Par Ahmed Halli [email protected] Un quotidien nous avait annonc� une �fatwa� sur la baignade en p�riode de Ramadan, � l'initiative du minist�re des Affaires religieuses, mais elle tarde � venir. Comme toujours en pareille p�riode, il n'y a que la sp�culation et la hausse des prix qui sont au rendez-vous. Pour ne pas changer, nous avons aussi l'�ternelle pol�mique sur la viande congel�e d'origine �koffr�, c'est-�-dire non issue de pays musulmans. Et revoil� cheikh Chems-Eddine, �Al- Djaza�ri� pour les non-initi�s qui en apprend de belles aux ignorants que nous sommes. D'abord, cette fameuse viande indienne dont on nous dit qu'elle est �gorg�e rituellement, mais sans en avoir des preuves certaines. Ce qui pose probl�me, pour le cheikh, c'est que l'Inde nous oblige � consommer ses propres divinit�s (les vaches sacr�es) sans qu'on sache si ces divinit�s ont �t� �gorg�es ou seulement assomm�es. Tout le monde sait que les divinit�s pa�ennes ne sont pas vivables en milieu monoth�iste, encore faut-il y mettre la mani�re avant leur recyclage dans les bons estomacs des vrais croyants. Or, les vrais croyants ne sont pas majoritaires en Inde puisqu'ils ne repr�sentent que 12% de la population totale, hindouiste en majorit�. Voyez avec quel cynisme ces hindouistes nous offrent en p�ture, si j'ose dire, leurs vaches sacr�es sans m�me se donner la peine de proc�der � leur abattage rituel. �Et pis, d'abord�, comment voulez-vous qu'ils respectent la foi des vrais croyants s'ils ne m�nagent pas leurs propres divinit�s ? sugg�re l'in�narrable imam. La solution ? Eh bien, elle se trouve dans ce Soudan qui nous r�ussit si bien, beaucoup plus qu'il ne r�ussit � ses concitoyens et voisins imm�diats. Argument massue susceptible de faire tomber toutes les barri�res di�t�tiques : la viande soudanaise, en plus d'�tre �halal�, est sans cholest�rol ! C'est cheikh Chems-Eddine qui l'affirme, et il n'y a aucune raison de ne pas le croire dans un pays o� le cholest�rol est class� ennemi public num�ro deux apr�s la la�cit�. Une autre raison aussi �vidente de pr�f�rer la viande soudanaise, selon le cheikh, c'est que les Soudanais nous aiment, comme ils nous l'ont prouv� lors de la �bataille d'Oum-Dourman�. Une �bataille� que nos archivistes n'ont pas h�sit� � classer parmi les grands chefs-d'�uvre du cinquantenaire, en compagnie des plus c�l�bres triples incantations pr�sidentielles. Et si ceux qui nous gouvernent et g�rent nos estomacs refusent d'aller s'approvisionner � Khartoum, alors mangeons de la chorba sans viande ! �a n'a jamais tu� personne, proclame le cheikh avec la mine r�jouie d'un v�g�tarien de fra�che conversion. En parlant du Soudan et de la bataille d'Oum-Dourman qui nous a permis de faire trembler le tr�ne des Moubarak, il faut que je vous dise quelques mots d'une vieille connaissance, d�j� �voqu�e dans ces colonnes. Il s'agit de notre confr�re �gyptien Tewfik Okacha qui fait actuellement fl�ches de tous bois contre le mouvement des Fr�res musulmans au pouvoir. Or, Tewfik Okacha n'est pas sp�cialement un journaliste, taill� dans le roc et aux convictions in�branlables, il est m�me consid�r� comme le mod�le parfait de l'opportuniste de cour. Ses adversaires rappellent son appartenance au d�cri� �Parti national d�mocratique � qui a dirig� l'�gypte durant quatre d�cennies. Ils ont m�me mis en ligne une vid�o (voir Tewfil Okacha sur You Tube) le montrant en train