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1962-2012 : OU EN SOMMES-NOUS CINQUANTE ANS APRES ?
1 - La f�te dans la tristesse
Publié dans Le Soir d'Algérie le 20 - 05 - 2012


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La nouvelle s�rie de contributions que nous entamons aujourd�hui sera consacr�e au cinquantenaire de l�Alg�rie ind�pendante. Quoi ? L�Alg�rie ne serait �g�e que de cinquante ans ? Non, l�histoire de l�Alg�rie remonte � plusieurs mill�naires, sinon tous les quinquag�naires en vie et plus seraient plus �g�s qu�elle, ce qui serait un non-sens.
Ceux qui sont n�s en 1962 ont le m�me �ge qu�elle ; ils ont pr�matur�ment vieilli et ont le sentiment d�avoir v�cu pour rien, tandis que ceux qui les dirigeaient au moment o� ils sont n�s les dirigent toujours, comme s�ils allaient en rajeunissant. De Gaulle qui, en 1962, �tait l� aussi, a quitt� le pouvoir en d�missionnant il y a 43 ans, et le pr�sident fran�ais nouvellement �lu est quinquag�naire comme l��tait son pr�d�cesseur. C�est � croire que notre m�re-patrie n�a enfant� qu�une seule fois, qu�elle n�a mis au monde qu�une port�e et que, sit�t venue au monde, celle-ci s�est d�p�ch�e de st�riliser la m�re g�nitrice afin que nul ne vienne r�clamer une part de l�h�ritage. En principe, joie et tristesse sont deux �tats �motionnels qui ne se combinent pas. L�une peut pr�c�der l�autre ou lui succ�der, mais il est rare qu�on les ressente en m�me temps. Il n�y a pas de f�te triste ou de tristesse joyeuse, chacune poss�de ses occasions et son c�r�monial, et toutes deux r�pugnent � �tre m�lang�es. Elles ont toutefois quelque chose en commun, les larmes : on pleure en effet quand on est trop triste ou trop heureux. Pourquoi alors ce titre ? Parce que la plupart des Alg�riens attendent le cinquantenaire de leur Ind�pendance sans enthousiasme et comme s�ils devaient d�f�rer � un rite tomb� dans l�indiff�rence. A quelques semaines du cinquantenaire, l�ambiance qui pr�vaut dans le pays n�annonce pas la liesse. Ni chez le peuple ni chez les dirigeants, on ne semble pas avoir le c�ur � la f�te. Pourtant, il va falloir organiser des festivit�s pour marquer ce cinquantenaire, ne serait-ce que pour marquer le coup devant l��tranger. On va devoir accrocher des drapeaux neufs partout, passer des programmes sp�ciaux � la t�l�, convoquer les troupes folkloriques du pays, mais ces festivit�s programm�es ne suffiront pas � inciter les citoyens � aller danser de joie sur les places publiques. Qui dit festivit�s ne dit pas forc�ment f�te. La joie n�a rien � voir avec les gestes protocolaires, l�illumination des �difices, les lampions et les feux d�artifice ; elle fuse du c�ur, �clate dans la t�te, illumine les visages et n�a pas besoin de d�ploiement de grands moyens pour s�exprimer. On a la face �panouie, la mine rayonnante, l�air d�tendu et on a envie de sauter au cou des autres, de danser et de rire. La joie authentique n�est pas administrative ; on ne peut pas la commander, l�acheter ou l�importer. C�est une effusion spontan�e, un �lan naturel vers les autres, un partage et non un air emprunt�, des accolades froides et des sourires forc�s. L�, on est dans l�hypocrisie, la mise en sc�ne et le pr�fabriqu�. Et quand c�est feint, �a se sent et se voit tout de suite : on rit jaune, on a un rictus � la place du sourire, une mine d�faite, un air abattu et on d�gage l�impression d��tre en berne. Il est plus facile dans le contexte actuel d�organiser des fun�railles que des festivit�s. Les mines sombres s�y pr�tent et on n�a pas besoin de se forcer pour para�tre afflig� ; on l�est tous les jours en sortant de chez soi. D�s qu�on monte dans le transport public ou engage sa voiture dans la circulation, la bonne humeur dispara�t. Cette tristesse naturelle