Entretien r�alis� par Khadidja Baba-Ahmed Le ministre de l�Int�rieur et des Collectivit�s locales, M. Daho Ould Kablia, est depuis quelques jours sur le devant de la sc�ne, l�actualit� du moment �tant essentiellement focalis�e sur les �lections locales qui se d�rouleront le 29 novembre prochain. Dans l�entretien qu�il nous a accord�, il a longuement �voqu� la pr�paration de ce scrutin par son d�partement minist�riel, les difficult�s soulev�es par certains acteurs quant � l�organisation de cette prochaine consultation et beaucoup d�autres aspects li�s � cette �ch�ance �lectorale. Mais, l�essentiel de l�entretien a consist� � l�interroger sur d�autres questions qui rel�vent de son d�partement et notamment la gestion s�curitaire et les libert�s publiques, la s�curit� aux fronti�res dans un contexte pour le moins brouill� et troubl� dans la r�gion sah�lienne, le march� parall�le de la devise et ses d�clarations qui ont stup�fait plus d�un observateur. Le Soir d�Alg�rie : Quelques jours nous s�parent du 29 novembre, date du d�roulement des �lections locales que votre d�partement minist�riel a pr�par�es. Pourriez-vous nous indiquer quel est, globalement, le dernier bilan chiffr� relatif � ce scrutin ? M. Daho Ould Kablia : Au titre de l��lection des membres des APC, il y a eu d�p�t de 8 405 listes dont 7 900 pour les 52 partis politiques en lice ; 259 pour les partis organis�s en alliance et 177 provenant de candidats ind�pendants. Ces listes r�unissent 185 187 candidats, soit 64 974 candidats de plus qu�au scrutin de 2007. Dans les listes de candidatures figurent 31 609 candidates, soit 28 472 femmes candidates de plus par rapport toujours � 2007. Quant � l��lection des membres de l�APW, nous totalisons 592 listes, dont 557 pr�sent�es par 50 partis politiques ; 26 parmi des partis organis�s en alliances et 35 listes pr�sent�es par des ind�pendants. Le nombre total de candidats pour les APW est de 32 399, soit 12 370 candidats de plus qu�en 2007. L� aussi, les candidatures de femmes � 8 779 � sont en nette progression : 7 215 candidates de plus par rapport au dernier scrutin de m�me nature. Le Soir d�Alg�rie : Combien de listes de candidatures ont �t� rejet�es et quels sont, globalement, les motifs de ces rejets ? Au titre de l��lection des membres des APC, 5 429 candidatures ont �t� partiellement rejet�es et remplac�es par les partis et 43 listes de candidatures ont connu un rejet d�finitif, autrement dit, confirm� par la justice. Globalement � ce niveau des candidatures APC, les motifs de rejets sont li�s aux dossiers incomplets, pi�ces manquantes ou non conformes, aux doubles candidatures, � la non-inscription sur les listes �lectorales, � la situation non r�gl�e vis-�-vis du service national ou encore aux conditions d��ge non remplies, enfin aux ant�c�dents judiciaires des candidats. Quant aux candidatures pour les APW, 1 130 candidatures ont connu un rejet partiel (remplac�es par les partis) et 23 listes de candidatures ont connu un rejet d�finitif, confirm� par la justice. A ce niveau, le motif des rejets est li� essentiellement au non-respect du nombre de femmes exig� par la loi. Il faut en effet souligner qu�au niveau communal, l�exigence de 30% de femmes dans les listes ne s�applique qu�aux communes, chefs-lieux de wilaya et de da�ra et de mani�re g�n�rale les communes qui ont plus de 20 000 habitants, alors que pour les APW, le pourcentage de 30% est une exigence absolue. Quelles sont, eu �gard aux listes de candidatures pr�sent�es, les formations politiques qui ont le taux de p�n�tration territorial le plus �lev� ? Sur un total de 8 562 listes pr�sent�es, les partis dont le nombre de listes est le plus �lev� sont, dans l�ordre, le FLN (1 520 listes) suivi par le RND avec 1 477 listes et loin derri�re ces deux partis, le Mouvement populaire alg�rien avec 632 listes, le Parti des travailleurs, 521 listes, et le Front national alg�rien, 472 listes. La liste est longue et la suite de celle-ci est constitu�e d�une dizaine de partis qui totalisent des chiffres qui vont de 300 � 100 listes et plus de 25 partis entre 99 et 20 listes et enfin quelques partis qui n�ont pu pr�senter que 2 � 10 listes. L�on rel�ve que les partis qui pr�sentent