Avant-hier, de bon matin, d�un pas press� je suis all� frapper � la porte du bureau de monsieur �qui de droit�, une grosse Chekhssia qui fait r�gner la loi dans mon douar. Je me suis rendu � cette adresse de bonne heure pour faire une d�claration de perte et de vol de plusieurs objets identitaires de grande valeur aux yeux de ma famille qui se sont volatilis�s de mes riches propri�t�s �parpill�es aux quatre coins de ma plaine du Cheliff. Un grand patrimoine de traditions, de coutumes et de biens mat�riels que j�ai h�rit� de mes vieux anc�tres depuis fort longtemps. Ce jour-l�, j��tais assis dans une petite salle d�attente lugubre qui sentait le renferm� et qui �tait badigeonn�e d�une couleur de peinture triste et repoussante. J�attendais le moment voulu pour �tre re�u par �qui de droit�. J��tais pensif et otage de mes mauvais soucis et de mes r�ves malheureux qui m�ont �loign� pendant ces brefs instants de ce lieu monotone et lourd � supporter par sa frayeur et son m�pris. Apr�s un long moment constitu� d'une m�l�e de voix qui criaient dans des appareils t�l�phoniques �Allo ! Allo ! Oui ! Chkoun ? Sahit Khouya !� qui provenaient d�un bureau au fond du couloir et de bruit de la chasse d�eau qui �tait tir�e dans les chiottes � tout moment � c�t� de la salle d�attente. Le secr�taire de M. qui de droit est venu interrompre mon voyage dans le ciel. Il m�a pri� de le suivre dans le long couloir sombre et mal �clair� jusqu�� la porte qui semblait �tre celle de �qui de droit�. Il l�ouvrit pour moi et se mit de c�t�, pour me laisser entrer dans un vaste bureau plein de fauteuils et d�armoires m�talliques. �Qui de droit� lui-m�me �tait l�, il �tait enfonc� tel un pieu dans son fauteuil de cuir derri�re un grand bureau en teck avec plusieurs appareils de t�l�phone pos�s dessus. Une forte odeur de tabac et de fum�e couvrait les lieux. C��tait un homme solide plein de force, il avait les yeux vifs et per�ants et une grande moustache noire qui lui donnait un air autoritaire et s�v�re. Je l�ai salu� timidement ; bonjour aalikoum ! Il m�a r�pondu d�une voix grave, wa aaleikoum el bonjour ! Cha kayene ? Qu�es-ce qu�il y a ? Qu�il me dit d�une voix sourde. Voil� mon bon monsieur ; je suis Flen ben Flen et j�habite ici en ville dans une propri�t� parentale h�rit�e Mel Djed Lel Djed (de p�re en fils) depuis que ces lieux ont �t� baptis�s El Asnam par les Arabes qui les ont d�couverts au moment de leur passage ici. Ainsi apr�s avoir trouv� les vestiges de la cit� romaine �Castellum Tingitanum� et des statues � la forme humaine, ce berceau fut appel� El Asnam par les Arabes. Et depuis ce temps �coul�, El Asnam a connu un rayonnement sans pr�c�dent dans la prosp�rit� et l'�mancipation. Et c'est pour cela que je suis venu vous voir aujourd�hui Hadharat. Kheir Inchallah ! Qu'il me dit. Voil�, il s'agit d�une affaire tr�s grave et lourde de cons�quences pour mon bien-�tre et mon moral et qui touche �norm�ment � la valeur de mon patrimoine mat�riel et immat�riel que j�ai h�rit� de mes a�euls. Un saccage est survenu chez moi l�autre jour alors que je dormais tranquillement sur mes deux oreilles. Et lorsque je me suis r�veill�, j�ai fait le triste constat de ce pillage. Ils ont d�truit et vol� tous mes biens. Ils ont m�me os� effacer mon identit� et ma d�nomination qui �tait inscrite en lettres d�or sur le fronton de ma demeure. C��tait quoi ce nom ? M�interrompit �qui de droit� ; Lasnam ! Je lui dis avec d�ception. Ensuite, ils s�en sont pris � ma vieille cl�ture qu�ils ont d�truite gratuitement. Une sorte de rempart construit en pierres que j�ai h�rit� de mon histoire coloniale et qui entourait ma propri�t� pour la prot�ger de toutes agressions. Ils ont pris �galement position dans ma p�pini�re comme des sauterelles et ont bouff� tous mes beaux arbres et la v�g�tation qui faisait mon bonheur. Ce pr�judice moral a engendr� dans ma vie quotidienne une perturbation morale caus�e par cette grande fatalit� qui est tomb�e comme une peste sur ma t�te. Aujourd�hui, je suis comme un homme perdu au milieu de nulle part. Un citoyen en faillite. Un �gar� qui ne retrouve plus le chemin de la prosp�rit�. On m�a d�pouill� de mes biens les plus pr�cieux. Tout mon patrimoine mat�riel et immat�riel a disparu par la faute de ces gardiens qui �taient charg�s de le surveiller et de le prot�ger. Ils ont n�glig� leurs obligations et ont failli � leurs devoirs. Et � cause d�eux, voyez monsieur �qui de droit� o� j�en suis ! Je suis nu comme un ver. Qui sont-ils ? M�a demand� �qui de droit� �tonn�. Je lui r�pondis : �eux� ! �Chkoun eux ?� Me questionna s�v�rement �qui de droit� Tu les connais ces salauds? Insista �qui de droit�, les yeux fixes et la voix grave. Donnemoi des noms et tu verras ! Endakhalhoum ga� ! (Je les bouclerais tous), me rassura �qui de droit�. Je lui r�pondis : ce sont les paysans qui sont venus des douars voisins ! Ils ne respectent personne ! C�est des abrutis et des illettr�s et des mat�rialistes qui ne savent que s�approprier les biens de la soci�t� et des autres. Monsieur �qui de droit� �tait en face de moi dans son bureau noy� dans un nuage de fum�e, il m��coutait parler sans intervenir me fixant droit dans les yeux. Il profita d�un moment vide de parole pour me dire : que veux-tu que je fasse pour toi ? Toi le malchanceux ? Klek boubi ! Me dit-il. Je ne peux rien faire pour toi. Hadhouk khaoutek ! (Ce sont tes fr�res). Et tout ce que je peux faire pour toi, c�est de prendre seulement ta d�position. Pour cela, va voir dans le bureau � c�t�. Je me suis lev� et je suis ressorti du bureau de monsieur �qui de droit�, d��u et chagrin� de ce qu�il m�arrivait. Hamid Dahmani Pour �crire � vox populi : [email protected] - [email protected]