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CARNET DE CAMPAGNE
Qu'est-ce qui fait courir Louisa Hanoune ?
Publié dans Le Soir d'Algérie le 27 - 03 - 2014


Par Badr'Eddine Mili
Le fabuleux destin d'Amélie Poulain ! serait-on tenté d'écrire à propos de Louisa Hanoune, cette enfant terrible de Chekfa sur le berceau de laquelle la fée «Politique» s'est penchée, à sa naissance, avec une prodigalité à faire pâlir d'envie les politiciens les plus doués activant sur la scène algérienne. C'est qu'il y a de quoi !
Partie de quasiment rien, cette femme atypique, qui impressionne par sa fougue et son franc-parler, s'est retrouvée, contre toute attente, certes, après un long chemin de croix, juchée sur une sorte de piédestal d'où elle domine, d'une tête, le monde de brutes de la politique nationale. Et comme si de rien n'était, elle exhibe sur son tableau de chasse, avec une fierté non dissimulée, le résultat de trente années de militantisme : un parti parmi les mieux structurés, une représentation parlementaire non négligeable et trois participations à une élection présidentielle. Un précédent plus que singulier pour une politicienne d'un pays arabe. Trop beau pour être vrai, selon ses adversaires qui doutent du caractère naturel de son ascension et qui lui contestent la normalité de ces acquis. Ils y voient la main du pouvoir qui lui aurait donné un sérieux coup de pouce depuis qu'il s'est employé, à la faveur de l'ouverture de 1989, à créer de toutes pièces une classe politique virtuelle parée des vertus de la démocratie représentative.
Ils n'en veulent pour preuve que ses entrées chez «les grands» et son ostensible engagement aux côtés du Président de la République dont elle s'échine, avec une application peu orthodoxe, en toutes circonstances et à tout prix, à répercuter les messages et à protéger l'image contre toute éclaboussure. Jusqu'à ce qu'il se soit tu.
Un moment de grande solitude, pour elle, qui la poussa à l'exhorter à parler pour savoir dans quel sens le vent était en train de tourner au pic de la guerre de succession, qui avait failli faire imploser le régime. Qu'à cela ne tienne ! réplique-t-elle, avec un aplomb indémontable. Elle fait feu de tout bois pour démentir ce qu'elle considère comme des assertions infondées, en rappelant ses nombreuses années de militantisme pour la promotion des droits des femmes et des libertés syndicales au service desquelles elle a mis une impétuosité et un volontarisme peu communs.
D'un tempérament intempestif, les veines du cou sur le point de rompre lorsqu'elle discourt d'une voix de stentor, elle apparaît, effectivement, comme le pur concentré de la passion en politique. Un trait de caractère qui la fait comparer à Dolorès Ibaruri, la dirigeante internationaliste espagnole des années 30 ou à Arlette Laguiller, l'égérie de l'extrême gauche française, qu'elle semble avoir pris pour modèle avec sa mise prolétaire dépouillée de tout le falbala dont se pare, en général, une femme et la sobriété de son vocabulaire estampillé du fameux «travailleuses ! travailleurs !».
Pour être plus juste et plus proche de la vérité, il faut convenir qu'elle n'a pas été lancée sur le marché comme une vulgaire marque de lessive et que ses débuts en politique furent éprouvants. Desservie par un départ laborieux marqué au fer rouge du péché originel du trotskysme, l'idéologie de l'OST, sa première formation. Un péché qu'elle traîna longtemps comme une sangsue mortifère. Elle se débattit, avec un tel cran, brisa tant de tabous et d'ostracismes, sabrant, à droite comme à gauche, des mastodontes réputés indétrônables, qu'elle finit par se forger un style, sa marque déposée. Mieux, elle s'imposa comme un des baromètres du climat politique du triple quinquennat de Abdelaziz Bouteflika, inspirant même de la crainte à quiconque se serait avisé de vouloir croiser le fer avec elle ou de se frotter à sa cuirasse, apparemment, blindée. Un pied au pouvoir qu'elle ne s'empresse pas de rejoindre dans la clarté du jour et un autre dans l'opposition, un équilibrisme de funambule qui rappelle le PAGS des années Boumediène. Elle joue avec beaucoup d'habileté de cette contradiction et offre d'elle, tantôt l'image d'une oie du Capitole alertant contre l'imminence d'une invasion étrangère, tantôt celle d'une vigie perchée sur le plus haut mât du bateau «Algérie», guettant récifs et icebergs, mettant en garde contre de réels ou supposés dangers couvés par les tempêtes de la haute mer.
