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L'entretien de la semaine
Sabah M'RAKACH, Psychologue Clinicienne, Directrice Générale de SAB Solutions au soirmagazine : «Le silence des symptômes d'autisme n'est pas toujours une garantie de bonne évolution»
Publié dans Le Soir d'Algérie le 19 - 10 - 2013

Sabah M'rakach, psychologue clinicienne, fait la lumière sur cette maladie très particulière, encore méconnue, et surtout difficile à détecter par les parents d'autistes qui ont du mal à l'admettre.
Soirmagazine : Qu'est-ce que l'autisme ?
Sabah M'rakach : Pour répondre à cette question, je vous cite des exemples. Djalil a 9 mois, c'est un bel enfant, plein de santé apparemment est adressé par son pédiatre. Sa mère le décrit comme étant hypertonique et fatigant dans le bain, quand il se dérobe au contact comme s'il «glissait littéralement entre les doigts». Les repas sont source de soucis quotidiens bien que l'état pondéral n'inspire pas d'inquiétude. Les difficultés relationnelles sont passées inaperçues au vu des critères habituels de croissance et ont été mises au compte de particularités précoces de caractère.
Asma, 3 ans et 4 mois, sa consultation est recommandée par la directrice de l'école (préscolaire) en raison de l'absence de langage et des conduites d'isolement. Le moment de séparation d'avec sa mère est, chaque matin, dramatique. Elle pleure, s'accroche aux grilles ou aux vêtements et une fois dans la classe, ne pleure plus et paraît absente. A la maison, elle refuse l'usage des toilettes et peut passer de longues heures dans son lit sans dormir. Elle ne joue pas avec sa grande sœur, et le moindre refus est source de crises interminables lors desquelles elle hurle en se roulant par terre, jusqu'à ce que l'entourage cède.
Voici deux exemples distincts qui permettent d'avoir un aperçu de l'autisme. L'histoire de l'autisme infantile débute, en effet, véritablement en 1943 par l'article de Kanner Autistic distrubances of affective contact. On y met surtout un accord entre autisme et indifférence, retrait et désintérêt du monde extérieur. Il s'agit d'une psychose, une maladie mentale grave qui était traitée comme d'autres troubles psychotiques de l'enfant, mais ce qu'on sait aujourd'hui, c'est que l'autisme est inné, c'est-à-dire présent dès la naissance. Ceci, sans pour autant que l'innéité soit présentée par les chercheurs comme une cause organique, perceptive, psychique ou intellectuelle. Ces enfants indemnes d'anomalies organiques sont intelligents. Mais on décrit cette perturbation initiale comme l'absence d'un ajustement de leur corps d'avec celui de la personne qui les tient.
«La conduite de l'enfant est régie par une obsession anxieuse de la permanence, que personne ne peut rompre, sauf l'enfant lui-même et en de rares occasions.» L'extérieur est d'emblée constitué comme une menace. Les enfants autistes ne prêtent pas attention à ce qui intéresse les enfants dont le développement social est normal. Leur monde pour autant n'est pas anesthésié.
S'ils peuvent produire chez eux ceux qui les suivent, sans imagination, un ennui intense et pesant, leur vie affective n'est pas pour autant animale ou désertique. Ainsi, aux Etats-Unis d'Amérique, un jeune adulte de 25 ans, qui, à l'âge de 4 ans avait été diagnostiqué comme «enfant autiste précoce», a dit que le seul souvenir le plus net qui lui restait de l'état dans lequel il était enfant, et dont il a réussi à émerger, était la «terreur».
Comment peut-on déceler l'autisme chez l'enfant et à partir de quel âge ?
La famille, et souvent les parents, bien entendu, remarquent chez leur enfant, ayant entre 3 mois (observation précoce) et 3 ans (observation plus ou moins tardive) un retrait social, des problèmes de développement, (moteurs, de langage, de socialisation...), qui ne savent pas nommer, mais qui les inquiètent, malheureusement, à juste titre.
Le pédiatre qui suit l'enfant fait très souvent partie des premiers acteurs, ayant repéré une anomalie chez l'enfant, et qui va susciter chez ce professionnel médical un déclic. Dans ce cas, il va orienter les parents en consultation pédopsychiatrique et/ou psychologique.
