Les entreprises nationales et même étrangères commencent à recourir à l'arbitrage local pour le règlement de leurs litiges commerciaux. Chérif Bennaceur - Alger (Le Soir) Plusieurs entreprises de divers statuts juridiques ont demandé l'arbitrage du Centre de médiation, de conciliation et d'arbitrage d'Alger (CMCAA), relevant de la Chambre algérienne de commerce et d'industrie (CACI). Sur une trentaine d'affaires soumises durant les dernières années, une douzaine d'affaires qui ont opposé des entreprises de droit algérien et même une institution nationale, ont été traitées au niveau de ce centre, a-t-on relevé hier lors d'un séminaire consacré à l'arbitrage commercial et organisé sous l'égide de la CACI. Plusieurs demandes ont été néanmoins rejetées, indiquera le juriste et avocat d'affaires, membre de la Cour internationale d'arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI), Nasr-Eddine Lezzar qui explicitera la procédure arbitrale (préparation de l'arbitrage, engagement de la procédure, la conduite et l'exécution...) aux participants de ce séminaire, essentiellement des opérateurs économiques, des avocats et juristes d'entreprises. Des rejets motivés essentiellement par l'absence de clauses ou conventions d'arbitrage liant les deux parties, une mauvaise rédaction des termes contractuels (clauses compromissoires, compromis d'arbitrage, conventions d'arbitrage)... «Il faut bien rédiger», incitera un autre juriste, l'avocat et enseignant Me Farid Benbelkacem qui appelle à traiter cette pathologie. Mais aussi de déplorer une «méconnaissance» de ce mode de règlement alternatif aux procédures judiciaires, prévu par la législation en vigueur, de son intérêt notamment par rapport à la procédure judiciaire, la médiation judiciaire qui peine à progresser. «Le recours à l'arbitrage local, ça démarre», observe-t-il, même si «la culture n'est pas encore (totalement) ancrée au niveau des entreprises», dira-t-il, notamment les PME, par méconnaissance, des insuffisances de formation, l'existence d'appréhensions quant aux coûts de la procédure arbitrale locale... Et ce, dans le contexte où le recours à l'arbitrage international est de mise, notamment lorsqu'il est prévu dans les contrats de partenariat. Notons, toutefois, que des entreprises étrangères, en litige avec d'autres parties algériennes ou pas, ont sollicité l'arbitrage local du CMCAA, indique-t-on. Notons que dans la pratique algérienne, les frais d'enregistrement d'une affaire s'élèvent à 50 000 dinars, des frais administratifs auxquels s'ajouteront plusieurs autres frais et provisions. Ailleurs, les provisions s'élèvent, en début de procédure, à 5 000 dollars au niveau de la CCI, indique-t-on, en notant que la rémunération des conseils et arbitres constitue 60% des coûts d'arbitrage et que sur les 40% restants, 15 à 20% représentent des frais administratifs. Des frais élevés au niveau international, de l'ordre de 2 000 dollars minimum qui ont poussé nombre d'entreprises algériennes à «abandonner», dira Me Benbelkacem, lorsqu'elles recourent à l'arbitrage commercial international, tant celui de la CCI que d'autres instances arbitrales européennes ou mondiales. Notons également que nombre d'entreprises publiques ne sont pas enclines à solliciter l'arbitrage institutionnel, surtout local, car étant dans l'incapacité de budgétiser des frais souvent impondérables. D'où également la nécessité d'une «bonne évaluation des coûts», note l'avocat Nasr-Eddine Lezzar. Dans ce contexte, des efforts en matière de sensibilisation des opérateurs économiques et de formation des juristes d'entreprises notamment sont souhaités, relèvera, par ailleurs, le directeur général de la CACI, Mohamed Chami, qui évoque toute une série d'actions initiées en ce sens. Relevons également qu'un nouveau règlement d'arbitrage entrera en vigueur au niveau de la CMCAA dès janvier 2014, l'actuel étant devenu obsolète. En outre, un nouveau barème, devant être fixé proportionnellement à l'enjeu, la durée et la qualité de l'arbitrage, devrait également entrer en vigueur, voulu néanmoins accessible aux PME. Même si l'actuel reste encore en deçà de ce qui se fait ailleurs et s'avère quelque peu attractif.