Ce rôle d'ombudsman, à mi-chemin entre le libre-arbitre et la complicité, qui lui fait éviter de se mouiller dans la gestion directe des affaires publiques en critiquant les mauvaises décisions tout en supportant les bonnes, sans rien perdre au change, lui permet de cumuler les bons côtés de l'entrisme en s'épargnant les mauvais.
Il n'est pas commode pour un dirigeant politique de se comporter de la sorte, de soutenir une chose et son contraire sans sourciller, s'il ne dispose pas d'un volant à géométrie variable qui l'aiderait à ne pas perdre le cap choisi et à maintenir intact son capital-crédit aussi bien du côté des gouvernants que de celui des opposants.
Par quelle autre baguette, que celle mythique des origines, a-t elle accompli ce tour de force et conquis cette stature de Janus qui rit le matin et qui pleure le soir. Exécrée par les uns, adulée par les autres ? Il faut s'être inoculé une sacrée dose d'opportunisme et de culot pour apposer sa signature au bas du pacte de Sant'Egidio, à la phase la plus critique du terrorisme intégriste, à côté de celle d'Anouar Haddam qui lui donne, aujourd'hui sur l'écran d'El-Magharibia TV du «Madame Hanoune» et vingt ans plus tard, se faire recevoir en exclusivité par le chef d'état-major de l'ANP, vice-ministre de la Défense en confidente chargée de communiquer sur le Président, sur la démocratie vue côté jardin et sur les conditions de préparation et de tenue de l'élection présidentielle.
La même observation est mise en avant par ses contradicteurs au sujet de la politique du gouvernement qu'elle voue aux gémonies, alors qu'elle exclut de ses critiques le Président de la République, principal inspirateur de cette politique en tant que véritable chef de l'Exécutif, surtout depuis la révision constitutionnelle qui mit fin au bicéphalisme gouvernemental. L'ambivalence de ce type de positionnement s'est manifestée dans les mêmes formes lors des grèves menées dans le secteur public par les syndicats autonomes, qu'elle condamna avec une fermeté qui jure avec la nature et les objectifs d'un parti supposé représenter et défendre la classe ouvrière. Existe-t-il dans le guide de la politique pratiquée, selon les canons algériens, une ou des explications valables qui lèveraient le voile sur l'ambiguïté du rôle et de la place que Louisa Hanoune joue et occupe sur l'échiquier politique et qui lui causent parfois du tort, brouillant de façon préjudiciable son image et son crédit ? Pour qui connaît les labyrinthes de l'activisme de gauche, les explications qui paraissent les plus plausibles tiennent à deux ou trois considérants notables :
1- dans des moments de désarroi qui en ont désorienté plus d'un, en particulier lors des scissions qui ont affaibli le mouvement ouvrier algérien et ses représentations partisanes, Louisa Hanoune a su trouver les bons arguments pour convaincre, récupérer et fédérer, au sein du PT, les anciens militants du «soutien critique» issus des rangs de l'ex-PAGS, d'Ettahadi et du MDS.
A l'exclusion des orthodoxes qui ne lui pardonnent pas ses amitiés lambertistes qu'elle a du reste recouverts, depuis quelques années, d'un voile discret, sinon pudique. Beaucoup de transfuges des partis de gauche se sont joints à elle pour s'assurer une survie politique.
