Le procès du présumé assassin du professeur et militant des droits de l'homme, Ahmed Kerroumi, doit s'ouvrir aujourd'hui dans un climat assez tendu, où sa famille, ses amis et ses camarades de lutte, ainsi que des étudiants du défunt et tous ceux qui l'ont connu, ont décidé d'observer un sit-in devant le tribunal criminel où a lieu le procès pour réclamer la vérité sur son assassinat. Tendu parce que nombreux sont ceux qui considèrent sa mort comme étant «un assassinat politique», alors que d'autres s'interrogent sur ce qu'ils qualifient de dossier «bâclé». Disparu le 19 avril 2011 à Oran, Ahmed Kerroumi est retrouvé mort cinq jours après, à l'intérieur du siège du Mouvement démocratique et social (MDS), dont il était l'un des cadres. Membre actif de la CNCD d'Oran, et militant des droits de l'homme, l'assassinat du professeur Kerroumi suscite toujours autant d'indignation, tant beaucoup de zones d'ombre entourent sa mort. Sa famille demande justice et vérité tout en s'interrogeant sur le contenu du listing de son téléphone portable, retrouvé à côté de son corps. «Comment se fait-il que mon numéro et ceux de tous mes proches aient été effacés du listing du téléphone de mon mari ?» s'interroge son épouse. En se demandant également pourquoi, l'intervalle de temps, allant de 12h à 17h, qui est celui où son mari a reçu le fameux appel avant son kidnapping, n'indique aucun appel reçu à ce moment-là ? Ils étaient pourtant nombreux à l'avoir appelé durant les jours de sa disparition et même le jour où l'on a retrouvé son corps, et se demandent, eux-aussi, pourquoi leurs appels ne figurent pas sur le listing et n'ont qu'une conclusion : des appels ont été effacés. Mais pour quelle raison ? Et par qui ? Le père de l'accusé ne cesse de son côté de clamer l'innocence de son fils Mohamed-Abdelkader Belbouri, 30 ans, livreur de boissons énergisantes, qu'il considère comme étant le bouc émissaire dans cette affaire, et qu'il aurait, dit-il «avoué un crime qu'il n'a pas commis sous la torture dont il a été victime, durant son interrogatoire». Abondant dans ce sens, la commission internationale de juristes et Amnesty international évoquent, dans une déclaration commune rendue publique, ce vendredi, «des allégations de tortures qui ternissent le procès du meurtre d'un militant politique» les deux organisations ont appelé les autorités algériennes, à «garantir à la famille de Kerroumi, le droit de connaître la vérité et de juger l'auteur de l'assassinat conformément au normes internationales d'équité des procès». Pour rappel, le procès de «l'affaire Kerroumi» devait se dérouler le 30 septembre 2013, il avait été reporté en raison du retrait des avocats de la défense qui avaient émis plusieurs requêtes sur des vices de procédure, notamment par le refus d'ordonner des contre-expertises, de procéder à un complément d'enquête, de convoquer au procès des témoins essentiels tels le médecin légiste, manipulation de l'historique des appels téléphoniques... depuis, un comité «vérité sur l'assassinat d'Ahmed Kerroumi» a vu le jour où les signataires de la pétition font état de leur «grande inquiétude quant à l'équité de ce procès, dénoncer le traitement, marqué par le déni fait aux requêtes légitimes et justifiées des avocats de la défense et de la partie civile».