Les indépendantistes catalans, au lendemain du non de l'Ecosse, se disaient vendredi déterminés à poursuivre leur chemin vers un référendum le 9 novembre, malgré l'opposition du gouvernement espagnol, «très heureux» du vote écossais. «Le processus catalan se sent renforcé parce que nous voyons comment un pays de l'Union européenne a pu trouver un accord pour permettre ce vote», a lancé le président catalan, Artur Mas. «Ce que nous avons vu en Ecosse et au Royaume-Uni, c'est le bon chemin», a-t-il ajouté. Alors que l'Europe avait les yeux rivés sur l'Ecosse, la Catalogne, aux premières loges, lançait une nouvelle étape vers le référendum que les indépendantistes veulent organiser sur le maintien ou non au sein de l'Espagne : le Parlement régional devait voter, dans la journée, une loi autorisant cette consultation. La réponse de Madrid, opposé au vote et conforté par le verdict des urnes en Ecosse, était attendue par le biais d'un recours devant le Tribunal constitutionnel. «Nous sommes très heureux que l'Ecosse reste avec nous», a réagi vendredi le chef du gouvernement conservateur espagnol, Mariano Rajoy, se félicitant que les électeurs «aient fait le choix entre la ségrégation et l'intégration». Dans le bourg catalan d'Arenys de Munt, tous se souvenaient de ce vote symbolique, organisé en 2009, pour l'indépendance de la région. «Il y a cinq ans, on nous disait que nous ne pouvions pas voter. Finalement, nous l'avons fait et ça a été formidable», racontait Maria Angels Gros, 39 ans, la présidente du centre culturel qui avait accueilli ce scrutin. «J'espère que nous pourrons vivre à nouveau cela le 9 novembre». Dépités, les habitants d'Arenys écoutaient pourtant avec envie les nouvelles d'Ecosse, retransmises en direct, dans le bar Infinit, par la télévision catalane. «L'important n'était pas tellement qu'ils disent oui ou non. Il est certain que nous espérions les retombées d'un oui pour la Catalogne», remarque Josep Maria Garrell, un pâtissier de 55 ans. «Mais l'important est qu'eux, ils ont pu voter, et pas nous», ajoute-t-il, avant d'avertir : «S'ils interdisent le référendum, ils feront naître des milliers d'indépendantistes de plus». A 40 kilomètres au nord de Barcelone, ce bourg de 8 000 habitants, niché entre mer et montagne, avait été le premier, le 13 septembre 2009, à organiser un référendum sur l'indépendance catalane. Le oui, massif, avait provoqué un effet domino et en deux ans, 554 municipalités avaient organisé leur propre scrutin. Cinq ans plus tard, Arenys vient de fêter cette date symbolique, sa place principale pavoisée du drapeau indépendantiste. «Pour beaucoup de gens, ces consultations ont mis sur la table la question de l'indépendance. Mais le 9 novembre ne doit pas être un Arenys de Munt bis. Les choses doivent se faire dans la légalité», remarque le maire, Joan Rabasseda, du parti indépendantiste de gauche ERC. Depuis, les aspirations à l'indépendance n'ont cessé de croître en Catalogne, privée en 2010, sur décision de la justice espagnole, d'une partie de son statut d'autonomie élargie. Dans cette région puissante du nord-est de l'Espagne, le ressentiment envers Madrid s'est nourri aussi de la crise économique, la Catalogne accusant Madrid de répartir inégalement les richesses. Face à la poussée indépendantiste, le gouvernement de Mariano Rajoy reste de marbre. A l'inverse de Londres face à l'Ecosse, il se dit déterminé à empêcher le référendum promis par Artur Mas, un conservateur allié aux indépendantistes d'ERC. Après avoir promis qu'il n'agirait que dans la légalité, Artur Mas pourrait très bientôt se retrouver dans une impasse, le Tribunal constitutionnel se préparant à déclarer son projet contraire à la Constitution. Alors qu'un oui de l'Ecosse aurait pu, selon lui, enclencher au sein de l'Union européenne un processus favorable à l'indépendance d'autres régions, le non porte un coup sévère à son projet. «J'aurais aimé que le oui l'emporte pour que s'ouvre le débat au niveau européen. Mais ce débat, nous espérons qu'il s'ouvrira en Catalogne», confie le maire d'Arenys. «Si nous avions eu un David Cameron au lieu d'un Mariano Rajoy...», soupire-t-il. «Cameron a autorisé le vote, offert des contreparties, tenté de séduire. Ici, ils ne font que nous étouffer.»