De notre bureau de Bruxelles, Aziouz Mokhtari Les nationalistes flamands ne prendront pas le pouvoir cet été. Il y a dans le royaume un seul peuple, le peuple Diable Rouge. Le roi Philippe a chargé, hier, Bart De Wever, chef de l'Alliance néo-flamande (NVA), de tenter de trouver les compromis nécessaires pour monter un exécutif. La tradition du royaume veut, en effet, que la formation arrivée en tête des élections assume cette prérogative. La tâche n'est pas aisée, pour autant, pour le chef nationaliste néerlandophone. Les résultats du vote au fédéral ne permettent pas un passage en force du séparatisme. Au sud, francophone (Wallonie et Bruxelles), le Parti socialiste tient et même au nord, patrie de De Wever, les partis fédéralistes ne sont pas balayés. Les sociaux-chrétiens, les libéraux, les Verts, les sociaux-démocrates sont là et peuvent dégager une majorité sans la NVA. Et puis, il y a le phénomène Diable rouge, véritable don de Dieu pour le roi, les fédéralistes, et tous les Belges qui ne veulent pas que leur Etat «s'évapore» comme le souhaitait, il y a peu, le leader flamand, vainqueur au nord dimanche dernier. La Belgique de Marc Wilmots constitue un véritable rempart contre les voix qui luttent pour la fin du modèle actuel et pour mettre à sa place un confédéralisme brumeux, aux contours imprécis si ce ne sont ceux de l'éclatement, en définitive, du royaume. Tant au nord, à Bruxelles qu'au sud du pays, le peuple Diable Rouge veut l'union sacrée. Les supporters, en fait l'ensemble des citoyens sont mobilisés fortement derrière les équipiers d'Eden Hazard. Personne, pas même les autonomistes flamands et fussent-ils vainqueurs au nord des élections, n'osera se mettre contre cet état d'esprit. Les Diables Rouges sont chose trop sacrée pour être laissés aux mains des politiques, surtout des séparatistes. Bart De Wever, bourgmestre d'Anvers, capitale des Flandres, véritable poumon économique de la Belgique et dans le top 5 des ports du monde, s'obligera à avancer masqué, en cachant ses objectifs ce qui l'obligera à dire des mots dans le sens de l'unité de la Belgique, du renforcement du fédéral. Ce qui la mettra en porte-à-faux de ces électeurs à qui il promettait autre chose. Entre autres, «en finir avec la Belgique, cette construction francophone qui retarde l'essor des néerlandophones, besogneux, riches. Les autres formations ne lui feront pas de cadeau, ni sur son programme sociétal, ni sur ses choix économiques, ultra-libéraux, véritables armes de destruction massive contre la solidarité nationale, les droits acquis des travailleurs et qui signifieraient, s'ils venaient à être appliqués, la fin du modèle belge. En le nommant informateur, en somme préparateur de gouvernement, le roi ne se fait pas trop d'illusions sur les chances de succès de Bart De Wever. Dans quelques jours, sans doute, un autre sera appelé au palais pour prendre le relais du leader séparatiste et les choses sérieuses commenceront. Entre-temps, tout le monde, belge et autre, sera yeux rivés sur la Coupe du monde. De fortes chances, ici, que l'exécutif Di Rupo, actuel Premier ministre, qui a fait de la belle ouvrage, soit reconduit moyennant quelques ajustements. Bart De Wever rentrera alors à Anvers et attendra les prochaines élections. Marc Wilmots et les Diables Rouges pourront dérouler. La Belgique n'éclatera pas cet été. Il y a en ce royaume, un seul peuple, le peuple Diable Rouge.