Par Ali El Hadj Tahar La relation du Qatar avec Isra�l est imp�n�trable et secr�te. Officiellement, Doha a �tabli des relations commerciales avec l�Etat h�breu en 1996, avec un bureau � Doha inaugur� par Shimon Peres. Un bureau, pas d�ambassade, mais des activit�s diplomatiques tr�s denses entre les deux pays. En janvier 2008, le ministre isra�lien de la D�fense, Ehud Barak, a rencontr� l'ancien Premier ministre qatari Cheikh Abdullah bin Khalifa Al-Thani, � Davos, en Suisse. Plusieurs sources parlent de l'existence de pourparlers clandestins depuis, notamment en 2008 o� il y a eu des rencontres entre de hauts responsables des deux pays pour la lib�ration du soldat isra�lien Gilad Shalit et la relance des discussions sur la bande de Ghaza. En 2009, le Qatar a rompu ses relations avec Isra�l, en r�ponse � l�attaque contre les Palestiniens mais sans interdire les rencontres secr�tes, notamment entre l�ancienne ministre des Affaires �trang�res, Tzipi Livni, et l'�mir du Qatar lors d'une conf�rence de l'ONU en 2011 et le 18 janvier 2012 en Isra�l. En 2010, le Qatar a par deux fois demand� le r�tablissement des relations commerciales avec Isra�l et la r�ouverture de la mission isra�lienne � Doha, � condition qu'Isra�l autorise l�envoi de mat�riaux de construction et de l'argent aux Palestiniens de Ghaza et, surtout, qu'Isra�l fasse une d�claration publique exprimant sa satisfaction quant au r�le du Qatar et de reconna�tre sa position au Moyen-Orient. Isra�l a refus� parce que Tel-Aviv ne voulait pas s'immiscer dans la comp�tition entre le Qatar et l'�gypte sur le Moyen-Orient. Selon une information publi�e sur Press Tv le 18 janvier 2012, le chef du parti isra�lien Kadima, Tzipi Livni aurait accueilli l��mir Hamad et le Premier ministre qatari pendant une visite secr�te en Isra�l, � l�initiative du Qatar. Parmi les sujets discut�s, l�ex�cution du nouveau contrat d�exportation de gaz naturel liquide � Isra�l. D�ailleurs, selon le quotidien isra�lien �conomique Globes, Isra�l est en train de pr�parer les structures de stockage et de transport du gaz naturel qatari, et pr�voit la construction d�un immense terminal offshore flottant. Ainsi donc, Isra�l pourrait se dispenser du gaz �gyptien et prendre celui du Qatar ! L��mir qatari aurait aussi demand� la r�daction de manuels scolaires qataris par des experts isra�liens ! Il n�est pas pr�cis� s�ils seront en arabe ou en anglais� Pas besoin d�avoir des relations diplomatiques pour travailler avec Isra�l : un bureau commercial encore ferm� suffit. Des manigances � la pelle �On ne peut pas bl�mer les Isra�liens de ne pas faire confiance aux Arabes, ils ont �t� tant trahis�, disait l��mir Hamad au s�nateur am�ricain John Kerry le 23 f�vrier 2010, selon un c�ble diplomatique paru sur WikiLeaks. L��mir a dit � Kerry que le moment �tait venu pour instaurer une paix isra�lo-arabe et que, selon lui, pour atteindre ce but il fallait d�abord relancer les n�gociations isra�lo-syriennes via la m�diation turque. Selon l��mir, Damas pourrait aider les �extr�mistes arabes � faire des choix difficiles� � condition que les Etats-Unis arrivent � les convaincre � reprendre les n�gociations avec l�Etat h�breu. Ainsi, selon Hamad Ben Khalifa Al-Thani, �la Syrie pourrait �tre sevr�e de son principal alli� iranien� car �elle n�a nulle part o� aller�. Quelles ruses et circonvolutions faut-il pour isoler l�Iran ! Hamad Ben Khalifa Al-Thani a �galement dit que son pays �pourrait pousser le Hamas vers la paix�, pr�ciser avec quels arguments mais on sait que quelques mois plus tard, il allait octroyer deux milliards de dollars � Khaled Mecha�l pour le couper de Damas, d�sormais mise dans le viseur, et se venger de T�h�ran, redevenu l�ennemi chiite � abattre ! Le Hamas crachera sur les 300 millions de dollars/an ou plus que lui offrait T�h�ran et quittera Damas o� il a s�journ� pratiquement depuis sa cr�ation