peu sont essentiellement les nouvelles formations qui n�ont pas encore d�ancrage profond dans le territoire, leurs formations �tant toutes nouvelles. La Commission nationale ind�pendante de surveillance des �lections locales a �t� install�e par vos soins le 17 octobre dernier. La direction en est assur�e, comme lors des �lections l�gislatives de mai dernier, par M. Seddiki. Ce dernier s�est �lev� contre ce qu�il consid�re comme �des transgressions et des d�passements observ�s tout au long de la pr�paration de ce scrutin �. Il rajoute aussi que jusqu�� pr�sent, les recommandations qu�il avait faites � l�issue du scrutin l�gislatif n�ont pas �t� prises en compte. Comment, d�s lors, peut-on accorder du cr�dit � ces �lections et que peut offrir ce syst�me de �commission ind�pendante � si d�un scrutin � l�autre, ses recommandations ne sont pas prises en compte ? Je dis simplement que je n�ai pas besoin de lui r�pondre parce qu�il porte dans ses propos les germes directs qui minimisent la cr�dibilit� de cette institution en allant battre des sentiers qui n�ont rien � voir avec son r�le. Vous ne pouvez ignorer, Monsieur le Ministre, que cela participe aussi � d�cr�dibiliser le scrutin aupr�s de bons nombre de citoyens ? �a fait d�sordre en effet mais les partis qui sont repr�sent�s dans cette commission en ont conscience et se d�marquent souvent de cette position �quivoque et unilat�rale de leur pr�sident. Sur les probl�mes, par exemple, de l�encadrement qui n�cessite de doubler les effectifs dans les bureaux, le scrutin �tant double (APC et APW), comment en effet r�pondre � notre ami Seddiki de la Cnisel qui dit souhaiter que tous les encadreurs soient pris dans le corps des enseignants ? C�est d�abord discriminatoire et ensuite comment trouver les 80 000 enseignants ? Apr�s la r�ponse que le Premier ministre a faite � la lettre que M. Seddiki lui a adress�e, il semble que le Premier ministre a r�ussi � l�apaiser. Des promesses lui ont-elles �t� faites, et si oui, lesquelles ? J�ai lu effectivement �� et l� que M. Seddiki �rentrait� dans les rangs apr�s que le Premier ministre lui eut fait des promesses. Ce que je peux vous dire, c�est que M. le Premier ministre m�a dit �tu es responsable du volet �lections locales�. Aussi, j�assume cette responsabilit� en appliquant la loi, un point c�est tout. J�ajoute ceci : toute cette agitation d�stabilise la commission mais pas les �lections. Vous aurez remarqu� que la commission de supervision, form�e de juristes aux qualit�s professionnelles affirm�es, s�est rapidement attel�e � la t�che qui lui a �t� confi�e. Elle a des dossiers tr�s sensibles dont la r�vision des listes �lectorales par exemple. Elle fait son travail et ne cherche pas de pol�mique. Les enjeux locaux sont tellement importants. Si effectivement dans les grandes villes ce type de pol�mique est entretenu, � l�int�rieur du pays, croyez-moi, �a ne se passe pas ainsi et �a se bat tr�s fort pour ce scrutin. Justement � propos de cet int�r�t des �lecteurs, il y a quelques semaines vous aviez �voqu� un certain d�sint�r�t pour ce scrutin. Vous aviez rajout� alors qu�un taux de participation de 30 � 45% constituerait �une participation correcte�. �tes-vous toujours dans ces estimations ? J�ai plut�t dit qu�entre 40 et 45%, ce serait un sujet de satisfaction. En fait, cela ne fera que la moiti� du corps �lectoral. Oui, parce que c�est la barre que l�on a jamais pu atteindre dans ce genre de scrutin. Que r�pondez-vous � tous ceux qui, aujourd�hui, sont convaincus que l�on aura jamais, pour l�instant, d��lections loyales, transparentes, sans fraudes ? La fraude est combattue officiellement et globalement. L�Alg�rie n�est toutefois pas la Su�de. L�on ne peut avoir des �lections � 100%� Il y a 48 000 bureaux de vote, 180 000 candidats. Des petits probl�mes, il y en aura mais l�essentiel r�side dans le fait que quel que soit le choix des personnes, tout se jouera au niveau du d�pouillement et de l��tablissement des r�sultats. Pour cela, le maximum de garanties est l�. Maintenant pour ce qui est de la transparence, nous donnons � tous les partis les m�mes chances. Il y en a �videmment certains qui partent avec des handicaps, c�est certain. Certaines