En une semaine, Abdelaziz Bouteflika a renversé la situation à son avantage et bouleversé la scène politique nationale. «Je vous informe que je vais me représenter et vous ordonne de commencer à préparer le terrain.» C'est ce qu'a clairement signifié Bouteflika, il y a une semaine, à ses proches collaborateurs, Abdelmalek Sellal et Ahmed Gaïd Salah et que nous tenons de source sûre. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) C'est à partir du 3 septembre que Bouteflika commençait d'ailleurs à recevoir presque quotidiennement ces deux responsables et c'est au cours de ces rencontres que tout s'était décidé. Et c'est parce qu'une partie de l'armée, son noyau dur en fait, s'est clairement prononcée pour la perspective d'un quatrième mandant, que les choses ont pris une accélération brutale et inattendue. Il fait jouer Gaïd Salah contre ses adversaires et, rapidement, opère d'importants changements à l'intérieur même de l'armée qui feront du chef d'étatmajor le seul patron. «Le Président a agi vite et fort pour s'épargner toute mauvaise surprise en cours de route. A sept mois des présidentielles, il fallait tout reprendre en main», nous confie-t-on dans l'entourage immédiat de Abdelaziz Bouteflika. Même si cela n'est pas encore de notoriété publique, la candidature de Bouteflika pour sa propre succession ne fait plus aucun doute. «Des consignes claires ont été même données pour préparer le lancement d'une campagne électorale sur le terrain», nous confie-t-on encore. Bouteflika l'a, lui, entamée déjà à sa manière. Mercredi dernier, à l'occasion du remaniement du gouvernement, il plaça des hommes à lui, des proches et fidèles aux secteurs-clés qui font les élections : Tayeb Belaïz à l'Intérieur, Tayeb Louh à la Justice et Abdelkader Messahel à la Communication. «Ce n'est que le début !» commente encore notre source. Dans les tout prochains jours, en effet, Bouteflika opérera de vastes autres changements et à tous les niveaux : les walis, les ambassadeurs, les magistrats, les médias publics, mais aussi et surtout, l'armée. Notre source n'écarte pas, d'ailleurs, la nomination d'un nouveau chef d'étatmajor de l'ANP. «C'est l'actuel directeur général de la DGSN, le général major Abdelghani Hamel qui est fortement pressenti à ce poste», nous révèle même notre source. Jamais, depuis son accession au pouvoir suprême, le 15 avril 1999, Abdelaziz Bouteflika n'est allé aussi loin : un véritable passage en force «inauguré» avec l'affaire du FLN et de Amar Saïdani et qui n'épargne pas l'ANP et les services de sécurité. C'est une «descente» d'une véritable bête blessée qui sera fatale y compris à des «proches» comme Amar Tou et Rachid Harraoubia soupçonnés d'avoir «trahi» pendant le long séjour parisien de Bouteflika. Gravement malade et fortement diminué sur le plan physique, Bouteflika sait parfaitement que seule une position dominante au sein du pouvoir peut le sauver. L'homme, qui ne s'est jamais imaginé en dehors du pouvoir, y compris pour cause de maladie, ne reculera devant rien pour rempiler en 2014. D'ores et déjà, consigne est également donnée pour le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, pour préparer, «le plus tôt possible», la révision de la Constitution, apprenons-nous encore de même source. Cette révision, qui se fera à travers la convocation des deux Chambres du Parlement, prévoit deux choses essentielles : un poste de vice-président désigné, doté de larges prérogatives, notamment, celle de poursuivre le mandat présidentiel en cas d'empêchement pour une raison quelconque du Président. «Ce sera Abdelmalek Sellal, le vice-président, à partir de 2014 bien entendu.» Autrement dit, on aura la même configuration, en vigueur depuis le 27 avril 2013, notamment avec un Président «présent mais effacé» et un Sellal qui gère tout au quotidien. Tout cela, pour le seul et unique objectif de mourir président de la République et non pas comme ex-Président.