De Tunis, Kamel M'Rabet «S'il m'arrivait d'oublier, je n'oublierais jamais la grande sœur l'Algérie pour le soutien qu'elle ne cesse de nous accorder depuis que nous sommes confrontés au terrorisme», a dit, samedi, le Président Caïd Essebsi. Le chef de l'Etat tunisien s'adressait au peuple pour lui expliquer les raisons qui l'avaient poussé, peu auparavant, à décréter, pour un mois, l'état d'urgence dans toutes les régions du pays. Nous sommes en guerre contre le terrorisme dont la menace s'étend à tous les pays, a expliqué le chef de l'Etat tunisien dans le but de mobiliser tout le peuple et l'engager dans la lutte contre ce phénomène auquel la Tunisie n'était pas habituée. Les défis sont multiples. Au plan sécuritaire, l'Etat s'est acquitté de son devoir et continuera à le faire. Cependant, a-t-il rappelé, la lutte contre l'hydre terroriste exige des moyens matériels dont la Tunisie ne dispose pas. Dans ce contexte, il a évoqué le soutien que lui ont apporté certains pays pour parvenir à protéger une frontière longue de 5 00 kilomètres avec la Libye, pays où l'Etat n'existe pas. C'est un pays où pullulent des groupes armés en conflit et «dominé par des acteurs régionaux et internationaux au service d'agendas bien déterminés et propres à chaque acteur». Abordant les effets que pourrait avoir l'instauration de l'état d'urgence, M. Caïd Essebsi a réaffirmé l'attachement des dirigeants au respect des libertés, en particulier la liberté d'expression et de presse, et au respect des droits de l'Homme. Toutefois, il est indispensable, a-t-il dit, de prendre en considération les menaces terroristes qui pèsent sur la Tunisie lors de l'exercice de ces libertés. Il a même prévenu que si l'attentat de Sousse venait à connaître une récidive, ce serait la chute, voire la disparition de l'Etat. L'attentat terroriste de Sousse a, par ailleurs, laissé des séquelles. Au niveau administratif, des mesures disciplinaires ont été prises contre des cadres chargés de la sécurité régionale et du gouverneur (wali) qui a été, aussi, démis de ses fonctions. Aussi bien le ministre de l'Intérieur que le chef du gouvernement avaient parlé de défaillances sécuritaires. Cependant, la purge s'arrête-t-elle à ce niveau ou touchera-t-elle les principaux responsables de la sécurité dans le pays ? Ainsi, se poursuivra-t-elle avec le limogeage du ministre de l'Intérieur et du secrétaire d'Etat à la sécurité ? Depuis son indépendance en 1956, la Tunisie a vécu à deux reprises sous le régime de l'état d'urgence. En janvier 1978, suite aux émeutes de ce qui est appelé le «Jeudi noir», Bourguiba l'avait décrété, pour deux mois, tout en emprisonnant toute la direction légitime de la centrale syndicale. La deuxième fois, c'était en 2011 quand la Tunisie sortait de la «révolution» qui a précipité la fuite de Ben Ali. Le pays a vécu une période sombre marquée par de nombreux assassinats – à ce jour non encore élucidés — et n'en fut délivré qu'en mars 2014. L'actuel état d'urgence instauré, selon un mois, sera-t-il levé le 2 août ? Selon l'article 80 de la Constitution, l'état d'urgence est décrété par le président de la République en cas de péril imminent menaçant les institutions de la nation, la sécurité et l'indépendance du pays et entravant le fonctionnement régulier des pouvoirs publics.