De notre bureau de Bruxellles, Aziouz Mokhtari On fait court. Les Russes, plus rouges tout de même que les Belges — ils sont les dépositaires universels des couleurs éponymes — s'adonnent à un espionnage serré, conséquent et que Poutine veut efficace, de leurs adversaires du groupe H. Qui s'étonne, réellement, que le renseignement dont l'ancêtre proche est tout de même le KGB laisse au hasard, ou laisse aller à l'improvisation pour un événement aussi important politiquement et médiatiquement que la Coupe du monde ? Ça l'est davantage au pays de Pouchkine, Lénine, Staline et Yachine que le Mondiale brésilien s'intercale entre deux faits majeurs pour les Russes, qui se dérouleront dans la partie essentielle de l'ex-URSS : les Jeux olympiques de Sotchi et la Coupe du monde 2018. La Russie, toute la Russie, voire toutes les Russies, ne veulent pas être organisateurs d'un Mondial avec une équipe bidon, qui serait médiocre au Brésil. D'où la grande importance qu'ils accordent au groupe dans lequel sont versés les Algériens. La presse et le staff technique belges savent, déjà, que le rusé Fabio Capello a répertorié une insuffisance criante dans leurs rangs : l'absence de latéraux de métier chez les Diables rouges. Il est vrai que le sélectionneur fédéral du royaume de Philippe n'a jamais pu régler cette affaire. C'en est une, assurément. Avec les Coréens, dont les attaquants des couloirs peuvent être critiqués pour tout, sauf à manquer de vitesse, les Russes, qui travailleront la question et l'inconnue concernant les ailiers droit et gauche ou ceux qui feront le job algérien, Marc Wilmots peut être inquiet. Et il l'est. Les envolées lyriques ou l'absence d'objectivité de la presse de son royaume ne lui font pas perdre la tête. Il sait que la bataille des flancs est primordiale et s'il la perd, non seulement il peut dire adieu à la première place, mais peut-être aussi au passage pour le tour suivant. Comment trouver des solutions idoines à ce handicap majeur ? Pas si simple que paraît l'équation, Wilmots ne peut la résoudre d'un claquement de doigts ou d'un coup de baguette magique. Selon des indiscrétions bruxelloises, les adjoints du fédéral rouge belge ont entamé une feuille de route concise, aussi précise que les rapports des espions russes. Transformer d'ici juin des arrières centraux, sans doute parmi eux le plus célèbre et le plus talentueux Vincent Kompany, en défenseurs de couloir. Pas question pour les managers belges de prospecter ou de faire appel à d'autres joueurs que ceux ayant participé à la glorieuse épopée qualificative. La maison belge n'est pas connue pour ce genre d'approximation ou de remèdes de dernière minute. Personne, ici, n'y pense et Fabio Capello le sait si bien qu'il aurait — selon les canards spécialisés tant francophones que néerlandophones — instruit ses collaborateurs de monter une ligne d'attaque avec plusieurs variantes et un invariable, une constante. Tous les «offensifs» russes, voire même les défenseurs, doivent travailler la vitesse et le temps d'exécution. Selon les Russes commentés par les Belges, la victoire sur les Diables passe par cela et les coéquipiers de Heden Hazard n'y peuvent pas grand-chose, sauf à dominer les trois rencontres du début à la fin au risque de crever lors des tours suivants, si tours suivant il y a. La trouille des Belges ne s'arrête pas là. L'euphorie médiatique passée et suivant les conseils des sages, les Diables rouges se rendent, petit à petit, à la raison et commencent à laisser de côté leur condescendance en évoquant l'Algérie. Ils sont d'autant moins à rester sur cette posture qu'un article documenté paru dans le plus grand quotidien du pays (De Morgen) a établi la liste des footballeurs algériens et/ou d'origine algérienne qui ont évolué ou évoluent en Europe. La liste a donné du vertige, ici, à beaucoup de journalistes et de commentateurs tant de la presse écrite qu'audiovisuelle que celle s'exprimant sur la Toile. Pour le plaisir, nous citons quelques grands noms du football algérien répertoriés par le spécialiste flamand : Rachid Mekhloufi, Mustapha Zitouni, Bentifour, Bouchache 1 et 2, Claude Abbas, Abdelhamid Kermali, les deux Zidane, le champion du monde Zinedine et l'autre, le Belge, celui de Courtrai, Benzema, Nasri, Ghoulam, Feghouli, Dahlab, Guedioura... Au fond d'eux-mêmes, les Belges savent parfaitement que personne n'est sûr de sortir vivant du groupe H. Pourtant, ils ont besoin de briller lors de cette Coupe du monde, le peuple diable rouge attend beaucoup de sa sélection. Elle a été un ciment d'unité nationale dans des moments tragiques vécus par le pays. 18 mois sans gouvernement élu, montée en puissance du nationalisme brumeux néerlandophone, percées spectaculaires de l'extrême-droite, le royaume d'avant-l'épopée des Diables était dans de sales draps. Il faut dire que les facteurs d'unité nationale, ici, sont rares, très rares. On peut seulement citer la monarchie, la sécurité sociale et les... Diables rouges. Problème : les Russes aussi veulent souder la nation autour de leur sélection et ne permettront pas de ratage après Sotchi et avant leur Coupe du monde. Les Coréens non plus ne tiennent pas à faire de la figuration, eux qui ont été demi-finalistes d'un Mondial. L'Algérie dans cette course n'a pas, jusqu'à preuve du contraire, sacrifié le Mondial du Brésil. Le groupe H n'a pas encore livré tous ses secrets. Fernanda Lima a, lors du tirage au sort, créé un véritable embrouillamini. Sa beauté et sa tenue sexy ne doivent pas illusionner. Certes, le plaisir était dans les yeux, mais la bataille aura lieu sur le terrain. Balle au centre.