Par Ahmed Halli [email protected] Les Américains sont très pointilleux sur la question des libertés religieuses, et c'est au nom de cette liberté qu'ils autorisent les sectes et les groupes les plus extrémistes, quitte à le regretter par la suite. Mais il y a un point sur lequel il n'y a ni regrets, ni repentance, et encore moins révision, c'est le soutien à Israël, et ceci est encore plus vrai que jamais sous Obama. Celui-là, il passera sans doute à l'Histoire comme le pire président américain à qui les Arabes auront eu à faire. En quelques années, ces pauvres Arabes sont passés de «l'Obamania» à l'Obamaphobie, qui n'a rien à voir avec l'islamophobie, puisque les Obamaphobes sont en majorité musulmans, même s'ils se font peur, entre eux et à longueur d'année. Pour trancher, si l'expression est de mise, disons que les Arabes sont partagés entre la peur et la détestation, le premier sentiment étant partagé, presque à égalité par les monarchies du Golfe. Ceux qui n'ont pas peur de perdre quelque chose, c'est-à-dire l'immense majorité, ont en commun une immense aversion pour Obama, et pour ses reniements, en particulier envers Luther King. Comme il y a loin de la coupe aux lèvres, et comme le discours du Caire ressemble de façon étrange, et avec le temps, à la déclaration Balfour, livrant la Palestine aux meilleurs amis actuels d'Obama ! Pour illustrer notre propos, il n'est pas besoin d'aller bien loin, ni de fouiller dans les archives de WikiLeaks, ou de se munir d'un décodeur, Obama, nous en parle tout le temps, par le biais de son stentor, John Kerry. Celui-là ne se donne pas la peine de jouer les Janus, il pratique la diplomatie, mais avec un tact et un doigté, à ongles limés qui fait le bonheur des Israéliens. Oh, avec les Arabes aussi, il fait montre de délicatesse et d'onctuosité : au moment de la reprise des négociations palestino-israéliennes, les Israéliens annoncent la création de nouvelles colonies. Ce n'est que votre «jument grise» qui est perdue, dit-il aux Palestiniens sur l'air de «tout va très bien Madame la Marquise !», ne nous énervons pas, gardons notre calme ! Surtout, ne pas remettre en cause les pourparlers bilatéraux et risquer une nouvelle Intifadha à laquelle appellent de toutes leurs forces, le gouvernement israélien, avec la colonisation intensive, et les organisations palestiniennes, que la répression fait revivre. Et comme la plaie arabe est à vif, John Kerry change de tactique : on va voir jusqu'où ils savent et peuvent souffrir ! On sait que la communauté européenne, excédée par l'arrogance et l'obstination israéliennes, a décidé de sanctionner les associations et organisations israéliennes impliquées dans la poursuite de la colonisation. Non content de soutenir en sous-main la création intensive de colonies de peuplement en Cisjordanie et à Al-Qods, John Kerry a demandé à la communauté européenne de «patienter», et donc de surseoir à l'application de ces sanctions. En revanche, le Secrétaire d'Etat américain se montre impatient, s'agissant de hâter l'intervention militaire en Syrie. Rien n'est moins sûr, toutefois, puisqu'il est question d'un accord de dernière minute qui serait en voie de finalisation et qui pourrait sauver la face à tout le monde, sauf à François Hollande. Le président français qui a poussé à la guerre, sans être suivi, pourrait bien avoir un nouveau problème sur les bras : la rébellion syrienne, qu'il soutient, s'est emparée dimanche de la ville chrétienne de Maaloula, au nord de Damas. La nouvelle a fait la une de tous les médias, et surtout en France. Alors, on se pose naïvement la question de savoir si les rebelles, intégristes en majorité, vont avoir quelques égards envers la «fille aînée» de l'Eglise et ménager les chrétiens de Maaloula, répertoriés comme soutiens au régime de Béchar. Il faut se souvenir que dans des cas similaires, la «rébellion» s'est empressée de remettre des prisonniers kurdes aux sanguinaires miliciens de la Nosra. Ces derniers exécutent sommairement les prisonniers et en particulier les soldats kurdes de l'armée régulière syrienne qui tombent entre leurs mains. Les Kurdes, c'est connu, ne sont pas des Arabes à part entière, et les chrétiens sont juste en dessous. Seulement, la coalition qui appuie les insurgés islamistes comprend des pays chrétiens, en plus des pays musulmans comme la Turquie et le Qatar, qui n'aiment pas tellement les chrétiens. Difficile de se retrouver dans ce conflit syrien, et la difficulté est plus grande encore pour les pays impliqués qui ne savent plus si c'est en conscience ou en toute âme qu'il faut voir amis et ennemis. Encore plus délicate est l'attitude de ces Saoudiens, en principe alignés sur le Qatar dans le cas de la Syrie, mais à l'opposé s'agissant de l'Egypte. Le régime wahhabite qui a longtemps couvé les Frères musulmans arabes, commence à les craindre et s'inquiète encore plus de l'influence et du contrôle qu'exerce le Qatar sur eux. Cruel paradoxe, mais cruel en apparence seulement : le Qatar peut soutenir les partisans de Morsi, et l'Arabie saoudite avoir des préférences pour Sissi, ça ne va jamais loin. N'oublions pas qu'ils sont partenaires au sein du Conseil de coopération du Golfe, avec un pacte de défense notamment, qui regroupe les monarchies pétrolières, et ambitionne d'intégrer d'autres royaumes, comme le Maroc. Des liens, comme ceux-là, résistent à toutes les guerres locales, et par-dessus tout, il y a le nœud gordien de l'alliance avec les Etats-Unis. Et ce nœud-là ne peut être tranché, en dépit de tout ce qu'on a pu dire ou faire.