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QATAR
Diplomatie du ch�quier et wahhabisme en poupe (10e partie)
Publié dans Le Soir d'Algérie le 10 - 10 - 2012

L�investissement long et silencieux de l�Arabie Saoudite dans la promotion du wahhabisme international a donn� ses fruits, mais il faut se pr�cipiter de les cueillir avant que ce Hamad ne rafle tout pour lui ! Les vieux monarques de Riyadh se r�veillent.
Des d�cennies durant, ils ne focalisaient que sur l�Iran ; et voil� que les frasques de l��mir qatari leur offrent une visibilit� � l��chelle plan�taire. En Libye, en Tunisie, en Egypte, Hamad offre son expertise de putschiste par Al Jazeera interpos�e. Et lorsque la destitution pacifique ne fonctionne pas, il envoie des armes aux rebelles libyens qui font de Benghazi et d�autres villes des zones lib�r�es (zones d�exclusion, en langage militaire), ce qui signifie que les plans offerts � son ami Abdel Jalil �taient �tudi�s bien � l�avance par des experts en mati�re militaire. C�est aussi ce que veulent faire, d�sesp�r�ment, ses mercenaires en Syrie. La politique �trang�re du Qatar est le r�sultat de bien d�autres param�tres mais son carburant est ce culot rendu possible, comme un blanc-seing total, par la seule existence de bases am�ricaines dont celle d�Al Oude�d est la plus grande � l��tranger. Les 10 000 hommes militaires, les navires de guerre, porte-avions, les bombardiers et antimissiles am�ricains d�ploy�s au Qatar font de cet �mirat un protectorat comme dans les si�cles derniers. Quoiqu�articul�e sur cette force �tatsunienne, la ligne diplomatique du Qatar semble floue mais ses positions apparemment contradictoires trahissent une duplicit� notoire. Par exemple, durant la guerre isra�lo-libanaise de l��t� 2006, Qatar a affich� son soutien au gouvernement et au peuple libanais, mais en m�me temps, il a autoris� les Etats-Unis � utiliser son territoire pour livrer des bombes dites intelligentes � Isra�l ! La fourberie, c�est l� une caract�ristique fondamentale de cette �diplomatie� �galement caract�ris�e par l�audace, la versatilit� et l�absence de principes. Ici, les alli�s sont tous conjoncturels, qu�ils soient arabes ou autres, mais avec la constance de la vassalit� due aux puissances occidentales. C�est ce que prouvent ses relations avec l�Iran, l�Arabie Saoudite, la Syrie et m�me les autres pays du Golfe que Hamad a essay� de d�stabiliser. En octobre 2010, l��mir Khalifa bin Hamad Al-Thani disait qu�il ne s�ing�rerait jamais dans les affaires des autres pays et qu�il se concentrait sur l'�ducation, la sant� et les investissements, en se tenant �� l'�cart des conflits et des questions militaires� afin de �jouer les m�diateurs dans les crises, sans prendre position en faveur d'un camp ou d'un autre�, selon Politique internationale. com(1). Or, on sait que Doha a commenc� � financer le terrorisme en Alg�rie d�s 1994, que plusieurs membres de la famille r�gnante ont financ� les djihadistes, que l�actuel ministre de l�Int�rieur a h�berg� des talibans � l�aller et au retour d�Afghanistan qu�il a m�me rencontr� Ben Laden, selon un c�ble officiel sur WikiLeaks.