en 1987 pour s�installer � Doha. Cette discussion correspond parfaitement � ce qui se passe dans le monde arabe depuis janvier 2011, ce ph�nom�ne hivernal appel� �printemps arabe� et qui s�inscrit dans le projet du Grand Moyen-Orient (GMO) annonc� par l�ex-pr�sident am�ricain George W. Bush le 26 f�vrier 2003 et qui visait le �remodelage du Grand Moyen-Orient�, selon ses propres mots. Un remodelage g�opolitique suppose des fronti�res nouvelles et un d�chirement des peuples et des familles : cela ne se fait pas sans guerres ni violences ! Le Qatar a jou� son r�le dans l�agenda atlantique, ce qui a permis � dans le premier round � de sonner la Russie et la Chine, en les �cartant du Soudan qui fut alors divis� en deux Etats ethniques et confessionnels, conform�ment au plan. Puis vint le second round, sur le sol libyen et nord-africain, o� Hamad a �galement jou� son r�le de faiseur de �d�mocraties� en supportant et finan�ant Morsi et Ghennouchi. Mais s�agissant de la Libye, Nicolas Sarkozy a pr�f�r� rafler la victoire pour lui tout seul. �C'est avec l'�mir du Qatar qu'il a pr�par� dans le plus grand secret sa guerre contre Kadhafi. Avec lui encore qu'il a arm� et encadr� les rebelles. Mais quand le pr�sident fran�ais d�cide de c�l�brer la chute du dictateur libyen � Tripoli, le 14 septembre, il emm�ne ses deux autres complices, le Premier ministre britannique David Cameron et l'intellectuel Bernard-Henri L�vy. Son grand alli� arabe, lui, est exclu de la f�te. Le souverain qatari ��tait furieux�, se souvient un responsable fran�ais �, �crivent Christophe Boltanski et Vincent Jauvert dans le Nouvel Observateur du 27-12-2011. Il faut compl�ter en disant que Hamad bin Khalifa Al-Thani a irrit� Sarkozy qui lui a demand� de coordonner son action en Libye avec celle des pays occidentaux, mais il n�en faisait qu�� sa t�te, risquant de menacer l'unit� du CNT. Tandis que le ministre de la D�fense qatari �tait charg� de la r�cup�ration des armes, il les reprenait � certains groupes rebelles pour les distribuer � d�autres. C�est ainsi qu�un lot de 10 000 missiles a �t� �perdu�. Hamad, sans qui les �printemps arabes� n�auraient jamais eu lieu, n�a donc pas �t� le premier � fouler le sol de la Libye �lib�r�e�. Ses finances, ses armes, ses mercenaires et surtout sa caution arabe, c�est Obama qui les reconna�tra en l�invitant � la Maison-Blanche, mais Fran�ois Hollande viendra r�chauffer les amiti�s fran�aises, et replacer l��mir au c�ur de la strat�gie de remodelage du monde musulman, avec les m�mes acteurs et suppl�tifs qu�autrefois lors du plan Sykes-Picot. Peut-�tre que Hamad joue le r�le trouble de Lawrence d�Arabie, avec bourse d�li�e et cha�ne de propagande en plus. Agent du nouvel ordre mondial Le remodelage du monde musulman est une id�e ancienne que Bush fils a reprise, qu�Obama a encore d�velopp�e mais qui a commenc� avec la premi�re guerre d�Irak en 1991. En effet, le 11 septembre 1990, � la veille de l�attaque de l�Irak apr�s l�invasion du Kowe�t, le pr�sident George H. W. Bush a prononc� devant le Congr�s un discours o� il a r�v�l� les grandes lignes du projet pour un nouvel ordre mondial : �Nous nous trouvons aujourd�hui � un moment exceptionnel et extraordinaire. La crise dans le Golfe persique, malgr� sa gravit�, offre une occasion rare pour s�orienter vers une p�riode historique de coop�ration. De cette p�riode difficile, notre cinqui�me objectif, un nouvel ordre mondial, peut voir le jour : une nouvelle �re, moins menac�e par la terreur, plus forte dans la recherche de la justice et plus s�re dans la qu�te de la paix.