L'âge est important dans cette maladie très particulière dont les modalités et le devenir sont essentiellement liées à la précocité de l'atteinte. C'est en effet, notamment en regard de ce critère que se différencient les formes proprement autistiques des formes psychotiques. Tout au moins dans les premiers mois de vie où peuvent d'emblée être repérés ces troubles susceptibles de mutiler profondément et durablement l'ensemble de l'organisation psychique. Ce sont évidemment plusieurs examens, suivant une procédure qui inclut : consultations médicales, bilans psychologiques cliniques, des observations et des épreuves réservées aux très jeunes enfants, entretiens approfondis, centrés sur l'évolution pulsionnelle et la relation, qui permettront de diagnostiquer l'autisme. Pour un enfant de 4 ans, par exemple, le psychologue clinicien proposera des épreuves fines, et ce, à des enfants dotés de langage, et dans la mesure du possible (au cas par cas), s'ajouterait ce qu'on appelle une exploration projective (test projectifs). Avec ce dispositif, il s'agit d'apprécier l'existence et l'élocution des diverses rencontres et interactions visuelles et/ou verbales, avec le clinicien, avec l'accompagnant et vis-à-vis du matériel. Les aspects psychomoteurs et éventuellement graphomoteurs sont, certes, très importants dans ces tranches d'âge. Ces observations peuvent utilement être comparées à celles que rapporte la famille. Mais l'essentiel est peut-être avant tout d'envisager les perspectives d'un proche ou plus lointain changement à travers lequel pourraient se dessiner d'autres stratégies moins lourdement invalidantes pour le psychisme de l'enfant et le devenir de ses rapports sociaux et familiaux.
Est-ce qu'un seul spécialiste pourrait reconnaître l'autisme chez l'enfant ?
L'appréciation diagnostique et pronostique se fonde sur plusieurs sources, complémentaires dans l'espace et dans le temps, à travers la répétition des rencontres.
Des enfants, qui paraissent totalement en retrait lors de la première séance de consultation psychologique, peuvent montrer une autre facette de leur fonctionnement, par la suite, laquelle, peut bien entendu, être significative de potentiels changements. L'utilité du dépistage précoce est, évidemment, à mettre en évidence, que ce soit au niveau des professionnels de la santé, ou pour les parents ayant mis au monde un enfant qui ne regarde pas les autres, qui ne joue pas, qui ne gazouille pas, qui ne «dérange» pas son monde externe, et qui passe pour étant «d'un caractère sage, tranquille», alors qu'ils glissent dans l'autisme.
Quels sont les stades de développement de l'autisme ?
Selon les normes médicales et psychopathologiques, mondiales, on retient avant 30 mois la notion de troubles autistiques et range parmi les «schizophrénies infantiles» les troubles profonds apparus entre 30 mois et 12 ans. Dans la classification française (CFTMEA) (Misès et al. 1988), sont aussi retenus le début dans le cours de la première année et le seuil des environs de 3 ans comme éléments de distinction entre troubles autistiques et autres psychose.
L'analyste Tustin, qui a entrepris un travail approfondi de démarcation entre psychose et autisme (à travers des prises en charges et des supervisions de pratiques de collègues), propose le schéma du «trou noir» et suppose qu'une des premières illusions de l'enfant est que le monde est une surface continue, prolongement de sa matière corporelle. Pour expliquer l'autisme, elle retrouve l'idée communément admise d'une catastrophe autour de la perception continue bouche-sein-regard.
En effet, l'enfant autiste ne peut pas regarder en face, ce dont est capable un enfant schizophrène. Il est dans un «état d'identification mimétique», comme le bébé qui tirera sa langue si sa mère vient juste de le faire, et restera bloqué à ce stade de façon pathologique. Les armoires et les commodes sont mises en équation avec des estomacs, les taille-crayons sont ressentis par les autistes comme une équation avec sa bouche en train de se mordre cruellement. Si un enfant autiste entre dans une boîte, un tunnel ou une armoire, c'est la sensation d'être caché et protégé qui a un sens pour lui. Ce n'est pas le fait d'aller dedans. Les autistes bouchent les trous, colmatent les failles, se collent aux ouvertures des espaces pour ne pas s'évider.
Comment doit s'articuler leur prise en charge ? Et quel est le rôle des parents et de la famille dans ce processus ?