Avec l'aide de l'UGTA, elle est parvenue à constituer un pôle qui a investi et exploité très adroitement, il faut le reconnaître, les survivances des gisements sociopolitiques de base anticapitalistes et anti-impérialistes, suffisamment entreprenants pour être écoutés. Dans l'esprit de l'alter-mondialisme dont elle est une fervente militante, la secrétaire générale du PT les engagea dans des actions de sauvegarde du secteur économique d'Etat contre les multinationales, dans le même temps elle les mobilisa contre les interventions des puissances occidentales destinées à déstabiliser les Etats nationaux arabes et à faire reculer les luttes des peuples, comme le peuple palestinien, pour leur libération ;
2 - la formation idéologique et politique qu'elle reçut en héritage, lui fut d'un grand secours dans sa carrière mouvementée. Le parti qu'elle créa, avec son aîné Benmohamed, ne fut pas configuré pour être un parti intermittent. Il fut organisé et enraciné, selon les standards organiques des partis de l'ex-Europe socialiste, de sorte qu'il pérennise la doctrine et l'action de ce qu'il est censé représenter, l'exact contraire des partis-éprouvettes qui virent le jour dans les années 1990-2000 ;
3 - forte de sa fonction de porte-parole, Louisa Hanoune parvint à entretenir la permanence de la présence de son parti, sur le terrain des opérations, grâce à un travail de communication soutenu. Les conférences de presse qu'elle convoque presque hebdomadairement, et qui portent son sceau, sont devenues, à la longue, une tribune de veille et d'alerte assidûment suivie et même attendue par l'opinion ;
4 - dans une société politique à dominance machiste, l'un des challenges qu'elle a remporté, et non des moindres, fut de combler, avec plus ou moins de bonheur, le déficit de leadership criard sur la scène partisane algérienne, en faisant admettre comme une chose allant de soi qu'une femme peut fonder et diriger, pendant plus de 20 ans, un parti sans qu'on y trouve à redire. Que l'on ne s'y trompe, cependant pas, sa relative popularité, elle l'a doit beaucoup plus à ses prises de position savamment médiatisées, qu'à son alarmisme qui frise, des fois, la fantasmagorie. Ses plus belles prises politiques furent sans conteste sa contribution à l'abrogation de la loi sur les hydrocarbures, à l'éviction du trio Benachenhou-Temmar-Chekib, à la dénonciation des privatisations scandaleuses, au retour au 51/49, à la renationalisation d'ArcelorMittal, au rétablissement de la consommation nationale, à la parité hommes-femmes au Parlement, au règlement des lois de Finances, etc.
A son passif, de grands flops : son silence gêné sur la dernière crise qui a secoué le sommet de l'Etat, ses valses hésitations sur l'élection d'une Constituante et sur la période de transition, propositions sur lesquelles elle est revenue, son absence de réaction à l'autorisation de survol de l'espace aérien algérien par la chasse française en route vers le Mali, son attitude complaisante vis-à-vis du patronat privé qui interdit la syndicalisation de ses travailleurs, la transgression des règles éthiques présidant à l'actuelle campagne électorale, avec la mise en cause sélective de certains de ses concurrents comme Ali Benflis et Abdelaziz Belaïd, etc.
Au final, si on veut saisir le fin fond de sa personnalité réelle et de ses ambitions secrètes, on ne trouve rien qui puisse renseigner au plus près sur les mobiles qui la font courir depuis si longtemps et encore plus maintenant.
Elle s'affiche femme de tête, mais se refuse à être une femme de gouvernement. Elle a la possibilité de faire agir son parti en tant que tel, mais elle se suffit qu'il soit un simple lobby ou un wagon derrière la locomotive du FFS, sa veritable couverture. Elle est en mesure, à ce stade de sa carrière, de plaider sa propre cause, elle préfère se commettre avocat du diable.
La contradiction est sa seconde nature. Au lieu d'en user comme d'une tactique, elle en a fait sa stratégie. Alors qu'est-ce qui fait courir Louisa Hanoune ? La question est loin d'être élucidée. Son agenda ne comportant plus ni révolution prolétarienne ni construction d'un Etat socialiste dont elle a déclaré, par réalisme, qu'il n'était plus à l'ordre du jour de son parti et ne pouvant plus, idéologiquement, se situer dans la trajectoire d'une Rosa Luxembourg, d'une Clara Zetkin ou d'une Kroupskaia — les temps du romantisme révolutionnaire étant passés de mode — se contentera-t-elle d'être la prochaine présidente du Sénat, la consécration, d'après les réformes constitutionnelles annoncées par la dernière lettre du président-candidat, qui fera d'elle la première femme arabe à diriger une telle institution, rejoignant, en Amérique latine, la fille d'Allende élue à ce poste après la victoire de la social-démocrate chilienne, Bachelet ? Attendons après le 17 avril pour être fixé.


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