� La messe �tait dite. La d�sinformation fera son travail pour faire croire que le nouvel ordre mondial est une bonne chose pour toute l�humanit�. Son fils, George W. Bush, celui qui fera la deuxi�me guerre contre l�Irak et qui pr�sidait des Etats-Unis lors de l�attentat du 11 septembre 2001, �toffera le concept et lui donnera le nom de Grand Moyen-Orient, pour �tre plus pr�cis, avec tous ceux qui ont accompagn� ce projet �labor� depuis longtemps : Dick Cheney, vice-pr�sident des �tats-Unis aux c�t�s du pr�sident George W. Bush du 20 janvier 2001 au 20 janvier 2009, Donald Rumsfeld, secr�taire � la D�fense de Bush, Paul Wolfowitz, le secr�taire adjoint � la D�fense. Dick Cheney est surtout l�un des concepteurs de l�attentat du 11 septembre 2011 (selon de nombreuses personnalit�s dont Robert Bowman, l�ancien directeur du d�veloppement des Programme spatiaux avanc�s pour l�US Air Force sous les administrations de Ford and Carter)(2), celui que le Washington Post accuse d�appartenir � �la soci�t� secr�te� qui a commandit� l�assassinat de Rafik Hariri afin d�accuser Al-Assad, puis celui qui a fond� le think-tank n�oconservateur PNAC (Projet pour un nouveau si�cle am�ricain) dont le but est de promouvoir le leadership global des �tats-Unis au XXIe si�cle et bien d�autres besognes. Donald Rumsfeld est l'homme qui a mis en branle la guerre en Afghanistan et celle contre l�Irak et qui, �clabouss� par le scandale de la prison d'Abou Ghra�b, est accus� d�avoir l�galis� la torture quand elle est pratiqu�e sur des suspects de terrorisme, ainsi que de beaucoup d�autres besognes et d�lits d�initi�s, notamment dans l�affaire la grippe aviaire car il �tait devenu pr�sident du conseil d'administration de l�entreprise Gilead Sciences qui a d�velopp� le fameux Tamiflu. Paul Wolfowitz �tait sous les ordres de Donald Rumsfeld, artisan des invasions militaires et qui, d�s le lendemain des attentats du 11 septembre 2001, les a qualifi�s d'opportunit� pour la mise en place d'une nouvelle donne g�opolitique au Moyen-Orient. L�attentat contre le World Trade Center et contre le Pentagone faisait partie dudit plan. La propagande pour la �recolonisation� et/ou la destruction du Moyen-Orient est contenue dans le discours m�me de Bush du 11 septembre 1990 (notez la date !) : �Un monde o� la primaut� du droit remplace la loi de la jungle. Un monde o� les Etats reconnaissent la responsabilit� commune de garantir la libert� et la justice. Un monde o� les forts respectent les droits des plus faibles.� En v�rit�, ce �meilleur des mondes� est le pire des mondes pour les faibles, surtout s�ils sont musulmans, qu�ils ont du p�trole et qu�un traitre les m�ne par le bout du nez. Or, la trahison est ancienne dans la r�gion du Golfe, les conspirations contre Saddam Hussein en t�moignent. Et c�est exactement au onzi�me anniversaire de ce discours, jour pour jour, qu�aura lieu l�attentat du WTC et du Pentagone. Dans le monde arabe, l�antagonisme entre le �front du refus� � l�h�g�monie am�ricaine et sioniste et l�axe mod�r� prend nettement l�avantage au profit de l�axe mod�r� qui n�est plus aussi mod�r� qu�il l��tait il y a une dizaine d�ann�es de cela, avant l�intrusion du Qatar sur sc�ne, dopant les Emirats et l�Arabie Saoudite qui n�ont auparavant jamais compt� dans le concert arabe et dont la proximit� am�ricaine en fait aujourd�hui les t�nors de la parole diplomatique arabe, d�autant qu�ils ont fait main basse sur la Ligue du m�me nom, et m�me sur l�Organisation de la coop�ration islamique. Autrefois sans-voix, les valets de l�Occident sont devenus des faucons qui imposent leur loi. L�Occident les �coute, leur voix est pr�pond�rante, notamment sur la question palestinienne et sur un Iran diabolis�, T�h�ran �tant leur grand ennemi � cause de son �h�g�monie chiite� et de sa �bombe atomique�, car il leur faut toujours un pr�texte pour la fitna. Depuis que ces faucons ont fait des �r�volutions arabes� et de l�Iran les th�mes centraux, la Palestine est dans le brouillard, voire compl�tement sortie du champ du r�troviseur. Des Palestiniens meurent, oubli�s des Arabes. Et m�me les d�mocrates am�ricains osent dire que J�rusalem est la capitale d�Isra�l. A. E. T.