J��tais jeune et na�f, j�avais des id�es bien arr�t�es sur la politique alg�rienne, que je croyais �tre d�abord une histoire d�id�es et de projet, mais �a, c��tait avant. Depuis, j�ai grandi, et mes id�es sur la politique sont devenues des d�sillusions, une montagne de d�sillusions sur laquelle je me suis assis pour contempler, de plus haut, le paysage politique alg�rien. Affreux ! Au-del� des probl�mes d�illettrisme, de mysticisme, de superstition, de clanisme, de client�lisme, de corruption et autres histoires de surpoids dont souffrent beaucoup (vraiment beaucoup) de nos politiciens, j�ai observ� un probl�me math�matique. Supposons que A est �gal aux nombres d�id�ologies, de projets ou de courants politiques existants dans un pays et que B est �gal au nombre de partis politiques dans ce m�me pays, supposons aussi que la th�orie qui dit qu�un parti politique est une formation cr��e pour porter un projet, une id�e, une id�ologie, soit juste, nous devrions alors, comme la logique et le bon sens le voudraient, obtenir l��quation suivante : A=B. En Alg�rie, nous avons plus d�une cinquantaine de partis et je me suis dit qu�en temps normal, on devrait se f�liciter d�autant de diversit�, puisque la diversit� en politique induit n�cessairement un grand nombre de solutions aux probl�mes du pays, un plus grand nombre de propositions donc plus de chances de tomber dans le vrai. Mais j�ai �t� oblig� de constater que la politique alg�rienne d�fie les lois de la math�matique et de la logique car j�ai beau compter et recompter le nombre de courants, de tendances, de variantes, de familles, de sous-familles, d�esp�ces, de genres, de classes, de factions politiques, j�arrive � peine � en discerner cinq ou six, huit quand je suis vraiment indulgent. Alors, pourquoi autant de partis ? Ne trouvant pas encore de r�ponse � cette question, j�ai repris ma contemplation du jeu politique alg�rien (�jeu�, je pense en toute modestie que le mot est bien trouv�) et c�est l� que j�ai observ� un dr�le de ph�nom�ne. Scission au FLN qui a d�j� subi un �redressement� du temps de Benflis et qui est n� en 1954, on peut le dire, d�une sorte de scission du MTLD qui souffrait lui-m�me de divisions� C�est donc un redressement au ni�me degr�, n��tant une variable dont la valeur d�pend de la port�e de nos m�moires. Scission au FFS, parti n� en 63 d�une scission du FLN qui est lui-m�me n� d�une scission� vous connaissez l�histoire ! Scission chez la quasi-totalit� des partis du mouvement islamiste alg�rien dont les fondateurs (alg�riens et contemporains) sont d�illustres dissidents du FLN dont les fondateurs �taient eux-m�mes des dissidents du�. L� aussi, vous connaissez l�histoire. Pour un ph�nom�ne, c�en est un ! C�est � croire que le politicien alg�rien a la scission dans les g�nes. Mais pourquoi ? Toujours du sommet de ma montagne de d�sillusions, je parvins � formuler une hypoth�se qui ne me parut pas trop invraisemblable. Le probl�me du politicien alg�rien est un probl�me d'ego, oui, d'ego ! Sinon, comment expliquer qu�un homme voulant se lancer en politique n�accepte pas d�adh�rer, comme le bon sens le dicte, au parti politique qui porte les id�aux et le projet pour lesquels il veut militer ? Pourquoi beaucoup se bornent � essayer de cr�er leurs propres partis ? Pourquoi un islamiste voulant faire de la politique pr�f�rera toujours (s�il en a les moyens) cr�er son propre parti islamiste au lieu d�adh�rer � l�un des partis islamistes d�j� existants. M�me histoire pour le socialiste, le lib�ral, le d�mocrate, le la�c, le communiste, etc. Pour une fois, la r�ponse est facile, elle est plus qu��vidente. Cr�er son propre parti pour en �tre le chef, le patron, le boss, le ZAIM. Voil� sans doute pourquoi l�histoire chez nous tourne en rond, voil� pourquoi le politique alg�rien n�a pas encore d�couvert la ligne droite et persiste � suivre des chemins tortueux ne d�bouchant nulle part. De Messali qui clamait haut et fort que le nationalisme, c��tait lui, jusqu�� Belkhadem qui crie du haut de toutes les tribunes et de tous les minarets que le FLN c�est lui et en passant par A�t Ahmed qui a toujours fait croire et continue � le faire que le FFS c�est lui, les grands politiciens alg�riens (j�ai longtemps h�sit� � leur donner ce titre de grands politiciens, allez savoir pourquoi !) s�ent�tent � vouloir s�approprier et, parfois m�me, contenir les id�aux au lieu de les porter et de les servir.