formations, celles qui ne pr�sentent que 2 listes, cela veut dire, pour ce qui les concerne, qu�elles n�ont pas totalis� plus de 30 �lus, la moyenne par commune �tant de 15 �lus. Ceux qui nous disent qu�ils ne partent pas avec les m�mes chances, entre autres qu�ils n�auraient pas d�argent, je r�ponds qu�il y a un d�but � tout. Est-ce que tout cela ne r�sulte pas de la pr�cipitation avec laquelle certaines petites formations ont �t� agr��es, cr�ant pour le moins une dispersion ? La loi �lectorale a �t� approuv�e en janvier et pour �viter que je ne sois consid�r� comme l�homme faisant barrage � la cr�ation des partis, nous les avons agr��s, en tout cas tous ceux ayant pr�sent� un dossier complet. Cela a �t� fait dans un d�lai tr�s court, leur faisant ainsi gagner du temps. Mais nous n�avons pas fait de concessions sur les documents obligatoires pour qu�ils soient agr��s. Maintenant, ils n�avaient �videmment pas le temps de se pr�parer pour cette �ch�ance �lectorale. Ces partis naissants se construisent et ne vivent pas pour un scrutin mais pour toute une vie. S�ils veulent survivre, il leur appartient de faire les efforts n�cessaires. Dans les discours que vous produisez sur la question s�curitaire, l�on ne retrouve plus les bilans p�riodiques qui se limitaient alors � donner le nombre de terroristes appr�hend�s ou tu�s et le nombre �r�siduel� restant au maquis. Vous y d�veloppez, et c�est nouveau, un lien � terrorisme-grand banditisme � qui fait penser que la gestion du terrorisme a pris une autre ampleur. Qu�en est-il au juste ? Sur la question s�curitaire, de mon point de vue, il n�est pas n�cessaire de dresser des bilans sur le nombre de terroristes neutralis�s, �limin�s ou arr�t�s. Ces statistiques existent, elles sont produites et communiqu�es r�guli�rement par les services comp�tents de l�arm�e ou de gendarmerie ou encore les services de police. Maintenant vous remarquerez que malgr� le nombre r�duit de terroristes, l�activit� et l�effort des services de s�curit�, en particulier en ce qui concerne l�arm�e, sont toujours aussi soutenus. C�est toujours les grands moyens qui sont utilis�s dans les r�gions sensibles que ce soit en Kabylie, dans la r�gion de Jijel ou dans la partie Ouest des Aur�s. Dans ces r�gions, l�arm�e emploie de grands moyens, ce qui est co�teux, mais l�arm�e continue sa mission. M�me s�il restait demain seulement 2 terroristes, ce serait les m�mes efforts et moyens qui seront engag�s, l�objectif �tant d��radiquer totalement ce fl�au. Le lien terrorisme-grand banditisme est-il la r�sultante de la d�mission de l�Etat, observ�e ces derni�res ann�es dans certaines r�gions et notamment dans le Sud et en Kabylie qui conna�t un d�veloppement sans pareil des kidnappings suivis de demandes de ran�ons, ou est-il le fait d�un argent colossal qui circule et de prolif�rations d�armes venues de toutes parts et sur lequel l�Etat ne semble pas avoir prise ? Comme je vous l�ai dit, il y a des r�gions plus sensibles que d�autres, notamment la Kabylie compte tenu de consid�rations g�ographiques et compte tenu du fait que les terroristes ont constitu� des r�seaux de soutien, parce que sans soutien, ces terroristes ne peuvent pas perdurer. Il y a aussi le fait que depuis 2001, la gendarmerie charg�e de la lutte contre le banditisme et le terrorisme n�op�re plus dans cette r�gion. Il y a un malentendu qui existe entre la population et ce corps. C�est un malentendu qui a ses justifications. Il ne s�agit pas de revenir sur le pass� mais il faut bien que ce corps puisse s�installer et travailler parce qu�il travaille dans l�int�r�t du citoyen et pour assurer la s�curit� dans cette r�gion, ce que r�clame la population. Le banditisme est n� d�abord en Kabylie � la faveur de ce vide des services de s�curit�. Ce n�est pas une absence de l�Etat, c�est l�absence d�un corps de s�curit� qui fait que certains ont �t� encourag�s � commettre des actes qui ressemblent et qui peuvent �tre assimil�s � des actes terroristes. Nous avons vu des faux barrages �rig�s par des non-terroristes ; des kidnappings qui n��taient pas le fait de terroristes ; il y a des r�glements de comptes qui n�ont rien � voir avec le terrorisme. Tout cela est effectivement pour nous