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L'entretien de la semaine Salima Z., spécialiste en gynécologie, au soirmagazine :
«L'impact des troubles dépressifs du post-partum peut aggraver une situation familiale et conjugale conflictuelle déjà existante»
Dans cet entretien qu'elle a bien voulu nous accorder, Salima Z., spécialiste en gynécologie, nous apporte son éclairage sur le post-partum en mettant l'accent sur le fait que ce phénomène ne doit pas être négligé même s'il est une phase brève d'hypersensibilité émotionnelle, qui n'apparaît pas forcément chez toutes les femmes. Soirmagazine : Pouvez-vous nous définir en quelques phrases le baby blues ? Est-ce que toutes les mamans passent systématiquement par cette phase ? Salima Z. : Le post-partum blues (ou baby blues, ou maternity blues ou syndrome du troisième jour) concerne, selon les auteurs, 30% à 80% des accouchées. Il associe dans les tout premiers jours après l'accouchement anxiété, irritabilité, labilité émotionnelle, dysphorie, troubles du sommeil, fatigue et plaintes somatiques. Les crises de larmes, la susceptibilité, la crainte d'être délaissée surprennent et déroutent l'entourage, surtout lorsque l'accouchement s'est bien déroulé. Les préoccupations anxieuses du début de la grossesse réapparaissent, souvent associées à l'idée obsédante de ne pas savoir s'occuper du bébé, avec des alternances de jubilation et de pessimisme. Ce tableau, relativement fréquent, est de faible intensité et ne doit pas forcément être considéré comme une dépression à minima, mais plutôt comme une phase brève d'hypersensibilité émotionnelle, qui n'apparaît pas forcément chez toutes les femmes. Quel est l'élément déclencheur ? Les modifications endocriniennes semblent capables de provoquer à elles seules un état réactionnel psycho-endocrinien, différent dans sa cinétique et sa temporalité des mécanismes dépressifs. S'y ajoutent les réaménagements affectifs et cognitifs liés à l'accouchement et au processus de «maternité». Dans leurs antécédents, on retrouve souvent une enfance empreinte de carences affectives, de séparations précoces et une grossesse émaillée d'événements douloureux (deuils, séparations) ou de conditions psychologiques difficiles (solitude, conflits conjugaux, soutien conjugal insuffisant ou inadéquat). Il est donc important, lorsque de tels éléments ont été repérés au cours de la grossesse, de prévoir un suivi psychothérapeutique. Quel est la durée de ce mal-être, et quelles en sont les conséquences du point de vue psychologique et familial ? Ce trouble transitoire survient entre le troisième et le sixième jours après l'accouchement. Réduit parfois à 24 heures, il dure quatre à cinq jours au maximum. Si les symptômes persistent après la première semaine ou s'intensifient, on entre alors dans le cadre différent des dépressions du post-partum (plus grave). Il est donc important de dépister le baby blues et de le surveiller. L'impact des troubles dépressifs du post-partum peut aggraver une situation familiale et conjugale conflictuelle déjà existante dans certains cas, et cela bien sûr s'il y a absence de compréhension de la part de ces derniers et qui ne passe pas sans affecter le développement psychique chez l'enfant qui est difficilement évaluable. Mais la plupart des auteurs s'accordent à dire qu'il n'est pas négligeable. La maman doit donc être prise en charge afin que l'épisode ne se prolonge pas et que les interactions précoces s'effectuent dans les meilleures conditions, ce qui ne se fait pas forcément pour toutes les femmes, car plusieurs d'entre elles souffrent en silence par peur d'être incomprises. Les mamans sont-elles conscientes de leur malaise ? Au départ, non. Disons qu'elles ne veulent pas l'admettre. Elles en parlent à leurs amies qui ont déjà eu un enfant et qui ont ressenti les mêmes symptômes, alors elles prennent petit à petit conscience qu'elles souffrent de la même manière. Elles donnent donc une explication à leur malaise. Elles se rendent comptent qu'en fait, ça n'arrive pas qu'aux autres. Les mamans consultent-elles, ou préfèrent-elles taire ce malaise par honte peut-être ? En fait, tout dépend du milieu social et familial de la maman, l'éducation qu'elle a reçue et son niveau intellectuel. Si la maman est entourée d'une famille et surtout une belle-famille ouverte, compréhensive, communicative et sans tabou, la maman, inquiète et voulant «guérir» de ce mal-être, encouragée par les siens, n'hésite pas à consulter un psychologue, consciente qu'elle a besoin d'une aide, pour comprendre d'abord de quoi elle souffre, pour ensuite pouvoir surmonter sa détresse. Si au contraire la famille ne communique pas, est conservatrice, la maman taira son malaise et souffrira en silence. Car parler d'un mal qui se passe dans la tête est synonyme de maladie mentale, de folie, et la folie demeure, hélas, taboue surtout pour une femme. En fait, il faut noter que le baby blues a toujours existé, sauf qu'on n'arrivait pas à l'expliquer rationnellement. Dans les sociétés traditionnelles, on disait que la maman a été habitée par les djins. (sadfète). Quel est le comportement idéal à adopter par les proches dans pareille situation ? Le post-partum blues ne nécessite pas de traitement médicamenteux. La relation avec les soignants, la mobilisation de l'entourage, l'information, une attitude chaleureuse et compréhensive suffisent le plus souvent pour passer sans encombre une phase considérée comme un épisode, une variation de la normale.