Par Kader Bakou Sept années après sa création, l'orchestre El Gusto a donné jeudi dernier un concert dans son pays d'origine. Ça ressemble à un conte de fées avec un méchant troll invisible, car agissant dans l'ombre. Une jeune fée retourne dans son pays natal qu'elle n'avait pas vu depuis l'enfance. Elle entre dans une vieille échoppe cachée dans un quartier vieux de plusieurs siècles et à moitié en ruine. Un vieil artisan lui raconte une vieille histoire dans cette vieille ville au bord de la mer. L'homme était élève chez un certain cheikh, surnommé parfois «Le Cardinal». Il aimerait bien revoir ses anciens amis, mais il sait que c'est impossible, car cinquante années sont passées depuis «la grande séparation». La jeune fée a une folle idée : retrouver les anciens élèves du «Cardinal» de ce côté et de l'autre côté de la mer. Le rêve est devenu réalité ! Ainsi est né l'orchestre chaâbi El Gusto. Aujourd'hui, il est constitué d'une trentaine de musiciens et chanteurs dont El Hadi El Anka, le fils du Cardinal El Hadj M'hamed El Anka, mort en 1978 à Alger. Souvent comparé au groupe cubain Buena Vista Social Club, El Gusto réunit effectivement des artistes âgés et même très âgés (un artiste ça se bonifie avec le temps). Mais sa particularité, c'est surtout de réunir des musiciens et chanteurs algériens et français, musulmans et juifs. Logiquement, c'est en Algérie que l'orchestre El Gusto aurait dû donner son premier concert. Mais il y a ce troll agissant dans l'ombre qui voit d'un mauvais œil ce bon exemple de fraternité humaine au-delà des différences confessionnelles, politiques ou ethniques. L'orchestre El Gusto a donné son premier concert en 2007 à Marseille, en France. Depuis, il s'est produit un peu partout à travers le monde. Son concert de jeudi au Théâtre national algérien a été organisé par l'ambassade des Etats-Unis d'Amérique à Alger, dans le cadre du mois du jazz. El Gusto mérite une plus grande salle. «Nous voulons rencontrer le public algérien. Donnez-nous s'il vous plaît la chance de nous produire. Nous ne sommes pas des organisateurs de spectacles, nous sommes juste des prestataires. Si vous faites appel à nous, nous sommes partants pour faire des concerts gratuits. Il est vrai que nous nous sommes produits dans beaucoup de pays, mais ici, c'est bien que ces musiciens retrouvent l'Algérie.» Qui entendra ce cri du cœur de la fée Safinaz Bousbia ? K. B.