tr�s pr�occupant. L�on a beaucoup renforc� les moyens de la police nationale et cr�� des structures dans des r�gions qui n�en avaient pas. A Tizi-Ouzou, pour remettre de l�ordre et en particulier pour lutter contre le banditisme et cela donne de bons r�sultats puisque la ville, qui �tait livr�e aux bandes, voit l�ordre r�tabli. Ceci dit, la situation risque de perdurer si l�impunit� persiste. C�est quoi au juste cette impunit� ? Comment s�exerce-t-elle et par qui ? J�ai eu � parler de �non loi�. C�est essentiellement notre code p�nal qui est trop permissif. Des gens m�ont dit que je critiquais le travail des juges, ce n�est pas tout � fait le cas. Notre code p�nal devrait �tre plus s�v�re, notamment vis-�-vis des r�cidivistes. J�attire l�attention, et j�ai eu d�j� � le faire, sur le fait que 40% des faits d�lictueux sont l��uvre de r�cidivistes. Par ailleurs, les peines ne sont pas assez lourdes pour les contrebandiers. Alors qu�il y a quelques ann�es, les saisies de drogue �taient de quelques kilos, Aujourd�hui, c�est par tonnes que nous saisissons des drogues, notamment le cannabis qui vient de nos fronti�res. Cela, bien s�r, nous co�te dans la mesure o� nous avons fortement renforc� nos structures de lutte contre la contrebande aux fronti�res avec plus de 5 000 �l�ments. Il y a toutefois parmi les populations des gens qui tirent profit de cette contrebande. A propos des services de s�curit�, comment qualifieriez-vous vos �l�ments et comment �valuez-vous leur action sur le terrain ? Le r�sultat de l�action est plus que satisfaisant. L� o� nous p�chons, c�est au niveau de la pr�vention. Au niveau de la r�pression des crimes et d�lits, les services de s�curit� d�une mani�re g�n�rale, tant la police que la gendarmerie, sont d�une efficacit� totale. Aucun crime ne reste impuni plus de quelques jours. Cela est aussi le r�sultat de l�utilisation de moyens technologiques tels que l�ADN et d�une meilleure analyse de diff�rents indices. Personne ne peut �chapper � l�interpr�tation que nous offrent ces moyens. Le fait, par ailleurs, qu�il y ait une pr�sence massive dans les grandes villes de nos �l�ments qui assurent une proximit� avec la population, y compris dans les quartiers dits sensibles, contribue aux bons r�sultats. La police jouit aujourd�hui d�un taux de confiance appr�ciable, d�autant plus que depuis les �v�nements de janvier 2010, la police a montr� qu�elle n��tait pas l� pour r�primer. C�est elle qui a pris les gros coups et subi les plus grands dommages en bless�s. Elle se contr�le, se ma�trise et il est tr�s rare qu�on arrive � des d�passements o� les services de s�curit� font preuve de violence. Ils peuvent faire preuve de violence lorsqu�ils sont face � une r�sistance violente. Vous dites que la pr�vention est le maillon faible. Pour l�exercer, pouvez-vous le faire seul ? Dans ce domaine en particulier, ne faut-il pas travailler de concert avec d�autres d�partements minist�riels ou d�autres institutions ? La pr�vention est effectivement l��uvre de tous. Nous avons des observatoires, des sociologues qui analysent les faits sociaux ; le pourquoi de ces faits ; l�incidence du ch�mage sur l�ins�curit�, l�incidence de la mal-vie sur les faits enregistr�s� Tout cela a �videmment un lien mais les services de police et l�administration seuls ne peuvent r�gler la totalit� des probl�mes. La population doit y prendre part ; la soci�t� civile se doit d�interf�rer. Il y a des associations qui doivent inculquer aux citoyens ce qu�il est bon de faire et ce qui ne l�est pas. L��cole doit doit �tre une �cole de pr�vention. La mosqu�e doit �galement jouer un r�le dans la pr�vention. Est-ce qu�on y est ? En tout cas, on y va. Les conditions de vie d�plorables de vastes pans de la population conduisent ces derniers � sortir manifester leur col�re et leur ras-le bol, � tenter de se faire entendre et demander que justice leur soit rendue. Emeutes, destructions d��difices symboles de l�Etat et vies mises en p�ril dans des embarcations de fortune ont �t� observ�es dans notre pays, notamment ces deux derni�res ann�es. En guise de r�ponses, des interdictions de manifester sont prononc�es, des arrestations violentes sont effectu�es et parfois m�me des atteintes