Le wahhabisme, �id�ologie� conqu�rante
Une politique du ch�quier coupl�e � un entrisme qui abuse du pousse-toi que je m�y mette ont permis � cette diplomatie d��tre sous les feux de la rampe, � la place de pays traditionnellement plus repr�sentatifs, notamment sur la question palestinienne. Les �printemps arabes� ont �t� une occasion pour Doha de se surpasser, de monter sur ses ergots en ajoutant une �chelle pour se rendre plus visible, au point o� certains y voient r�ellement un g�ant. En tout cas, son bellicisme a fait mal en Libye, en Syrie, au Mali et ailleurs. Car ce pays est derri�re tous ces troubles et conflits qu�Al Jazeera pare du beau burnous de �printemps arabe�, sauf ceux de Bahre�n o� Doha a envoy� ses troupes pour mater l�opposition, tout comme l�Arabie Saoudite dont la cha�ne qatarie �vite de montrer les manifestations et leur r�pression. Pour mettre en place son nouvel ordre mondial, ou son Grand Moyen-Orient (GMO), ces nouveaux plans Sykes-Picot enrob�s d�une publicit� humanitaire, lib�ratrice et civilisatrice (comme ce fut le cas en Irak o� pr�s de 2 millions d�Irakiens ont perdu la vie et le pays ramen� un si�cle en arri�re), l�Occident s�est trouv� des complices pr�cieux. Le beau cheval de Troie nomm� Qatar ne se contentera pas de hennir, il aura � faire les basses besognes : massacrer les Libyens sous pr�texte de leur apporter la d�mocratie, massacrer les Syriens, en envoyant des milliers de terroristes wahhabites recrut�s � travers le monde. Pour l�Occident, le wahhabisme et le terrorisme sont des outils strat�giques pour remodeler la carte du monde ch�re au GMO ; et pour les monarchies de la p�ninsule arabique, un moyen de se venger de ces d�mocraties socialistes, nass�riennes ou ba�thistes qui les avaient tant emp�ch�es de dormir en paix. A l��poque de Nasser, Boumedi�ne, Hafid El-Assad, Saddam, Kadhafi et m�me Bourguiba, ces rois et �mirs �taient m�pris�s autant que leurs �id�ologies�. Aujourd�hui, ils ont r�ussi � renverser les valeurs et imposer le wahhabisme pour faire r�gresser les autres peuples � leur niveau et remettre en question les acquis de la modernit� et du progr�s. La volont� de r�gression � �r�gression f�conde�, disent leurs conseillers occidentaux � ce sympt�me de d�mence pure et simple, en tout cas d�une schizophr�nie caract�ris�e, s�est impos�e dans nos soci�t�s gr�ce � la p�n�tration de la propagande salafiste et wahhabite. Le wahhabisme � burka et le salafisme au kamis virent ais�ment au djihadisme arm� qui voit partout des impies � tuer. Des millions l�ont �t�, en Afghanistan, en Alg�rie, en Syrie et dans de nombreux pays, m�me en Arabie Saoudite car il n�est pas dit que celui qui nourrit un serpent ne se fasse pas mordre. Lorsque Riyadh s�alignait sur Washington et Tel-Aviv contre le Hamas palestinien, Doha organisait une conf�rence sur Ghaza en janvier 2009 pendant l'offensive isra�lienne �Plomb Durci�. Tirant la couverture � soi, le Qatar �carte en m�me temps l�Egypte, et s�appr�te � sacrifier l�OLP, pour ne pas dire tout le peuple palestinien. En 2011, il isolera Damas en demandant au Hamas de s�installer � Doha, en contrepartie d�un milliard de dollars : dans son nouveau si�ge, dans le voisinage d�Abassi Madani, Khaled Mecha�l repr�sentera-t-il peut-�tre mieux la cause palestinienne� La crise syrienne actuelle s�inscrit dans cette strat�gie qui vise � l�irakisation ou l�afghnanisation de ce pays, � en faire un pays ingouvernable avec un terrorisme p�renne � bombes quotidiennes et kamikazes en sus � comme il vise � la liquidation du probl�me palestinien, et en m�me temps � �mietter la Jordanie et le Liban en petits Etats confessionnels et ethniques. Maintenant qu�il tient en laisse cet alli� et sa Ligue arabe, l�Occident peut attaquer n�importe quel pays musulman sans �tre accus� de croisade. Et les fr�res musulmans autant que les wahhabites, gr�ce � lui, auront obtenu une honorabilit� qui les propulse aux fauteuils de la pr�sidence et des Parlements (Morsi, Ghennouchi, Abdel Jalil) et m�me � des postes militaires importants, comme ceux attribu�s aux terroristes libyens notoires Isma�l Al-Salabi, Abdelhakim Belhadj et Abu Sofiane Qoumou. A la t�te d�une poign�e de terroristes soutenus par la Maison-Blanche, Hamad s�en va faire des �r�volutions� dans le monde arabe avec comme objectif final de mettre � genoux l�un des derniers ra�s arabes modernistes, El-Assad. Apr�s avoir vu couler le sang de dizaines de milliers de Libyens et celui de Kadhafi comme cadeau supr�me, l��mir d�une dictature dynastique peut alors clamer, avec cynisme : �Les peuples arabes de la r�gion aspirent � la d�mocratie et la justice et d�testent la corruption et la tyrannie.�(2)
