Ils étaient nombreux ce samedi aprèsmidi à s'être rendus à l'Institut français d'Oran pour rencontrer Slim, de son vrai nom Menouar Merabtène, le bédéiste algérien, l'un des précurseurs de la bande dessinée depuis les années soixante à ce jour et qui a marqué les esprits avec ses personnages incontournables et fort sympathiques, Bouzid et Zina. L'exposition se prolongera jusqu'au 5 juillet 2013. Souvent, on ne voit du caricaturiste-bédéiste que ses planches. Rencontrer celui qui, d'un coup de crayon, ou d'encre, vous offre tant de créativité, a donné au public présent ce samedi un sentiment d'attachement tout particulier. C'est dire que l'auteur bédéiste est fort sympathique, simple et bourré d'humour subtil. Lors d'une rencontre-débat conviviale, en marge de l'expo de ses planches, Slim a tenu à exprimer sa première impression en retrouvant Oran après tant d'années. «Très heureux d'être à Oran, seulement je me rends compte qu'elle a pris un coup de vieux, comme si elle était abandonnée. » Pour le plus ancien des bédéistes algériens, son destin a suivi un chemin tout à fait hasardeux. Rien n'était vraiment tracé par avance, il a tout simplement suivi le cours de sa vie, ses évènements, ses embûches, ses opportunités. Le tout guidé par son amour du dessin qu'il a su exprimer depuis déjà tout jeune enfant à l'âge de 5, 6 ans. Une occasion pour cet artiste hors pair de conter quelques anecdotes toutes aussi drôles les unes que les autres. A l'exemple de son expérience au lycée lorsqu'il s'amusait à dessiner et inventer des histoires pour ses camarades, qui devaient lui donner 10 à 20 centimes, avec lesquels il se rendait par la suite au cinéma regarder, dit-il, de vraies histoires de cinéma afin de les raconter à sa manière le lendemain à ses camarades. Puis, à l'indépendance, il connut une période, dit-il, flottante où il a dû quitter le lycée. Puis, vint son expérience vécue à l'Institut d'Alger où il apprit les techniques de l'image, ce qui lui a permis d'obtenir une bourse en dessin en Pologne. De retour, il est face à une réalité amère : l'Algérie n'est pas un pays du «dessin animé». Sa première chance de laisser exprimer son génie lui a été donnée en 1969 par le rédacteur en chef du journal El Moudjahid, qui lui proposa de publier ses BD sur le journal. C'est ainsi qu'il a pu faire «vivre» ses personnages Bouzid, Zina et Mimouna. Avec le temps, l'inspiration et les rencontres aussi riches qu'attachantes pour l'auteur, ses BD ont été enrichies. La censure, Slim l'a également connue, lorsque ses dessins étaient jugés trop proches de la réalité politique de l'époque. A l'exemple de la BD où il évoquait le manque d'eau sauf dans la piscine d'un homme, en l'occurrence le président de l'époque Chadli Bendjedid et qu'il fallait importer des nuages et qu'à leur arrivée l'on découvre qu'il en manquait deux... Autant d'anecdotes drôles et touchantes à la fois, qui ont ravi l'assistance qui en redemandait. Sollicité pour donner son avis sur les bédéistes et caricaturistes actuels, Slim dira que «chaque génération a ses atouts et ses chances. Les jeunes d'aujourd'hui ne mesurent pas la chance qu'ils ont et leur bonheur avec internet et ce qu'il leur offre comme informations, services... et les nouvelles technologies comme le Photoshop avec lequel on réalise des merveilles». D'ailleurs, parmi les projets récents de Slim, figure la réalisation d'une BD avec le recours à ce procédé du Photoshop puisque l'on saura que c'est un féru des nouvelles technologies. La caricature est toutefois, selon Slim, dangereuse pour certains régimes, «une caricature peut te déglinguer un régime. Rappelez-vous d' El Minchar, aujourd'hui si tu réalises ce que faisait El Minchar tu auras 20 procès par jour !», dit-il. Slim devait également retrouver son public le dimanche 23 juin, à Sidi Bel-Abbès, à la Bibliothèque Paroles et Ecriture de l'association du même nom. Le lendemain, lundi, il devrait animer une rencontre similaire à Mascara sur invitation de l'Association Emir-Abdelkader. Pour tout ceux qui n'auront pas l'occasion de rencontrer Slim, ils peuvent toujours le retrouver en page deux du Soir d'Algérie avec une planche hebdomadaire intitulée : «Tout va bien» qui paraît chaque jeudi.