aux droits sont signal�es. Quid de la Constitution qui consacre, dans son article 33, le respect des droits de la personne et des associations ? On n�interdit pas de manifester pour la simple raison que ceux qui manifestent ne demandent jamais l�autorisation, contrairement � l�esprit de la loi. Ensuite, ce sont le plus souvent des manifestations spontan�es et la plupart du temps sans motif apparent. Une liste de logements sociaux affich�e, le courant �lectrique coup� ou qui ne passe pas, un dos-d��ne mal plac�, l�eau qui n�arrive pas et c�est autant de manifestations. Il y a des moments o� cela se justifie. La population r�agit � l�instinct et la protesta est maintenant ancr�e dans l�esprit des citoyens. Nous �uvrons pour la r�duire. Ne pensez-vous pas que si les citoyens choisissent la rue, c�est qu�ils ne se sentent pas entendus par les autorit�s ? C�est possible qu�ils ne soient pas entendus. Tous les efforts que je fais personnellement, c�est de pousser les autorit�s � recevoir les gens, � les �couter, � pr�venir mais ce n�est pas chose facile. Je peux, pour ce qui me concerne, contr�ler ce que font les walis, je leur demande des comptes-rendus ; je peux contr�ler les 500 chefs de da�ra mais il y a 1 500 pr�sidents d�APC et des dizaines de milliers d��lus qui sont en contact avec la population. Mettre un policier derri�re chaque personne pour voir s�il r�pond ou non � l�attente des citoyens est un objectif utopique. Nous avons facilit� beaucoup de choses au niveau du service public, de l��tat civil. Il n�y a plus les grandes col�res pour un papier quelconque. Tout cela nous permet de dire que nous allons dans le bon sens pour faciliter la vie aux citoyens en am�liorant le service public. Vous avez d�clar� � Oran, que vous alliez mettre tout en �uvre pour la r�sorption du commerce informel et la r�gularisation de la situation des milliers de vendeurs � la sauvette avant le Ramadan 2013. L�op�ration a d�marr�. O� en �tes-vous dans cette action ? L� aussi je suis satisfait de ce qui a �t� fait. L�action n�a pas d�marr� d�aujourd�hui. D�j� au cours de l�exercice 2011, nous avons inscrit la r�alisation de 290 march�s et pour 2012 la cr�ation de 290 autres, ce qui nous fait un total de 534 march�s de proximit�. 635 sites informels ont �t� �radiqu�s � fin septembre et sont en cours de red�ploiement. Vous ��radiquez�, Monsieur le Ministre, mais apr�s ? O� va toute cette jeunesse sans travail ? Grossir la cohorte de ch�meurs ? Il y a 7 391 jeunes commer�ants d�j� recas�s. La deuxi�me tranche 2012 va nous permettre de red�ployer 11 079 jeunes commer�ants. Ensuite, il y a les sites de march�s qui sont en cours de r�alisation et qui devront concerner 20 189 jeunes. Au total, 38 689 intervenants seront red�ploy�s d�ici le Ramadan 2013. En plus de ces deux actions, deux autres programmes vont venir s�y greffer. Nous avons r�cup�r� 5 900 locaux du programme 100 locaux par commune qui n�ont pas pu �tre r�alis�s pour des raisons objectives (pas d�assiette). Les cr�dits correspondants vont �tre affect�s exclusivement aux jeunes qui exer�aient le commerce informel. D�ici fin 2013, il y aura de la place pour 80 000 jeunes commer�ants qui auront �t� red�ploy�s. C�est s�rement une bonne op�ration mais ne fallait-il pas en m�me temps, parall�lement ou bien m�me avant, s�attaquer aux gros bonnets, aux importateurs qui, en toute impunit�, fournissent ces jeunes malheureux, et ce faisant, d�stabilisent l��conomie nationale ? Nous sommes li�s par des accords internationaux. L�accord d�association avec l�UE qui a pr�vu la r�duction des droits de douane et la libert� du commerce international. Le probl�me est de v�rifier que les marchandises qui entrent l�galement dans notre pays sont, selon l�expression consacr�e, des produits �loyaux et marchands�. Evidemment, si l�on parle de ceux qui ram�nent les cabas de Duba�, d�Istanbul ou de Shanghai, il y a l� un travail � faire pour essayer d�endiguer ce ph�nom�ne. C�est l� un travail de plus grande envergure et de longue haleine. Pour l�instant, dans cette action de lutte contre l�informel, nous cherchons � redonner leur dignit� aux jeunes qui sont exploit�s : beaucoup d�entre eux travaillent pour le compte de