L'affaire SwissLeaks, des malversations fiscales supposées impliquant la filiale suisse de la banque britannique HSBC, a-t-elle une incidence sur la filiale algérienne de cette banque ? Cherif Bennaceur - Alger (Le Soir) Révélée par le quotidien français Le Monde, en collaboration avec d'autres médias, une affaire d'évasion fiscale supposée, portant sur des centaines de milliards d'euros met en cause la banque britannique HSBC (Hong Kong&Shanghai Corporation) par l'intermédiaire de sa filiale suisse HSBC Private Bank à Genève. Selon les informations publiées, basées sur des données bancaires mondiales portant sur la période 2005-2007, cette affaire dénommée SwissLeaks concernerait plusieurs personnalités notamment maghrébines dont des Algériens qui détiendraient des comptes dans cette banque spécialisée dans la gestion de fortune et d'investissement. Ainsi, quelque 440 clients algériens ou associés à l'Algérie dont 10% de nationalité algérienne posséderaient des comptes numérotés à HSBC Private Bank et seraient donc suspectés de transfert illicite de devises et de fraude fiscale, pour un montant de l'ordre de 671 millions de dollars. Au-delà des conditions dans lesquelles SwissLeaks a été révélée, de l'identité et de la crédibilité des détenteurs de comptes, estimés à plus de 1 100 comptes, et de la périodicité des placements (entre 1970 et 2006) et des conséquences judiciaires et autres qui en découleront, l'affaire impacte certainement sur la réputation de la banque britannique, sur son positionnement dans le monde et notamment dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord.Or, cette affaire a-t-elle une incidence sur la filiale algérienne de HSBC ? Difficile de l'évaluer. Certes, l'existence de comptes détenus ailleurs par des personnes de nationalité algérienne ou liées à notre pays constitue une infraction à la réglementation algérienne en matière de changes. Très stricte, celle-ci interdit en effet la constitution d'avoirs mobiliers, immobiliers ou fiduciaires à l'étranger et sur la base de fonds provenant d'Algérie. Ce qui implique que les détenteurs algériens de comptes dans cette banque sont pénalement responsables, dans le cas où les avoirs aient été alimentés par le biais de la surfacturation lors de transactions courantes ou en l'absence d'autorisations de l'autorité de supervision et de contrôle bancaire et monétaire (Banque d'Algérie). Présente depuis 2008 en Algérie, à travers une succursale agréée relevant de HSBC Bank Middle East ltd (HSBME) depuis 2009 et disposant d'un nombre limité d'agences, HSBC participe essentiellement au financement des particuliers, des entreprises et du commerce extérieur. Cette banque n'active pas toutefois dans la gestion de patrimoine et de fortune et n'offre pas de prestation de banque privée. En ce sens, l'impact des malversations supputées commises au niveau de la filiale suisse sur les autres filiales dans le monde devrait être nul. En d'autres termes, le fonctionnement de la succursale algérienne ne devrait pas pâtir des errements réputés commis par l'établissement basé à Genève, en l'absence d'une interconnexion bancaire et dans la mesure où les conditions de placement dans cet établissement ne sont pas accessibles à tous les Algériens. Voire, le positionnement de HSBC Algérie ne devrait pas subir de répercussions négatives en termes de perte de confiance des clients particuliers ou corporate. Certes, la possibilité que des opérateurs économiques ou des personnalités civiles aient bénéficié d'une certaine compréhension, de la complicité directe ou indirecte d'une partie quelconque du groupe britannique peut être supposée. Ce qui doit être cependant prouvé. Et ce, au-delà du fait que la Banque d'Algérie exerce ses missions de contrôle et d'inspection de manière régulière et multiforme au niveau de l'ensemble des banques et établissements agréés et que l'éventualité de l'existence d'une fraude fiscale à partir de l'Algérie ne peut être appréhendée telle quelle. A moins cependant que les instruments et les moyens dont dispose la Banque d'Algérie ne soient insuffisants ou inopérants, malgré le renforcement du cadre réglementaire et opérationnel régissant le contrôle des changes et la lutte contre toutes formes de dilapidation de deniers. En d'autres termes, si incidence il y a sur l'Algérie, la capacité de l'évaluer reste, ce faisant, incertaine. Une incertitude qui demeure d'autant que la succursale algérienne, tenue par des considérants internes au groupe HSBC n'a pas voulu formuler de réaction, invitant à se rapprocher des services de communication et relations publiques habilités. Des services qui nous ont transmis une déclaration succincte, au demeurant neutre, du P-dg de HSBC Private Bank Suisse, Franco Morra, selon laquelle son établissement «a entamé une transformation radicale depuis 2008 afin de protéger ses services d'utilisation à des fins d'évasion fiscale ou de blanchiment d'argent». Selon le responsable de l'établissement basé à Genève, le management a opéré «une refonte complète des opérations commerciales, y compris la clôture des comptes des clients qui ne répondent pas aux standards élevés et (s')assurer d'avoir de solides contrôles de conformité sur place». En ce sens, le CEO assurera que son établissement «n'a pas d'appétit pour les affaires avec des clients ou des clients potentiels qui ne répondent pas à nos normes de conformité de la criminalité financière», en ajoutant que les informations fournies sur des pratiques commerciales qui relèvent du passé «sont un rappel de ce que le vieux modèle d'affaires de la banque privée suisse n'est plus acceptable».