«Le rôle de l'ingénieur en génie civil est de permettre à ce que l'homme ne tremble pas devant le tremblement de terre.» C'est le leitmotiv de Omar Hadjeres, président du Syndicat national des ingénieurs agréés en génie civil et bâtiment (Snia-GCB). Cette organisation a, en effet, tenu un conclave à Boumerdès, le jour du 11e anniversaire du tremblement de terre de Boumerdès, le 21 mai 2003, qui s'intitule «rôle de l'ingénieur en génie civil face aux dangers du séisme». Dans l'urbanisme moderne, le travail de calcul de l'ingénieur en génie civil est primordial. C'est lui qui détermine le dimensionnement des structures de tout ouvrage (logements, barrages, routes, ponts,...). L'ingénieur tient compte, dans ses calculs, de la nature du terrain. Malheureusement, son rôle reste méconnu du grand public alors que son intervention sur les projets de construction est obligatoire. En Algérie, cette intervention est codifiée dans la loi 90/29 modifiée par la loi 04/5. Néanmoins, l'article 55 de la première loi reste ambigu. Il fait de l'architecte le concepteur de tout ouvrage soumis à la délivrance de permis de construire. Les responsables du syndicat cité plus haut, avec qui nous avons discuté, estiment que leur travail est aussi important que celui de l'architecte alors que la loi fait d'eux les obligés de ce dernier. «Au procès du séisme de Boumerdès, des ingénieurs du génie civil ont été inculpés par la justice. Fort heureusement innocentés par la suite. Par contre, aucun architecte n'a été inquiété. La justice avait donc estimé que le travail de l'ingénieur du génie civil est plus important. Nous voulons notre autonomie pour être responsables de notre travail», dit l'un d'eux. Durant cette rencontre, rehaussée par la présence du SG de la wilaya, plusieurs thèmes importants comme la dynamique des sols, la vulnérabilité sismique,... ont été abordés. Elle a regroupé, en plus des ingénieurs du génie civil, des spécialistes d'autres filières de la construction. Elle entre dans le cadre de la vulgarisation de la prévention qui reste le volet le plus faible dans notre pays. Le drame de Boumerdès en est la preuve et les choses n'ont pas beaucoup évolué. Ce qui attise la colère du professeur Abdelkrim Chelghoum, spécialiste des phénomènes parasismiques. Il est connu pour ses coups de colère et ses rudes interventions contre la négligence dans le domaine de la construction. Le professeur Chelghoum : la négligence persiste Le professeur qui a été récemment scandalisé par la dernière énorme négligence concernant le chantier de l'autoroute - il l'a fait savoir dans les colonnes du Soir d'Algérie -, n'a pas l'intention de se taire de sitôt. Le jour où la justice s'intéressera à ce que dit Chelghoum, bien des hauts responsables iront faire des séjours en prison. Notre interlocuteur pense que la prévention fait partie intégrante de la sécurité nationale «d'autant plus, précise-t-il, que notre pays est soumis aux aléas de la nature comme les tremblements de terre, les inondations, les glissements de terrains». Il estime, par ailleurs, que depuis la catastrophe de Boumerdès, aucune modification n'a été apportée dans la réglementation puisque les mêmes pratiques de construction sont reconduites et on érige, dans tout le pays, des bâtiments sur des terres agricoles, sur des lits d'oueds ou sur des terrains glissants, sans se référer aux études techniques parasismiques. Il propose comme solution le désengagement de l'Etat pour le confiner dans le rôle de régulateur. L'Etat doit se désengager des tâches des études et de la conception du bâti et laisser les experts et autres spécialistes faire ce travail en toute indépendance. C'est la règle partout dans le monde.