commer�ants qui ont ferm� leurs locaux pr�f�rant d�ployer leurs marchandises dans la rue. Cette op�ration, contrairement � ce qui pourrait �tre compris, entre dans le cadre global de lutte contre le ch�mage et aussi dans celui relatif � la remise en ordre et � niveau de l�espace public. Moi, en tant que ministre de l�Int�rieur, je suis charg� de remettre de l�ordre dans la soci�t� et faire appliquer la loi partout. Nous arrivons, Monsieur le Ministre, � la grande question qui f�che, celle qui a fait et fait encore couler beaucoup d�encre. Votre d�claration le 20 octobre dernier sur le march� parall�le de la devise a fait grand bruit pour ne pas dire stup�fi� beaucoup de monde. Vous y avez notamment dit �il est facile d��radiquer le march� noir de la devise en une seule journ�e. Mais le citoyen y trouve son compte tant qu�il n�existe pas de bureaux de change�. Venant d�un ministre de la R�publique, qui plus est dit faire la lutte contre l�informel son credo, cette d�claration interroge, pour le moins. La question m�a �t� pos�e par un journaliste sur la quinzaine de jeunes qui pratiquent le change � la place des Martyrs, et ce, dans le prolongement des actions contre l�informel d�une mani�re g�n�rale. J�ai dit que cette activit� est ill�gale mais que faute d�une solution l�gale, il est difficile d�y toucher pour le moment. Le march� des devises d�une mani�re ill�gale ou parall�le existe de mani�re globale. Les officines qui le pratiquent et les autres moyens d�importance sont plus ou moins connus et les services de s�curit� ont obtenu des r�sultats notables pour le r�duire. Cependant, il ne faut pas perdre de vue qu�au cours de l�ann�e �coul�e, par exemple, 800 000 Alg�riens ont quitt� le pays par voie terrestre et autant par voie a�rienne. Cela a un co�t. Alors comment font-ils ? Ils ont recours � tous les artifices. Ce n�est pas avec les 130 euros de change officiel qu�ils peuvent voyager, se soigner, acheter des m�dicaments, accomplir leur devoir religieux. Ces besoins font partie int�grante de leurs droits et de leur bien-�tre. L�Etat et les autorit�s mon�taires en particulier doivent en tenir compte et trouver une solution l�gale � cette situation ill�gale. J�ai vu que mes propos ont fait bouger les choses, tant mieux. Mais, dire que j�encourage l�atteinte � l��conomie nationale, le blanchiment d�argent ou la fuite des capitaux est tout simplement ind�cent. Il semblerait, d�apr�s ce qu�en a dit M. le Gouverneur de la Banque centrale devant les d�put�s, qu�ils allaient revoir tout cela. Ils ne l�auraient pas fait si le pav� n�avait pas �t� lanc� dans la mare par Ould Kablia. Je r�fl�chis et j�agis en homme public mais aussi en citoyen. Avec le d�veloppement que conna�t la situation dans la r�gion ; l�intervention militaire qui se pr�pare au Mali, l�Alg�rie va conna�tre, malgr� elle et quoi qu�elle fasse, de lourdes cons�quences sur son propre territoire. Cette situation interpelle naturellement en premier lieu le minist�re de la D�fense qui semble s�y pr�parer. Elle concerne aussi votre d�partement. Quel type d�impacts sur la population alg�rienne aux fronti�res et � l�int�rieur du territoire une intervention militaire pourrait-elle engendrer ? La position de l�Alg�rie a souvent �t� r�affirm�e par M. le Ministre des Affaires �trang�res. L�Alg�rie ne souhaite pas l�intervention militaire. La priorit� pour notre pays est de trouver une solution politique pour r�gler d�finitivement le probl�me de l�unit� territoriale du Mali. Il faut que les Touareg du Nord renoncent � leurs id�es de s�cession. L�Alg�rie s�y emploie. Actuellement, il n�y a pas de pouvoir l�gal � Bamako. Une fois ce probl�me r�gl�, et � mon avis il le sera, �radiquer le terrorisme et les narcotrafiquants dans le Nord sera facile parce que ce sera l�autorit� centrale malienne unifi�e et les riverains qui pourront coordonner leurs efforts pour venir � bout des subversifs et des trafiquants. Evidemment, si les gens s�imaginent qu�il faut r�instaurer l�autorit� centrale sur le Nord par la voie de la guerre, cela aura des cons�quences tr�s graves. Dans ce cas de figure, il sera tr�s difficile de faire regagner le bercail par les gens du Nord. Et si cette guerre affecte directement ou