Comme nous l'avions annoncé dans notre précédente édition, le procureur général près le tribunal criminel d'Alger n'a pas usé de tous ses arguments pour requérir la perpétuité à l'encontre des mis en cause dans l'affaire de trafic de cocaïne importé du Mali. L'accusation a motivé ses demandes par la «gravité» des faits, mais aussi par «le rang professionnel» des prévenus. Abder Bettache - Alger (Le Soir) Décidément, les pouvoirs publics semblent décidés à frapper fort dans les milieux de trafic de drogue. Le réquisitoire de l'accusation à l'encontre de la vingtaine de personnes mises en cause dans l'affaire de trafic de cocaïne importée du Mali illustre parfaitement cet état de fait. D'ailleurs, la défense a axé l'essentiel de sa plaidoirie sur un point précis, en s'interrogeant sur les réelles motivations du représentant du ministère public, arguant que ce dernier en «manque d'arguments a requis des peines en gros, alors qu'il fallait les individualiser». Cela dit, la réclusion criminelle à perpétuité requise par le procureur général à l'encontre des vingt-deux accusés dans cette affaire, dont deux sont en état de fuite, est motivée par les chefs d'inculpation de «constitution d'un groupe criminel organisé et d'importation illégale de stupéfiants». Le procureur général, Talbi Farid, a justifié dans son réquisitoire la peine qu'il a requise contre les 20 accusés présents, par la gravité des faits qu'ils leur sont imputés ainsi que par la nature de la fonction qu'occupaient certains d'entre eux. «Il y a parmi les accusés des stewards d'Air Algérie, un lieutenant de police, le chef adjoint de la Sûreté urbaine d'Ouled Fayet et aussi un officier qui travaille à la Brigade d'intervention et de recherche à la Sûreté de wilaya d'Alger. Tout cela pour faciliter les agissements de ce réseau criminel», a souligné le procureur Talbi, qui considère que tout est réuni pour donner la qualification de «d'association de malfaiteurs aux membres de ce réseau». Lors des auditions des accusés par le juge Omar Benkharchi, le prévenu H. Youcef (steward à Air Algérie) a reconnu avoir ramené une quantité de cocaïne de Bamako pour le compte de l'accusé principal, F. Abdennour. Quant à l'artiste chanteur Réda Sika, il a affirmé qu'il a été victime «de son nom artistique» qui a été divulgué par F. Abdennour «sous la pression», selon lui. Pour les autres prévenus (stewards, chef d'escale, policiers, pêcheurs et commerçants), ces derniers se sont accusés mutuellement sous l'œil amusé du président du tribunal criminel. La défense, composée d'une quarantaine d'avocats, a entamé sa plaidoirie en tentant de mettre à nu les dysfonctionnements de la procédure pénale. C'est le cas des avocats Miloud Brahimi, Chaoui, et Mehdi Menaceur qui ont plaidé à la fois le droit et les circonstances de l'affaire. Pour sa part, Me Boumerdassi, avocate de Réda Sika, s'est interrogée si son client n'a pas payé les frais d'une surmédiatisation d'une affaire dans laquelle il a fait l'objet d'une «manipulation». Le verdict est attendu pour ce lundi, tard dans la soirée. Pour rappel, et selon l'arrêt de renvoi, les faits de cette affaire remontent à 2011 après que les services de sécurité d'Alger eurent été informés de «l'existence à Alger d'un réseau international spécialisé dans le trafic de cocaïne provenant de Bamako et d'Espagne». Il s'est avéré, après les informations reçues, que le réseau dirigé par l'accusé principal, F. Abdennour, avait chargé un groupe de stewards, parmi eux Réda Sika, travaillant à Air Algérie, d'acheminer la drogue. Les services de sécurité sont parvenus, le 2 octobre 2011, à arrêter l'un des stewards à l'aéroport Houari-Boumediène en provenance de Bamako «en possession d'une quantité de cocaïne pure», avant d'interpeller les autres accusés dont certains acheminaient de la drogue à partir de Bamako ou d'Espagne pour la remettre à des personnes qui se chargeaient, ensuite, de la commercialiser dans la capitale.