est en outre grev�e d�un inexplicable sentiment d�angoisse parce qu�on s�attend � tout moment � ce qu�il se produise quelque chose d�absurde. Si le gros des Alg�riens est triste � l�approche de la f�te de l�Ind�pendance, baptis�e aussi �F�te de la jeunesse�, ce n�est pas parce qu�ils n�aiment pas l�ind�pendance ou la jeunesse, mais parce qu�ils ne voient pas quoi f�ter. Quand ils plongent dans le pass�, ils n�en remontent pas avec la nostalgie de la colonisation, mais avec le sentiment qu�ils ont �t� priv�s de quelque chose et que les promesses de leur lutte de lib�ration et de l�ind�pendance n�ont pas �t� tenues : o� est en effet �l�Etat d�mocratique et social� inscrit dans la D�claration du 1er Novembre 1954 ? O� sont la libert�, la dignit�, l��galit�, la justice sociale et la d�mocratie, tant de fois martel�es dans les discours ? O� est l�unit� nationale quand la nation est divis�e et que la guerre contre le terrorisme, commenc�e il y a vingt ans, se poursuit ? Et lorsqu�ils se projettent par l�imagination dans le futur, ils sont pris de vertige : que deviendra leur pays dans les prochaines cinquante ann�es, lorsqu�il n�y aura plus de p�trole ? Ces cinquante ann�es d�ind�pendance, ils en ont finalement pass� la premi�re moiti� � r�unir les conditions de la �crise�, et la seconde, � en vivre les affres. La liesse, la vraie liesse, c��tait celle des premiers jours de l�ind�pendance immortalis�s par les cam�ras de la presse mondiale et des films comme La Bataille d�Alger. Elle n�a dur� que quelques jours car les combats fratricides avaient d�j� commenc� pour la prise du pouvoir. On n�a jamais revu cette liesse. Quand, plus tard, les foules sont sorties dans la rue, ce n��tait pas pour donner libre cours � leur liesse, mais � leur d�tresse et � la casse. �a a commenc� il y a un quart de si�cle et �a ne s�est plus arr�t�. Il n�y a pas eu de d�fil� militaire depuis 1990. Nos commandos n�ont plus parad� sous nos yeux admiratifs sur l�avenue de l�ALN, ils se battent contre les �r�sidus du terrorisme �, crapahutant dans les djebels � la recherche des derniers ��gar�s� ou d�ploy�s le long des fronti�res o� les �r�sidus� du GSPC, devenus AQMI, ont fait main basse sur des territoires voisins. De toute fa�on, cela fait longtemps qu�on ne c�l�bre plus les f�tes nationales. Seules les f�tes religieuses sont encore accueillies avec un semblant de joie, mais elles ne sont pas sp�cifiques � l�Alg�rie et � son histoire. La politique, qui a d�teint sur elles, les a attrist�es aussi. Il y a plus de signes ext�rieurs de religiosit� dans la rue que jamais, mais il n�y a pas plus de bien dans la soci�t�, plus d�honn�tet�, plus d�altruisme ou plus d�amour du pays. Au contraire, il y a moins de bont�, moins de fraternit�, moins de tol�rance et moins de patriotisme. C�est que l�islamisme ne pousse pas les gens vers leurs prochains, mais � leur rejet s�ils sont jug�s diff�rents, et les actes qu�il recommande ne sont pas tourn�s vers le bien de son prochain ou de son pays, mais d�di�s � Dieu en �change de �ha�anate�. Islamisme et joie de vivre sont incompatibles, et toute manifestation de joie est tenue pour ��b� (ind�cence). Le 5 Juillet 1962 est le r�sultat du 1er Novembre 1954. On f�te le premier et comm�more le second. En 1984, nous comm�morions le trentenaire du d�clenchement de la R�volution : l�Alg�rie ind�pendante �tait �g�e de 22 ans, et non de 50, comme aujourd�hui. Elle �tait jeune, en pleine possession de ses forces, unie et vivait dans une totale s�r�nit�. A cette occasion, et comme je le fais aujourd�hui � l�approche du cinquantenaire, j�avais publi� dans Alg�rie actualit� une s�rie d�articles qui tranchaient avec l�optimisme ambiant et la qui�tude g�n�rale. Dans �Crimes et ch�timents� (18 octobre 