indirectement les populations touareg du Nord, nous avons chez nous aussi des populations touareg qui ont des liens tr�s forts avec ceux du Nord-Mali et, de ce fait, cela risque de compliquer les choses. C�est ce que l�Alg�rie tente d�emp�cher en demandant � ce que l�on r�gle d�abord les probl�mes politiques. Au plan de la s�curit�, les arguments avanc�s consistant � dire que le Sahel va devenir un autre Afghanistan ne tiennent pas debout. Pourtant, les perspectives d�Afghanisation du Sahel semblent tellement plausibles et tellement proches. Il y a combien de terroristes et de narcotrafiquants au Sahel ? Quel est leur nombre ? �a ne d�passe pas 2 000 � 3 000. Ils sont forts maintenant parce qu�ils ont le pouvoir des armes sur une population d�sarm�e du Nord. De plus, cette population conna�t la famine et est priv�e de libert�. Et l�impact sur notre pays ? Le d�bordement �ventuel de la guerre sur notre pays ne peut arriver. Nous avons des fronti�res bien contr�l�es, bien ma�tris�es. Le terrorisme n�entre pas chez nous par les fronti�res. Des moyens suffisants sont mis en place pour emp�cher toute vell�it� de rentrer. Et pourtant, il y a eu des tentatives d�incursion. Oui, des tentatives avort�es. Quelle est votre r�action � la reconnaissance par Fran�ois Hollande de la r�pression des manifestations d�Alg�riens le 17 Octobre 1961 � Paris ? Cette reconnaissance va-t-elle, selon vous, permettre de tourner une page ou alors est-ce une simple �tape qui devra en amener d�autres et lesquelles ? D�abord, la reconnaissance des crimes commis � Paris par les autorit�s polici�res fran�aises est un probl�me interne, fran�ais. Si le pr�sident fran�ais y a fait allusion, c�est en quelque sorte pour laver la conscience de l�Etat fran�ais des crimes qu�il a commis sur son territoire. C�est donc un peu pour exorciser le d�mon interne fran�ais. Ce n�est pas� Excusez-moi, Monsieur le Ministre, mais si c�est un probl�me franco-fran�ais pourquoi, chez nous, des organisations mais aussi un membre du gouvernement demandent � ce que la France aille plus loin dans la reconnaissance et/ou, en en se repentant ou en pr�sentant des excuses ? La guerre d�Alg�rie est une chose et ce qui c�est pass� sur le territoire fran�ais n�est pas autre chose mais doit �tre examin� sous un angle diff�rent. Il s�agit d�autorit�s l�gales fran�aises qui ont commis un crime qui a �t� occult� jusque-l�, dont on a minimis� les bilans, minimis� l�action criminelle de la police. Aujourd�hui, cela se dit en plein jour, et c�est tant mieux. C�est � mettre � l�honneur du pr�sident Hollande qui, comme je l�ai dit tout � l�heure, tient d�abord � sauver l�honneur de la France dans ce cas pr�cis. Maintenant, la guerre d�Alg�rie, c�est autre chose. La France est entr�e par la force dans notre pays, s�y est d�ploy�e par la force et s�y est maintenue par la force sur toute la p�riode d�occupation, de 1830 jusqu�� 1962. Partant, c�est de l�action criminelle du colonialisme qu�il s�agit et qui non seulement d�truit les soci�t�s, avilit les personnes et s�accapare de leurs richesses. Il se trouve que durant la p�riode 1954- 1962, les choses sont all�es tr�s loin avec des massacres collectifs, de la torture, du g�nocide. Tout cela, l�Etat fran�ais l�a fait et l�a couvert. Le g�n�ral de Gaulle a essay� de faire comprendre que l�arm�e fran�aise en Alg�rie ob�issait � ses propres instincts, � ses propres automatismes mais cela n�exclut pas que la responsabilit� de l�Etat fran�ais soit totale. Maintenant se repentir, cela veut dire quoi ? Demander des excuses, cela veut dire quoi aussi ? Moi, sinc�rement, je pense qu�il faut d�passer tout cela. Moi, je n�exprime pas une position officielle mais ma position personnelle sur ce sujet. Je consid�re que ces choses-l� sont d�pass�es. La parenth�se est ferm�e. Comme on l�a toujours dit. Il faut tourner la page mais sans oublier le pass�. Car les souffrances, les sacrifices nous les avons consentis pour lib�rer le pays. Nous avons obtenu ce r�sultat, �a fait maintenant partie de l�Histoire. Aujourd�hui, il faut envisager l�avenir et je pense que ce n�est pas en ressassant perp�tuellement les m�mes demandes, les m�mes exigences que l�on fera avancer les choses. La