d'embrasser la main de Safwat Cherif, alors ministre de l'Information de Moubarak. Une vid�o dont il a ni� l'authenticit�, sur sa cha�ne satellitaire Les Pharaons, accusant ses d�tracteurs d'avoir fait un montage grossier. Les Alg�riens l'ont surtout connu pour ses diatribes contre eux lors de l'intense pol�mique qui a suivi le match �gypte-Alg�rie � Khartoum le 18 novembre 2009. Il avait notamment affirm� que le match et les incidents qui l'ont suivi �taient le r�sultat d'un complot irano-isra�lien. Il y a deux ans, il s'en �tait pris d'une mani�re originale � Mohamed Barada�, potentiel pr�sidentiable, en l'accusant d'�tre trop loin du peuple et de ses tracas quotidiens. �La preuve, disait-il, je le mets au d�fi de nous dire comment font les paysans �gyptiens pour gaver une oie !� Lors de la r�volution du 25 janvier, le directeur de Pharaons-TV a d'abord men� campagne contre les manifestants, puis il a soutenu le pouvoir militaire contest� avant de se retourner contre lui. Mais il y a un point sur lequel il s'est montr� d'une rare constance, c'est celui de son hostilit� au mouvement des Fr�res musulmans. C'est lui qui a mis en vogue le terme de �Sionisme islamiste� pour qualifier le mouvement des Fr�res musulmans, qu'il accuse de collusion avec les �tats-Unis et Isra�l. Depuis l'�lection de Mohamed Morsi � la magistrature supr�me, Tewfik Okacha a redoubl� de f�rocit� et il a m�me saisi les tribunaux afin d'invalider l'�lection du pr�sident islamiste. Pour montrer son respect pour les magistrats d'�gypte, contrairement � Mohamed Morsi, sugg�re-t-il, il affirme qu'il respectera leur d�cision. �Si la justice fait droit � ma requ�te, dit-il, j'en appellerai au peuple afin qu'il fasse ex�cuter la d�cision. Dans le cas contraire, je resterai un opposant respectueux de la loi, mais d�termin� face au pouvoir islamiste. � Tewfik Okacha ne se prive pas, par ailleurs, � l'occasion de faire �tat de sa ferveur religieuse en rappelant, in fine, ses s�jours sur les Lieux Saints. Mais il se dit convaincu que l'�volution politique actuelle, avec l'arriv�e au pouvoir des islamistes, ne profite qu'aux �tats-unis et � leur alli� principal dans la r�gion, l'�tat sioniste. Il concentre surtout ses attaques conte la cha�ne du Qatar Al-Jazeera qu'il consid�re comme le porte-voix de ce �Sionisme islamiste� qui vient de s'installer en �gypte avec le mouvement des Fr�res musulmans et ses alli�s fondamentalistes. Mais � islamiste, islamiste et demi : apr�s avoir lanc� l'id�e en l'air, les fondamentalistes sont soudain confront�s � son application. Un �salafiste� �gyptien, ing�nieur de son �tat, a mis en pratique le verset du Coran sur la possession d'odalisques, en adoptant un double statut pour son �pouse actuelle, d'origine marocaine. Abd Raouf Aoun, c'est son nom, s'est mari� l�galement devant un tribunal, mais il a aussi effectu� une transaction avec son �pouse en l'achetant �milkal- yamine�, comme jadis sur un march� � esclaves. La semaine derni�re, Abd-Raouf est pass� sur le plateau de la cha�ne priv�e Sada-Albilad, ramenant avec lui le t�moignage de son �pouse �milk-al-yamine�. Des th�ologiens d'Al-Azhar et d'ailleurs ont contest� sa th�orie et son proc�d�, mais lui soutient que rien n'interdit la relation �milk-al-yamine�, et que c'est � ses contradicteurs d'apporter la preuve que ce type de lien est illicite. Il y a comme une pluie de pierres sur le �jardin� islamiste.