Les services des urgences hospitalières souffrent d'une fréquentation trop importante, voire record durant le mois de Ramadhan. Outre les «vrais» cas médicaux urgents, ces services accueillent toutes sortes de patients qui ne présentent pas forcément des signes élevés de gravité. Des cas loin d'être urgents qui, selon le ministère de la Santé, doivent être pris en charge par les services de santé de proximité. Cependant, entre le malade et ces structures, la confiance est loin d'être établie. Quelle parade face à cette situation ? Salima Akkouche - Alger (Le Soir) Il y a urgence aux urgences des services hospitaliers. Ces derniers souffriraient d'un réel encombrement en raison de leur succès. Au point où le ministère de la Santé a été contraint de réagir à travers un communiqué. Il appelle les patients dont les cas ne relèvent pas de l'urgence à se rendre dans les structures de santé de proximité. Le département de Abdelmalek Boudiaf compte même lancer une campagne de sensibilisation pour convaincre les malades de se diriger vers les polycliniques plutôt que vers les services des urgences. Le but étant de désengorger les services des urgences hospitalières pour leur permettre de prendre en charge uniquement les véritables cas d'urgence. Blessés, accidentés, insuffisants cardiaques ou rénaux..., les urgences hospitalières font face à toutes sortes de maux. Cependant, des patients qui nécessitent un changement de pansement, une injection d'insuline ou autres, certificats médicaux, indigestion ou pour n'importe quel autre simple symptôme affluent vers ces services, entraînant ainsi à perturber leur fonctionnement. Des actes qui ne nécessitent aucune intervention complémentaire, et censés être assurés par les polycliniques. Les patients n'ont pas tous leur place aux pavillons des urgences des hôpitaux. C'est le message auquel compte sensibiliser le ministère de la Santé. Ce dernier, en raison du flux que connaissent les pavillons des urgences, en particulier durant le mois de Ramadhan et après la rupture du jeûne, a d'ailleurs précisé : «Après avoir expertisé les principaux motifs de consultation, le ministère de la Santé rappelle que les services des urgences des établissements hospitaliers sont réservés, comme leur nom l'indique, aux véritables urgences et ne doivent en aucun cas devenir des centres de consultation à froid ou de prise en charge de soins infirmiers pouvant être assurés dans des structures de proximité.» Selon ce même département, 80% des cas qui se présentent aux urgences des hôpitaux «ne sont pas des urgences nécessitant une prise en charge hospitalière et peuvent valablement être assurés et pris en charge au niveau des polycliniques qui assurent toutes un service continu de 8h à 20h et pour celles assurant la garde, elles fonctionnent en H24». A Alger, par exemple, poursuit-on, il existe 84 polycliniques fonctionnant jusqu'à 20h dont 34 assurant la garde en H24. Ces structures de base et de proximité dispensent les soins de santé de base ainsi que des consultations spécialisées, assure-t-on, et elles sont à la disposition des citoyens pour toutes les consultations et les diagnostics de base affichés. «En se rendant à la polyclinique, le citoyen gagne non seulement en proximité mais fait montre d'un grand civisme envers ceux qui nécessitent réellement une prise en charge hospitalière d'urgence en n'occupant pas inutilement leur place», écrit le ministère de la Santé dans un communiqué rendu public. 500 consultations par jour aux urgences du CHU Mustapha Le pavillon des urgences du CHU Mustapha-Pacha accueille une moyenne de 500 patients par jour, selon le chiffre donné par la cellule de communication de ce CHU. «Les gens viennent consulter même pour une simple grippe chez nous, nous ne pouvons pas les refouler ou les orienter ailleurs même si notre mission est de nous occuper des traitements lourdsmais les citoyens n'ont pas la culture des polycliniques», indique-t-on. Des polycliniques équipées assurant des consultations spécialisées Slim Belkessam, conseiller au ministère de la Santé, rappelle que depuis 2014 l'ensemble des villes hospitalo-universitaires ont reçu instruction d'externaliser leurs consultations spécialisées. L'ensemble des spécialités (radiologie, cardiologie, ophtalmologie, médecine interne ou générale, des laboratoires, consultations PMI pour le suivi des femmes enceintes), dit-il, sont assurées au niveau des polycliniques. «Ces consultations spécialisées, où chaque chef de service hospitalier déploie une partie de son équipe, existaient depuis l'année dernière, maintenant nous allons veiller à améliorer leur fonctionnement», dit-il. Les prestations dispensées au niveau des CHU et des polycliniques sont de même qualité, assure-t-il. Imposer la rigueur au personnel médical Selon le ministère de la Santé, l'Algérie répond parfaitement aux normes concernant le nombre de structures de santé de proximité existantes. Soit une polyclinique pour 25 000 habitants. Manque d'organisation, indisponibilité de matériels médicaux nécessaires, démission du personnel soignant... sont autant de dysfonctionnements qui caractérisent ces structures. «J'ai accompagné ma mère pour qu'elle fasse son injection, le soir vers 21h, dans une polyclinique à Aïn Benian, nous fûmes obligées de rebrousser chemin car il n'y avait aucun infirmier pour nous prendre en charge», nous confie un citoyen. Un fait récurrent qui dissuade plus d'un de se diriger vers ces structures. Le malade préfère ainsi faire des kilomètres pour se faire une simple injection dans un service d'urgence hospitalier que d'aller vers la structure de proximité. Une situation à laquelle l'on tente de remédier, assure-t-on au ministère de la Santé, pour mettre fin aux comportements inappropriés. «Nous avons mis en place tout un programme de visites et d'inspections inopinées, établi tout au long de l'année jusqu'à ce que les gens retrouvent les bonnes références de fonctionnement et il y a également l'administration centrale qui doit jouer son rôle. Les gens doivent accepter les règles du jeu, on ne touche pas un salaire sans travailler», a indiqué M. Belkessam. Le médecin référent pour éviter le recours systématique aux urgences Le département de Boudiaf rappelle que dans le cadre des dispositions contenues dans l'avant-projet de la nouvelle loi sanitaire, «il sera fait obligation de passer par un médecin généraliste référent avant une éventuelle indication hospitalière et ce, sur la base du réseau de prise en charge intégrée de la circonscription sanitaire qui va réintroduire le concept de territoire de planification disparu depuis la suppression des secteurs sanitaires en 2007».