1984), j��crivais : �Bien des responsables ont atteint depuis des lustres leur seuil d�incomp�tence, mais ils sont toujours l�, d�fra�chis et inconscients de leur anachronisme� Il en est m�me qu�il a fallu arracher de leur fauteuil presqu�� l�arracheclou. Tel Attila, l�herbe ne repoussait plus l� o� il passait� Certaines situations g�n�reraient la malvie m�me sur la Lune. Quand les portes se ferment sans raison ou ne s�entreb�illent que pour laisser passer une ombre furtive, quand tout est motif � d�rogation, autorisation et bakchich, il ne faut pas s��tonner que les gens en viennent � escalader les murs, � grimper sur les toits, � passer par les caniveaux, � s�accrocher aux goutti�res pour trouver le passage qui les m�nera � la solution de leurs probl�mes� Qui r�pondra de ces crimes ? Qui ch�tier ? Le malheur est qu�il y a un comptable pour tout, un juge pour la moindre faute. En l�occurrence, c�est l�histoire qui nous jugera et nous ch�tiera, peut-�tre pas en nos personnes, mais en la personne d�innocents qui ne sont peut-�tre m�me pas n�s� N�avons-nous pas pay�, nous, pour des fautes commises par des g�n�rations qui nous ont pr�c�d�s de plusieurs si�cles ? N�a-t-il pas fallu pr�s d�un si�cle de r�voltes noy�es dans le sang, puis sept ann�es de f�roces combats qui nous ont co�t� le dixi�me de notre population pour laver notre pays de cette infamie qu�a �t� la colonisation ? A quelques jours de la c�l�bration de l�anniversaire de notre retour � l�histoire active, � l�histoire assum�e, toutes ces r�flexions devraient nous fouetter afin que jamais plus notre pays ne sombre dans des trag�dies comme celle du colonialisme et du sous-d�veloppement� (fin de citation). Huit ans plus tard, notre pays sombrait dans une autre trag�die, la �trag�die nationale�, mais celle-l� ne m��tait pas venue � l�esprit. Le 1er novembre 1984 paraissait �Peuples et Histoire� o� je posais cette question : �Que serons-nous dans trente ans, en 2014 ?� Nous y sommes presque. J�y disais ceci : �Dans sa configuration psychique actuelle, le peuple alg�rien est un peuple aux ambitions �lev�es, un peuple travaill� par le d�sir de grandeur, un peuple qui ne veut plus bricoler, mais entreprendre de grandes choses. Il ressent le besoin de se hisser au niveau du monde du troisi�me mill�naire, il ne veut pas rester � la tra�ne des nations avanc�es, il a h�te d�en finir avec la d�pendance �conomique, la pauvret�, le sous-d�veloppement et tout ce qui rappelle la chute dans le temps, la faillite g�n�rale et la colonisation. Il faut lui insuffler l��lan vital� Les peuples qui vont loin, qui tiennent longtemps dans la dur�e � l��tat actif, sont ceux qui se prescrivent des vocations, qui se posent comme devise : �Soyons r�alistes, demandons l�impossible�� De tels peuples savent distinguer le simple objectif d�un plan de d�veloppement, des t�ches historiques. Un objectif, ce peut �tre la cr�ation d��coles, la multiplication des Souks-El-Fellah ou l�inauguration d�une aire de stockage par un ministre. Mais la t�che historique, c�est la fertilisation
d�un d�sert, l��dification de villes nouvelles sur les Hauts-Plateaux, la conqu�te du Sud comme d�autres conquirent leur Ouest� Les peuples dans l�histoire ne meurent jamais de mort naturelle, ils se suicident� Que sera l�Alg�rie dans trente ans, en l�an 2014 du troisi�me mill�naire ? (fin de citation). Quelques semaines apr�s, je revenais sur le sujet dans �L�obligation des vivants� (6 d�cembre 1984) qui �tait ax� non pas sur les trente ann�es �coul�es, mais sur les trente ann�es � venir. J�y posais une autre question qui paraissait alors attentatoire � l�orgueil national : �Avons-nous un avenir ? Aujourd�hui, nous sommes dans cet avenir.