Le projet de révision constitutionnelle semble remis aux calendes grecques. Comme obtempérant à une sommation, tout le chorus des voix officielles, qui s'est égosillé à en faire la promotion, s'est subitement tu. Quelques contingences inattendues auraient-elles dicté son différé à plus ou moins lointaine échéance ? Sofiane Aït Iflis - Alger (Le Soir) - En tout cas, il est aisément observable que le projet de la révision de la Constitution est soustrait aux préoccupations officielles, du moins à celles dont il est fait état publiquement, depuis la fin des consultations menées par Ahmed Ouyahia, le directeur de cabinet de la présidence de la République. Pourtant, rien ne prédisait ce ralenti dans la cadence mise à promouvoir l'idée du parachèvement des réformes politiques promise en 2011 en accomplissant l'ultime d'entre elles : l'amendement de la loi fondamentale du pays. De la promesse faite par les uns et les autres de faire aboutir le projet durant les deux premiers mois de l'automne s'avère à présent être une chimère, quelle que soit l'option à laquelle le gouvernement se résoudra. Il y a une impossibilité calendaire à tenir cet engagement, surtout si la révision devait se faire par voie référendaire. L'article 146 du code électoral stipule en effet que «les électeurs sont convoqués par décret présidentiel 45 jours avant le date du référendum». Autrement dit, un référendum autour de la révision constitutionnelle ne peut légalement se tenir avant la mi-décembre. Et, raisonnablement, une consultation populaire autour de la révision de la Constitution est exclue avant la fin de l'année. S'il veut amender la Constitution à proche échéance, le gouvernement n'aura forcément d'autres choix que de se rabattre, comme en 2008, sur la réunion d'une conférence parlementaire. C'est-à-dire une commune session des deux Chambres du Parlement, l'APN et le Sénat. Or même dans ce cas de figure, le gouvernement sera obligé de prendre le temps nécessaire aux préparatifs y afférents, notamment l'effort à faire à l'endroit des députés et sénateurs pour les convaincre de délivrer leur quitus. Tout porte à croire, donc, que la révision de la Constitution n'interviendra pas avant 2015. D'où vient-il que la perspective soit ainsi sans projection temporelle précise ? L'explication la plus plausible tiendrait au fait que les consultations autour de la mouture du texte confiées à Ahmed Ouyahia ont raté d'être un franc succès. Elles ont même été un flagrant ratage, du moment que l'ensemble de l'opposition politique avait décliné l'invitation à se rendre à El-Mouradia. Ahmed Ouyahia s'était retrouvé, on s'en souvient, à recevoir essentiellement parmi les clientèles du régime. Ce qui, du coup, balaie la perspective d'une Constitution consensuelle. Au moment où le directeur de cabinet de la présidence de la République menait les consultations, les partis et les personnalités de l'opposition structuraient des initiatives pour les libertés et la transition démocratique. La Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (CNLTD) et le pôle des forces du changement (PFC) en sont les plus significatifs. Avec une telle netteté dans la décantation opérée, le gouvernement ne pouvait que différer son projet en attendant une conjoncture politique meilleure. C'est pour cela que d'ailleurs ni le Premier ministre Abdelmalek Sellal, ni le patron du FLN, Amar Saâdani, les deux voix qui se sont le plus exprimées sur la question, se sont tus. La révision de la Constitution serait-elle devenue le dossier que le gouvernement a choisi de garder en réserve au cas où il aurait à vivre des conjonctures politiques cruciales ?