Par Hassane Zerrouky Le scénario libyen – se lancer à la conquête de Damas à partir de Homs ou d'Alep – ayant échoué, place au bon vieux scénario irakien pour abattre le régime de Bachar al-Assad ! Le régime syrien qui dispose d'armes de destruction massive les aurait utilisées contre ses adversaires causant la mort de centaines de civils : 1 450 personnes gazées dont 400 enfants selon Washington, 281 morts selon les informations des services de renseignement français rendues publiques lundi par Paris. Or les preuves à charge avancées par les Français se fondent sur des présomptions, constituées pour l'essentiel, pour ne pas dire principalement, de vidéos, de témoignages fournis par des médecins syriens, des combattants islamistes et des civils militants ou sympathisants de l'opposition syrienne, donc des «preuves» provenant d'une source unique. Bien que le régime de Bachar al-Assad ne soit pas celui d'un enfant de chœur – il a torturé, emprisonné ses opposants, tiré sur les manifestants qui exigeaient alors des élections libres – les «révélations» des services américains et français sur une supposée attaque chimique par Damas justifient-elles une intervention militaire massive en dehors de l'ONU, en violant les lois internationales ? Et si cette intervention militaire a lieu, afin de «punir» ce régime selon les propos du «soldat» Hollande, la vraie question à laquelle évitent de répondre les va-t-en-guerre socialistes français et leurs semblables américains, est celle-ci : que se passera-t-il après ? Qui sera en dernière analyse le vainqueur ? Certainement pas la paix et la démocratie. Souvenons-nous. En 2002, les Etats-Unis et leurs alliés n'ont-ils pas invoqué «la guerre contre le terrorisme» pour justifier leur intervention militaire en Afghanistan, chasser les talibans, instaurer la démocratie et «libérer» la femme afghane ? Onze ans après, les talibans sont toujours là, ils se sont renforcés, tandis que les Américains s'apprêtent à quitter piteusement, sans gloire, l'Afghanistan. En mars 2003, prétextant que l'Irak disposait d'armes de destruction massive, les Etats-Unis l'envahissaient, promettant d'instaurer la démocratie et d'aider à la reconstruction du pays. Six ans plus tard, après une guerre destructrice ayant fait plus d'un million de morts, soit plus que la répression de Saddam, l'armée US quitte le pays avec armes et bagages, laissant l'Irak exsangue, en proie au terrorisme, et au bord de l'implosion ethnico-confessionnelle ! Dernier exemple, la Libye ! Cette fois-ci, c'est la France qui était aux manettes avec le soutien logistique des Etats-Unis et de l'Otan. Le régime de Kadhafi est tombé. La démocratie promise ? Walou ! La Libye, totalement déstabilisée, otage de milices rivales, a fini par être un arsenal à ciel ouvert pour les djihadistes, un sanctuaire de l'Aqmi et une menace pour ses voisins maghrébins ! Alors trêve d'hypocrisie, derrière ces beaux discours sur la démocratie et les droits de l'Homme destinés à une opinion publique occidentale matraquée et abusée par des médias en service commandé, se cachent de sordides intérêts de puissance. Car après la Syrie, à qui le tour ? Si réellement, Washington et ses alliés, qui disposent de moyens de pressions économiques et financières considérables, étaient animés par de si belles intentions (démocratie, droits de l'Homme et progrès social), ils pouvaient, en s'appuyant de surcroît sur les opinions publiques arabes, maghrébines et autres, avec le soutien de la Russie (elle n'était pas contre) faire plier le régime syrien au lieu de recourir à la force. Bien au contraire, privilégiant une issue militaire au lieu d'une solution basée sur un compromis acceptable par les deux parties, ils ont fermé les yeux sur la réalité du terrain où, contrairement à ce que rapportent les médias occidentaux, principalement français, ce sont les djihadistes du Front al-Nosra et de l'Etat islamique de l'Irak et du Levant (EIIL) aidés par le groupe Dar al-islam (coalition de milices salafistes) dirigé par Zahrane Allouche financé par l'Arabie saoudite, qui contrôlent la quasi-totalité des zones dites «libérées». Ces groupes, forts de leurs 25 000 combattants, se trouvent dans la périphérie de Damas. Ils n'attendent plus que l'intervention occidentale pour conquérir la capitale syrienne. Or, à la veille de la conférence de Genève II, et depuis la reprise de la ville de Homs le 30 juillet dernier par les forces de Bachar, ces groupes de djihadistes étaient en sérieuse difficulté : ils battaient en retraite. Washington et Paris le savaient !