� En voici quelques extraits : �Novembre a v�cu. Ce mois que nous avons voulu cette ann�e une longue et �blouissante Toussaint en l�honneur de ceux qui ont pay� de leur vie la ran�on de notre lib�ration est pass�. Il laisse les vivants songeurs sur ce qu�il convient de faire pour que l�existence que les martyrs leur ont l�gu�e comme une �preuve ne soit pas une vaine dur�e physique dans le temps destructeur. Les morts ont tenu parole et accompli leur obligation envers le pays. Le monde entier en est t�moin. Les vivants leur sont redevables de tout, et notamment de la fiert� qui leur fait lever haut la t�te parmi les peuples, et du p�trole qui les a d�shabitu�s de la faim et de la mis�re. Sortis de leur chronologie, ce mois et son symbolisme vont-ils aussi sortir de leur psychologie, de leur conscience ? Vont-ils, pass�e la f�te, dire adieu � leurs saints et revenir chacun � leurs fins personnelles, ou, au contraire, avoir honte et s�employer � faire plus et mieux � l�avenir pour donner du patriotisme de convaincantes expressions pratiques�? Novembre a �t� l�occasion d�une revue r�trospective du pass�. Mais il peut �tre aussi celle d�une r�flexion sur l�avenir, d�une projection trente ann�es en avant pour essayer d�imaginer ce que nous serons en l�an 2014. Tout le monde conna�t le bilan de cl�ture laiss� � la post�rit� par les morts. Quel bilan laisseront les vivants dans trente ans ? Que sera l�Alg�rie � l�aube du troisi�me mill�naire gr�gorien ? ... Avons-nous un avenir ? De prime abord, la question choque, indigne. Ce n�est pourtant pas une insulte. Des nations autrement plus fortes et s�res d�elles-m�mes que nous se la posent � voix haute devant des ph�nom�nes ou des d�fis comme la mont�e du ch�mage, le d�classement de leur industrie ou leurs difficult�s � op�rer les mutations technologiques rendues n�cessaires par l�acc�l�ration de l�histoire et l�av�nement de convives inattendus au banquet de d�veloppement�� (Fin de citation). Quelles r�ponses apporter aujourd�hui � ces questions pos�es il y a vingt-huit ans ? A-t-on le sentiment d�avoir avanc� ou recul� ? La �trag�die nationale� dont on n�est toujours pas sortis n��voque-telle pas un suicide national ? Ne sont-ils pas majoritaires les Alg�riens qui pensent que c��tait mieux ces ann�es-l�, que nous vivions dans une totale s�curit�, qu�il n�y avait pas cet �talage de richesses indues, de corruption et de r�gionalisme, qu�il n�y avait ni islamisme ni terrorisme, et que nous �tions mieux consid�r�s dans le monde ? Avant, le pouvoir justifiait son incapacit� � r�soudre les probl�mes de la nation en soutenant qu�il n�avait pas assez de moyens pour faire le bonheur de tout le monde. Aujourd�hui, il a les moyens, il ne sait que faire des exc�dents de moyens sous lesquels il croule, mais il n�y a toujours pas de travail, de logements, de justice et de � kima� pour tous. Donc pauvre ou riche, avec ou sans moyens, l�Alg�rie est vou�e � �tre malheureuse. Avec ou sans moyens, l�Etat est incapable de cr�er une dynamique �conomique cr�atrice d�emplois, une dynamique intellectuelle propice � l�am�lioration de l��ducation et du civisme chez les citoyens, et une dynamique politique qui aurait instaur� la confiance entre les citoyens et leurs institutions et pr�par� la rel�ve. Pourquoi ? Je me trouvais il y a une dizaine d�ann�es � Mexico en compagnie de notre ambassadeur dans ce pays, l�honorable M. Taffar. Ce jour-l�, les Mexicains c�l�braient leur f�te nationale, et notre ambassadeur m�avait emmen� sur la gigantesque place o� se rassemblent les Mexicains pour f�ter les grandes occasions. Des dizaines de milliers de citoyens de toutes conditions affluaient vers cet endroit, charg�s de drapeaux et rayonnants de joie. Des orchestres ex�cutaient des airs qui n��taient pas de la musique militaire mais des romances qui vous