visite qu�a effectu�e r�cemment � Alger Manuel Valls, votre homologue fran�ais, devait pr�parer et baliser avec les autorit�s alg�riennes la visite d�Etat que doit effectuer Fran�ois Hollande dans notre pays. Entre les deux pays, des points tr�s sensibles non encore r�gl�s subsistent. Parmi ces questions, l�accord bilat�ral de 1968 n�est pas des moindres. A quelles conclusions est-on arriv� sur ce dossier ? C�est une question qui ne concerne pas uniquement le d�partement de l�int�rieur. Tout ce qui touche les relations consulaires, les probl�mes de circulation et d��tablissement des personnes est essentiellement du ressort du minist�re des Affaires �trang�res, en relation naturellement avec l�int�rieur. Pour ce qui me concerne, j�ai re�u M. Valls dans un entretien qui n�a pas exc�d� une heure. Nous avons beaucoup plus centr� nos �changes sur la coop�ration s�curitaire, la formation, l��change d�exp�riences. Sur ces aspects, mon homologue a promis de faire acc�l�rer beaucoup d�accords qui ont �t� pass�s entre les deux parties, notamment au plan de l�assistance et de la formation. Toutefois, comme il �tait charg� d�une mission de pr�paration de la visite de M. Hollande, il lui a �t� clairement exprim� � et c�est l� la conclusion de tous les entretiens semi-officiels ou officieux � entre les deux d�l�gations depuis quelque temps, qu�il n�est pas question de revenir sur l�accord bilat�ral de 1968. Il faut savoir que c�est un accord qui a pris le relais des accords d�Evian qui n�ont pas �t� appliqu�s comme il se devait du fait du d�part massif de la minorit� fran�aise. Maintenant, ce que les Alg�riens ont obtenu en 1968 comme avantages li�s � la circulation et l��tablissement en France est le fait d�une situation historiquement connue. Les Alg�riens ont particip� aux c�t�s de la France au cours des deux Guerres mondiales en versant leur sang dans ces guerres, aux c�t�s des Fran�ais. Ils ont contribu� � la construction et au d�veloppement d�un pays qui �tait pratiquement par terre apr�s la guerre. Leur pr�sence est historiquement fond�e. Ils ont donc des droits que ne peuvent pas remettre en cause les accords de Schengen du fait de leur ant�riorit� et de leur sp�cificit�. Aussi, nous avons toujours dit que l�on ne discute pas de ce fait. La partie fran�aise propose aujourd�hui des avenants � cet accord mais qui vont dans le sens du confortement de cet accord et non de sa remise en cause. Jusque-l�, ce n��tait pas ce que souhaitait la France qui voulait introduire des avenants pour aligner les ressortissants alg�riens sur le droit commun. Oui, avant, mais plus maintenant. Non seulement il n�y a plus de vell�it� de remettre en cause l�accord de 68, mais mieux encore, la partie fran�aise a la volont� de conforter et dynamiser cet accord en faveur des Alg�riens. A l�issue de sa visite en Alg�rie, Valls a soulign� �la convergence de vues sur la lutte contre le terrorisme� et relev� la tr�s bonne coop�ration entre vos deux d�partements, notamment sur les aspects formation. Pourriez-vous nous pr�ciser ces points ? Pour ce qui concerne la coop�ration dans le domaine s�curitaire, il y a des progr�s immenses qui sont faits. Aujourd�hui, nous envoyons nos cadres s�curitaires qui sont plac�s au sein m�me des structures fran�aises, pour qu�ils s�impr�gnent du fonctionnement et nous recevons bon nombre de leurs cadres pour certaines affaires. Quel type d�affaires, par exemple ? Des affaires Interpol par exemple sur lesquelles nos �l�ments travaillent avec leurs coll�gues en toute transparence et dans un parfait esprit de collaboration. Maintenant, nous voulons passer � une deuxi�me phase qui consiste en la formation des cadres administratifs et en l�assistance en direction de l�Ecole nationale d�administration et en direction de la formation administrative territoriale. Cette formation se fera essentiellement sur les m�tiers nouveaux de la ville et du service public. Nous avons besoin qu�ils nous forment des formateurs parce que nous allons d�ployer une strat�gie de formation � grande �chelle pour am�liorer le rendement de l�administration territoriale. Cette coop�ration est utile. Il y a lieu de la densifier et de l�approfondir dans l�int�r�t de notre secteur.