etat. C�est janvier 1992. C�est le d�but de la p�riode noire. Les �lites cibl�es par le terrorisme vont payer de leur vie. Journalistes, �crivains, hommes de th��tre, sociologues, m�decins sont assassin�s. Des milliers d�autres s�exilent. Une saign�e qui vide le pays de sa substance et s�ajoute � celles qui l�avaient pr�c�d�e dans les ann�es 60-70. Ce qui s�ensuivit constitue pour les g�n�rations d�aujourd�hui un lourd passif. Le d�p�rissement des valeurs politiques, le galvaudage du militantisme et de l�engagement, le d�voiement des partis, cens�s �tre des �coles de citoyennet�, a d�natur� la notion d��lites. Ajoutons � cela la d�sarmante m�diocrit� des productions de l�esprit, le mauvais classement des universit�s, l�indigence de la recherche scientifique. Avec de telles carences et de telles d�viances, quelle place les �lites d�aujourd�hui peuvent-elles esp�rer occuper pour susciter le changement ou, � tout le moins, l�accompagner dans la bonne direction ? Ces �lites semblent pour le moment affaiblies, presque sans voix. Elles n�arrivent pas � communiquer juste et � susciter des �chos au sein de la soci�t�. Pourquoi ? Est-ce du fait d�une faiblesse li�e, encore une fois, � l�origine sociale et � l�Histoire ? Est-ce du fait de leur confinement � la marge de la soci�t� par les diff�rents pouvoirs qui se sont succ�d�s � la t�te de l�Etat ? Ou bien du fait de la r�gression de la soci�t� elle-m�me revenue au culte aveugle de la tradition ? Et pourtant, le pays dispose de plus d�un million d��tudiants. La jeunesse est famili�re des techniques de communication les plus sophistiqu�s, abonn�e aux r�seaux sociaux et aux networks transnationaux ? Pour revenir dans la course, les �lites doivent, aujourd�hui, r�unir un certain nombre de conditions de fond objectives et subjectives � court et � moyen terme, la seule alternative qui leur demeure ouverte.
- A court terme : elles doivent travailler � :
* d�passer leur atomisation et � dialoguer entre elles puis avec l�Etat pour trouver un d�nominateur commun politique afin d�asseoir la pratique d�mocratique dans notre pays sur des bases saines ;
* � jeter des passerelles en direction de la soci�t� en changeant leurs modes de communication et leur langage.
- A long terme : elles doivent �uvrer :
* � obtenir une r�forme radicale de l��cole dans le sens de la modernisation ;
* � s�ins�rer dans la mondialisation en s�ouvrant sur la recherche fondamentale pour ma�triser les moyens d�influence technique ;
* � militer pour obtenir l�abolition du client�lisme, la reconnaissance du m�rite, la s�curisation et la consid�ration morale et mat�rielle dues � leur apport au d�veloppement de la soci�t�. Elle gagneraient aussi � rompre avec la culture du salon, � cesser de nourrir des complexes vis-�-vis de l�Occident comme de l�Orient et � ne compter que sur leurs propres ressources pour conqu�rir d�avantage d�espaces de pouvoir qui permettraient enfin que la raison du savoir et de l�intelligence puisse l�emporter sur la force brutale des lobbies de l�ignorance. Elles pourraient, au bout de ce processus, produire, � partir de leur g�nie propre, un mod�le conforme aux aspirations de la soci�t� qui fera d�elles, � l�avenir, un interlocuteur de poids et d�influence incontournable.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.