p�n�trent l��me. A un moment, je me sentis submerg� de tristesse devant cet �talage si naturel d�amour patriotique et ne pus retenir mes larmes. Je voulais me cacher de notre ambassadeur � qui je n�aurais pu expliquer mon �tat s�il m�avait interrog�. Cette tristesse qui m�avait fendu le c�ur �tait celle que m�inspirait l��tat de mon pays lointain. L�Alg�rie, c�est un vaste pays, un grand peuple et de consid�rables ressources naturelles, mais ce n�est encore ni un Etat d�finitivement stabilis�, ni une soci�t� ciment�e et homog�ne, ni une �conomie aux bases solides. Cela fait deux mille ans que le chantier est ouvert, que des g�n�rations de main-d��uvre se relayent, que les mat�riaux br�lent au soleil, sans que les travaux aient abouti � un ouvrage d�finitif. Telle une soci�t� en faillite qui voit ses actionnaires se disperser, elle est r�duite � sa plus simple expression : des richesses naturelles qui d�p�rissent, du temps qui s��coule inutilement et des �tres humains qui d�ambulent dans la vie d�sabus�s et sans but. Tout le monde est malheureux, se plaint et rechigne ; tout le monde peste contre les dysfonctionnements et les d�sagr�ments, mais personne n�admet qu�il est lui-m�me la cause de l�un ou de l�autre, nul ne reconna�t que sa propre carence est � l�origine de celle des autres, que nous nous valons tous et que nous sommes, dans le mal, les exactes r�pliques les uns des autres. Parce que nous avons peu fait ensemble au cours des deux derniers mill�naires, parce que nous avons �t� soumis � des influences �trang�res disparates, nous �prouvons de la peine dans les temps pr�sents � entreprendre ensemble et � nous trouver des d�nominateurs communs. Une r�flexion sur nous-m�mes s�impose, exigeant, pour comprendre ce qui nous arrive depuis toujours, de parcourir d�un regard neuf notre itin�raire historique, de scruter les abysses de notre �tre, de fouiller dans nos mentalit�s et nos traditions, � la recherche du sens de nos comportements pass�s et pr�sents car c�est l� qu�est nich�e l�explication de nos drames anciens et r�cents. Une r�flexion commence par des interrogations. En voici quelques-unes : pourquoi avons-nous �t� tant de fois colonis�s ? Pourquoi sommes-nous si souvent en d�saccord entre nous, pr�f�rant parfois comme un moindre mal l�arbitrage de l��tranger ? Pourquoi nos plus s�res r�f�rences ne remontent- elles qu�au 1er Novembre 1954 ? Pourquoi tardons- nous � devenir un Etat permanent, une soci�t� homog�ne et une �conomie fonctionnelle ? Ces questions essentielles ont �t� ignor�es, �lud�es ou enfouies sous des montagnes de mensonges et de fard, mais ce que nous avons connu depuis 1988 les a remont�es � la surface, r�clamant des r�ponses dont la n�cessit� est aussi imp�rieuse qu�une boussole pour un marcheur qui a perdu son chemin. Nous allons proposer, � travers la s�rie inaugur�e aujourd�hui, une lecture susceptible de jeter une lueur de clart� sur notre sort � travers les �ges. L�histoire, c�est le recensement et la description des faits ; la philosophie de l�histoire, c�est la recherche de leur sens, leur interpr�tation coh�rente. Les id�es et les explications qui seront mises en avant dans ce cadre pourront para�tre brutales, les mots durs et les jugements s�v�res, mais ils participent d�une m�thode p�dagogique destin�e � faire appara�tre sinon la v�rit�, du moins le vraisemblable. La th�se g�n�rale est que nos probl�mes anciens et r�cents viennent des id�es que nous portons, ces id�es ont forg� tout au long de notre histoire une psychologie, cette psychologie a d�termin� nos comportements, et nos comportements ont cr�� la r�alit� qui est la n�tre aujourd�hui.
N. B.
Dimanche prochain :
2) La M�re-patrie et ses enfants.


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