Un jour, � Mascara, le moudjahid Ali Amrani fit une d�couverte qui l�avait profond�ment remu�. Il vit cette inscription sur le fronton d�un �tablissement public : Centre de formation professionnelle Ould- Kablia-Saliha. C��tait le nom d�une martyre de la guerre de lib�ration et qu�il avait c�toy�e au maquis. Elle �tait tomb�e au champ d�honneur, les armes � la main. En proie � une vive �motion, il se dit que pareil hommage ne pouvait suffire �� sortir l�h�ro�ne Saliha de l�anonymat dans lequel le temps l�a engloutie�, m�me si en d�autres lieux son nom avait �t� �galement honor�. Pour Ali Amrani, l�hommage �de fa�ade� doit �tre compl�t� par les t�moignages �crits, si pr�cieux, des compagnons d�armes qui l�avaient connue directement. Parce que, souligne-t-il, �la m�moire de nos h�ros, de nos martyrs surtout, devrait �tre grav�e (...) dans les c�urs. Leur histoire est notre histoire et leur mort a donn� un sens � notre combat, donc � notre vie�. Par devoir de m�moire, il a alors �crit ce livre. Un ouvrage n� en reconnaissance � l�engagement d�une jeune combattante qui avait consenti le sacrifice supr�me et, � travers son exemple, rendre aussi hommage � toutes les femmes alg�riennes qui se trouvaient � la pointe du combat arm�. Ali Amrani prend le soin d�expliquer que son t�moignage se veut une modeste contribution � apporter un n�clairage sur �une partie de la vie de Saliha dans le maquis ; une simple s�quence de son parcours de combattante�. Aussi, P�riple en zone 6 n�a d�autre pr�tention que de �retracer les faits (...), sans passion, sans parti pris�. un t�moignage sur le vif. Cela �tant pr�cis�, ladite s�quence sera br�ve, car elle n�englobe que la dur�e du p�riple. Mais ces deux mois au maquis, tels que racont�s par l�auteur, sont d�une grande valeur historique. Gr�ce � ce r�cit qui se lit d�un trait, les jeunes g�n�rations en particulier pourront en apprendre davantage sur ces h�ro�nes de la R�volution qui, � la fleur de l��ge, avaient �crit une belle page d�histoire. En cette ann�e 1958, � la mi-juillet, le jeune Ali Amrani rejoint le maquis. Il n�a que 18 ans. Celui dont le nom de guerre sera Fawzi est affect� au poste de commandement de la 1re R�gion, en zone 6. Quelques jours plus tard, dans le douar Souadkia, pr�s de Mascara, il rencontre pour la premi�re fois Saliha Ould Kablia. Il raconte : �C��tait la premi�re fois que je voyais une djoundia. Elle avait un peu plus de 20 ans, portait un treillis, pistolet 9 mm et grenade � la ceinture, mocassins aux pieds et casquette sur la t�te. J�ai �t� impressionn� par son air grave et son allure d�termin�e. Elle s�affairait sur une caisse de m�dicaments et prenait des notes sur un calepin.� Un image forte pour le jeune homme qui faisait ses premiers pas au maquis. Par la suite, il allait d�couvrir d�autres facettes de sa personnalit� et qu�il r�sume en une phrase : �Saliha, responsable de la sant�, exer�ait son r�le avec comp�tence, d�vouement et un sens aigu des valeurs humaines.� Au cours du p�rilleux p�riple qu�ils effectueront en groupe, Ali Amrani aura l�occasion d�appr�cier le sens de l�ordre et de l�organisation de la jeune combattante, sa foi et son courage, mais aussi son esprit critique et son ent�tement � d�fendre ses id�es. Etant charg�e d�une mission d�licate et responsable du groupe, Saliha se devait d�avoir de telles qualit�s. En effet, elle avait �t� �d�sign�e pour faire parvenir de toute urgence � un h�pital secret de l�ALN, tout le stock de m�dicaments et de mat�riel m�dical dont elle disposait. Cet h�pital (...) �tait situ� dans la r�gion de Sa�da dans la 2e R�gion de Sa�da de la zone 6�. Pour Ali Amrani, c��tait le bapt�me du feu. Par contre, Saliha �avait d�j� fait le circuit � plusieurs reprises�. C�est donc le r�cit de cette exp�dition que l�auteur fait dans ce petit livre. Un p�riple �prouvant, plein de dangers et ponctu� d�accrochages avec l�arm�e ennemie. C��tait un miracle que d�avoir pu �chapper aux mailles du filet. Surtout, au fil des jours apprenait � d�couvrir la forte personnalit� de Saliha Ould Kablia, cette �intellectuelle qui avait fait des �tudes sup�rieures � l�universit� d�Alger o� elle pr�parait le dipl�me de chirurgien-dentiste. Tous ceux qui l�avaient c�toy�e au maquis avaient appris quelque chose d�elle (...). L�, sur le djebel Karsout, j�appris en plus d�elle deux qualit�s : la sobri�t� et la pers�v�rance.� Avec les populations, le courant passait aussi tr�s bien, ajoute-t-il dans son t�moignage. Car, �en plus de sa fonction de m�decin, Saliha remplissait le r�le de commissaire politique�. Ses rares moments de faiblesse, c��tait sans doute lorsqu'elle pensait � ses fr�res au maquis, au �drame du plus jeune d�entre eux, tomb� au champ d�honneur trois mois auparavant�. Apr�s bien des p�rip�ties que l�auteur relate dans les chapitres du livre, le p�riple prend fin. Mission accomplie. C�est le moment de se s�parer. H�las, Saliha allait partir pour un dernier voyage. �L�une des plus illustres combattantes de la ville de Mascara � �tait tomb�e au champ d�honneur, trois jours plus tard. C��tait lors d�une embuscade o� �elle avait suivi � la lettre la loi de la gu�rilla, ne jamais faire demi-tour (...). Elle avait fonc� droit devant elle en tirant rageusement pour ouvrir son chemin. Mais l�ennemi ne lui avait laiss� aucune chance, son �lan avait �t� bris� net. Cribl�e de balles, elle tomba en v�ritable h�ro�ne�. Le lendemain de sa disparition tragique, exactement le 20 septembre 1958, �tait proclam� le GPRA (le gouvernement provisoire de la R�publique alg�rienne). Zoubida Ould Kablia (dite Saliha), n�e le 10 juillet 1934, n�avait que 24 ans. Selon Ali Amrani, �il semble reconnu et admis qu�elle fut l�unique universitaire tomb�e au champ d�honneur dans les maquis�. Ce t�moignage rigoureux, sans fioritures, parfois poignant est enrichi d�un volet iconographique (dont des photographies de la martyre). Hocine Tamou Ali Amrani, P�riple en zone 6 avec la combattante Saliha Ould Kablia, martyre de la R�volution, 118 pages.