Une diplomatie excommunicatrice
Une diplomatie offensive et intol�rante va bient�t se transformer en diplomatie excommunicatrice, takfiriste : si tu n�es pas avec moi c�est que tu es contre moi, est le principe qatari. En un tour de main, Doha a r�ussi � dresser tous les Etats arabes et musulmans ou presque contre la Syrie. Le pays des omeyyades sera exclu de la Ligue arabe. Puis cette m�me Syrie qui a aid� � cr�er un Islam tol�rant et �quilibr�, sera exclue de l�Organisation de la coop�ration islamique ! A La Mecque, le sommet de la trahison et de la l�chet� (14 ao�t 2012) va excommunier tout un peuple pour enterrer � la fois la Syrie et la Palestine. En un tour de passe-passe, Hamad a transform� une Ligue arabe moribonde et inutile en une secte de la compromission au dollar, une simple chambre d�enregistrement de la Maison-Blanche, et l�Organisation de la coop�ration islamique en une coquille vide, dans l�attente qu�elles n�implosent si elles ne continuent dans la trahison. L�agenda �tatsunien et atlantique allou� au Qatar inclut aussi l�Arabie Saoudite mais cette derni�re, trop vieille, devait �tre m�nag�e pour des t�ches en apn�e. La parole �tait donn�e au tonitruant Premier ministre qatari dont la force de l��ge lui donne cette assurance que le monde arabe tout entier finirait bient�t � ses pieds. Ici, la diplomatie est assimil�e � de la pr�dation, pas � du partage ou de l��change, alors que la politique suppose de la solidarit� lorsque n�cessaire : il n�y a aucune diff�rence entre la vision qatarie et la diplomatie imp�rialiste du fort avalant le faible. D�ailleurs, on ne peut pas analyser la politique qatarie suivant les crit�res des Etat-nations institutionnalis�s, rationnels avec des fondements civilisationnels et historiques. Le Qatar n�a que quatre d�cennies d�histoire et il se propulse sur la sc�ne mondiale, ce qui ne manque pas d�irriter m�me ceux qui tirent ses ficelles. Quand il met quelqu�un dans le collimateur, il faut qu�il le d�boulonne : cela a march� avec Saddam, Kadhafi, Ben Ali et Moubarak, en fournissant armes, terroristes et un d�luge de propagande sign� Al Jazeera. Pour affirmer sa pr�sence, il ne se contente pas de profiter du vide laiss� par les autres pays arabes mais il le cr�e par des op�rations de d�stabilisation qui visent m�me ses voisins, le Kowe�t et les EAU ! Aujourd�hui, l�Arabie Saoudite et le Qatar ont aplani leur diff�rend frontalier au profit de leur pr� carr� et des int�r�ts am�ricains. L�Iran est dans leur viseur, les Etats-Unis l�ayant d�sign� comme leur ennemi mortel, sous pr�texte d�une �lutte contre la propagation du chiisme�, une lutte qui vise � diaboliser T�h�ran pour maintenir une tension permanente dans la r�gion. Sans tension, pas de vente d�armes. Doha et Riyadh sont devenus les piliers de ce qu�on appelle �l�arc sunnite�, cette invention moyen�geuse de l�Arabie Saoudite qui engloberait les pays de la p�ninsule ainsi que l�Egypte, la Jordanie, le Liban et la Palestine occup�e. La Syrie et l�Irak sont accus�s d�avoir trahi et de faire partie de �l�arc chiite�, alors que la Syrie est un Etat moderne o� m�me les chr�tiens ont leurs droits, l�Irak est en train de chercher un �quilibre politique entre sunnites et chiites, tandis qu�en Iran vivent pr�s de 20 000 juifs, ce qui montre la tol�rance de ces pays par rapport au mod�le saoudo-qatari. Le but est donc de ramener Damas au sein de �l�arc sunnite�, par la force ! Cet �arc sunnite� sous contr�le saoudo-qatari imposera le diktat wahhabite � tout le monde musulman. Riyadh et Doha joignent donc leurs forces pour des �r�volutions� wahhabite b�nies par les pays occidentaux qui font tout pour l�acc�s des islamistes au pouvoir, � l�image de Abdel Jalil, Ghennouchi, Morsi� Zbigniew Brzezinski disait : �Le v�ritable int�r�t vital pour l�Am�rique est d�assurer que le Golfe demeure une source s�re et stable d�approvisionnement en p�trole, vendu � un prix raisonnable � l�Occident industrialis�.� Et peu importe si une dictature �clair�e ou une dictature sanguinaire est au pouvoir dans ces pays marionnettes.
A. E. T.
(A suivre)
1. Politique internationale.com
2. Discours de Hamad au Conseil �conomique de Los Angeles le 8 avril 2011.


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