Très souvent, il faut une prise de conscience soudaine de la mère ou du père pour qu'une demande se fasse jour. De nombreuses consultations d'enfants pleinement autistes depuis la première heure ne sont réalisées qu'au moment où la scolarité révèle la gravité des troubles. Or, le pronostic est d'autant plus sombre que les années passent dans le vraisemblable déni des difficultés majeures alors que les mutilations symboliques s'accentuent.
En fait, outre les particularités de la personnalité parentale, une des raisons de ces dépistages tardifs est la fréquente bonne santé de ces enfants qui explique le peu de mobilisation autour d'eux : pas plus que Djallil ou Asma, n'ont eu l'occasion d'attirer l'attention par des désordres somatiques plus ou moins marqués.
Ils ont traversé la première année de vie (et Asma, la seconde), sans bruit, comme s'ils avaient «poussé tout seuls». C'est ce que dit une maman de son fils, marcheur précoce, et vite dégourdi.
Evidemment, l'essentiel de la psychose (de l'autisme) est de la soigner, les enfants atteints et/ou leurs familles bénéficient d'un suivi intensif qui s'avère aujourd'hui diversement favorable, lorsque le dispositif de soins est complet (professionnalisation des pédopsychiatres, des pédiatres, psychologues, et de tous les professionnels impliqués dans le processus thérapeutique...) Dans la mesure du possible, une approche psychanalytique est privilégiée de façon à tenir compte de l'ensemble de la dynamique du groupe, tant dans l'éclosion des troubles que dans leur répercussion sur chacun. Des expériences ont démontré l'efficacité de certains travaux (prises en charge) des résultats spectaculaires. Par exemple, un enfant autiste est devenu méconnaissable après un an de thérapie familiale dans laquelle les deux parents sont très fortement impliqués. Cet enfant qui présentait un retard de parole et de langage avec des propos peu compréhensibles sans décodeur pour les étrangers, communique manifestement avec les siens. Les colères sont devenues espacées, sans toutefois, disparaître. Intégré dans le groupe de l'enfant de sa classe, l'enfant joue désormais, un peu plus souvent avec eux. En effet, une prise en charge individuelle, psychothérapique et orthophonique est indispensable, en plus du travail au sein du groupe familial. Mais attention, il est peut-être aussi nécessaire de rappeler que la prise en charge peut s'avérer lente et paradoxale, ponctuée de régressions et d'intolérances violentes à la frustration.
Qu'en est-il de leur prise en charge en Algérie ?
Très insuffisante ! Il est de la responsabilité des scientifiques, des centres hospitaliers universitaires, des laboratoires pharmaceutiques, des autorités de la santé, de produire des campagnes de sensibilisation, qui cibleraient l'information du grand public, et l'implication/la formation des parents dans l'observation du développement psychomoteur de leurs enfants, pour l'utilité du dépistage précoce, et l'aide à une prise en charge efficiente pour un travail sur la réinsertion sociale de l'enfant autiste.
Un dernier mot, un conseil en direction des familles ayant un enfant autiste.
Le silence des symptômes n'est pas toujours une garantie de bonne évolution, bien au contraire, puisque c'est dans ces contextes que se découvrent de nombreuses éclosions psychotiques. Comment se sont inscrits les organisateurs essentiels que sont la différenciation des visages étrangers puis plus tard l'opposition entre le oui et le non, porteuse des distinctions fondamentales entre le dedans et dehors, le conservé et le projeté ? Les anamnèses (consultations approfondies) des enfants autistes et psychotiques sont souvent étonnamment vides de ces informations. C'est dire combien sont importantes les consultations préventives et le rôle des médecins généralistes, des pédiatres auprès desquels ces signaux inscrits en creux devraient devenir hautement alarmants dans certains contextes. Les parents jouant alors un rôle central, ils sont les acteurs «traits d'union» dans l'observation du développement de leur enfant. Plus ils sont attentifs au signes (non-dits/non verbaux), plus ils s'intéressent au développement physiologique et psychologique de leur enfant, avec la distance suffisante, sans tomber dans l'excès, plus ils impacteront positivement, le processus du diagnostic et de la prise en charge. Les parents d'enfants autistes, se sentant très souvent coupables, ne doivent pas restés isolés, et doivent se rapprocher des associations spécialisées pour s'informer sur la maladie et sur le mode d'approche de communication avec l'enfant autiste. On citera à titre d'exemple, l'Association nationale de l'autisme.


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