La réglementation des changes, régie par la Banque d'Algérie, demeure encore contraignante, pénalisante pour les exportateurs nationaux. Chérif Bennaceur - Alger (Le Soir) - Cette réglementation empêche l'ouverture de comptoirs et bureaux de représentation à l'étranger, a indiqué hier le président de l'Association nationale des exportateurs algériens (Anexal). Invité du Forum Economie du quotidien El Moudjahid, Ali Bey Nasri a estimé que les exportateurs peinent à se développer à l'international, dans la mesure où l'investissement et l'installation de bureaux économiques à l'étranger restent contraints par la réglementation du Conseil de la monnaie et du crédit. Une difficulté qui s'explique par «le syndrome de la devise», la crainte de fuite de capitaux, laisse entendre le président de l'Anexal. Or, Ali Bey Nasri considère qu'il est possible d'«exclure» l'ouverture de comptoirs de cette interdiction, d'autant que les entreprises exportatrices peuvent utiliser à leur guise une partie de la recette d'exportation. Une contrainte qui s'ajoute au problème de la «pénalisation» du non-rapatriement des dividendes d'exportation. Déplorant une situation «vraiment préjudiciable», le président de l'Anexal déplore que nombre d'opérateurs ont abandonné l'activité d'exportation, par crainte d'être condamnés à des sanctions pénales en cas d'incidents de défaut ou retard de rapatriement, même si les délais ont été prolongés jusqu'à 180 jours. Ainsi, si l'acte d'importation n'est nullement contraint mais largement facilité, il n'en est cependant pas le cas pour l'acte d'exporter, de «ramener des devises» au bénéfice de l'économie nationale, déplore l'hôte d'El Moudjahid. Ce que les exportateurs revendiquent Des facteurs à même de décourager le développement des exportations hors hydrocarbures, constate le président de l'Anexal qui appelle donc à «la mise à niveau» de cette réglementation des changes. Une demande de mise à niveau qui a été déjà soulevée, précise Ali Bey Nasri, mais qui sera reformulée lors de la prochaine rencontre tripartite (gouvernement- UGTA-patronat), prévue le 23 février prochain. Ainsi, les exportateurs réitéreront leur demande de «faciliter» l'installation de comptoirs et bureaux de représentation économique à l'étranger. Voire, les exportateurs souhaitent une meilleure écoute de la part de la Banque d'Algérie dont ils invitent le gouverneur (Mohamed Laksaci) à «se rapprocher» d'eux, dira le dirigeant de l'Anexal. Autre revendication, formulée de manière récurrente, l'installation effective du Conseil national consultatif pour la promotion des exportations hors hydrocarbures (CNCPEX). Prévu par la législation depuis 2004 et placé sous l'égide du Premier ministre, le CNPEX n'a pas encore été installé, déplore M. Nasri, dans la mesure où la mise en place de ce conseil aurait permis le développement des exportations hors hydrocarbures sur la base d'une stratégie efficiente. D'autres propositions seront formulées lors de cette rencontre tripartite, indique le dirigeant de l'Anexal, s'agissant notamment de booster le développement de l'Agence nationale de promotion du commerce extérieur (Algex), le lancement d'un programme de formation managériale et technique des opérateurs, la bonification des lignes de crédits bancaires à l'export, la nécessité d'impulser le développement de plateformes et d'infrastructures portuaires modernes et davantage opérationnelles... L'opportunité médiatique pour Ali Bey Nasri de rappeler que sur soixante propositions formulées par les opérateurs dès 2011, seulement une dizaine a été effectivement mise en œuvre. A ce propos et se fiant à des assurances du ministre du Commerce, Mustapha Benbada, l'association semble confiante quant à la prise en charge des doléances non satisfaites lors de cette tripartite et qui sont «toujours d'actualité». Remédier à la faiblesse des exportations hors hydrocarbures Ce qui permettrait de remédier à la faiblesse des exportations hors hydrocarbures dont les recettes peinent à dépasser les 2 milliards de dollars comme en 2013 mais dont la structure reste encore dominée par les dérivés des hydrocarbures liquides et gazeux, même s'il faut noter l'exportation de produits agroalimentaires «remarquables». Et ce, dans le contexte où la balance commerciale affiche un solde «légèrement» négatif inquiétant, avec des exportations globales de 67 milliards de dollars (dont 65 milliards de dollars d'hydrocarbures) et des importations de biens et services qui frôlent la barre des 70 milliards de dollars. Ainsi, le président de l'Anexal notera une croissance de 10% des importations de biens entre 2012 et 2013, la facture s'établissant à 55 milliards de dollars, «un chiffre énorme» et dont une bonne partie est constituée par l'importation de véhicules de tourisme et de transport (6 milliards de dollars), de carburants (4 milliards de dollars), d'or (près de 900 millions de dollars)... En ce sens, Ali Bey Nasri constate que les mesures de la loi de finances complémentaire pour 2009, pourtant censées contribuer à la réduction du trend haussier des importations, «n'ont pas eu l'effet escompté». Soit, un taux de couverture des importations par les exportations qui affiche «pour la première fois» un tassement, une tendance baissière, négative, relève le président de l'Anexal. Ce dernier notant également que les importations de services ont fortement crû, avec une facture de l'ordre de 13 à 15 milliards de dollars. Comme il citera l'augmentation des coûts de fret maritime et des surestaries dont la facture atteint les 5 milliards de dollars. Autres solutions D'où la nécessité d'œuvrer à renforcer les capacités de transport maritime des marchandises, booster les capacités de raffinage et stimuler le développement d'une industrie sidérurgique et manufacturière efficiente, constate-t-on. Cela même si Ali Bey Nasri note que des «signes positifs» sont à relever dans le domaine de la substitution à l'importation des carburants et le réarmement du pavillon national. Mais des mesures qui nécessitent également de remédier au déficit de «vision stratégique», indique le président de l'Anexal. Ce dernier réitérant l'opportunité pour l'Algérie de pouvoir bien positionner ses produits notamment agricoles à l'international à charge cependant de transcender toutes velléités, avoir une volonté d'aller à l'exportation et de définir une stratégie d'intégration dans les marchés commerciaux cible. Il s'agira aussi d'identifier les potentialités et métiers d'exportations, de garantir les conditions logistiques, de veiller à défendre ses intérêts commerciaux, voire ses droits sélectifs et ad-valorem à l'instar de l'Union européenne...