Le fils du général Benhadid a quitté jeudi soir la maison d'arrêt d'El-Harrach suite au verdict rendu quelques heures plus tôt par le tribunal de Bir-Mourad-Raïs. Benhadid Amar-Nassim a été condamné à une année de prison avec sursis et 50 000 DA d'amende au terme d'un procès chaud. La famille était ravie de retrouver Nassim alors que la défense juge trop lourde la décision de fixer la peine à une année de prison avec sursis pour «des faits qui n'existent pas». Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Au cours de leur plaidoirie, Mes Mecheri et Bourayou ont, en effet, relevé le lien étroit existant entre l'affaire du jeune prévenu et de son père, le général Benhadid, arrêté à la fin du mois de septembre dernier pour atteinte «à l'image et au prestige de l'ANP», suite à des propos tenus à la radio Maghreb M et El-Magharibia à l'encontre du frère du président de la République et le chef d'état-major de l'armée algérienne. «Oui, il y a un lien entre les deux dossiers. Nous refusons de les politiser mais il est clair qu'il y a eu une volonté de se venger du père. Les faits parlent d'eux-mêmes», affirme Me Bourayou en s'adressant à la présidente de la cour de Bir-Mourad-Raïs. Les faits : le fils Benhadid a été poursuivi et arrêté le 29 septembre dernier pour port d'armes sans autorisation. Ce jeudi, il a été jugé selon la procédure du flagrant délit qui implique que ce dernier se trouvait en possession d'une arme à feu alors qu'il n'en était rien. Le prévenu déclare : «Mon père se trouvait en voyage. J'étais attiré par son arme. Je l'ai prise du coffre où elle se trouvait pour l'admirer.» «Mais pourquoi l'avoir gardée ?» interroge la présidente de la cour. «Elle me plaisait», répond calmement Nassim. Il poursuit : «Au moment où elle se trouvait entre mes mains, des amis m'ont appelé pour m'inviter à déjeuner, très vite, j'ai tenté de la dissimuler dans le jardin d'un voisin.» Alors qu'il partage son repas avec d'autres jeunes, son frère lui téléphone et l'informe du retour de son père. «J'étais pressé d'aller le voir, j'ai complètement oublié l'arme», dit-il. La cour appelle deux témoins à la barre : deux jardiniers venus simplement déclarer avoir trouvé l'arme dissimulée dans un journal parmi les pots de fleurs. L'un d'eux avait alerté les services de sécurité. L'enquête remonte jusqu'à Nassim. Le 17 septembre, il est écouté par les services de sécurité puis relâché. Trois jours plus tard, le 20 septembre, se déroule l'expertise. Son père est entendu comme témoin. Dix jours après, son père est arrêté pour ses propos sur Saïd Bouteflika et Gaïd Salah. Le fils est, à son tour, convoqué et placé sous mandat de dépôt. «Il n'y a pas eu de flagrant délit, de plus, le jeune homme s'est rendu à la police de son plein gré. Normalement, il devait être présenté devant la justice huit jours après son arrestation comme le veut la procédure, mais ils l'ont gardé un mois en prison», martèle Me Bourayou. Plus grave, il indique à la présidente de la cour que le dossier qui a été remis à cette dernière ne contient pas un document essentiel : le procès-verbal, un fait inédit qui confirme, encore une fois, que «toutes les procédures ont été bafouées et c'est cette situation qui a politisé une affaire banale». «Combien de cas similaires avez-vous vu défiler Mme la présidente ? Allez-vous accepter toutes ces irrégularités ?» interroge Me Bourayou. La présidente écoute la plaidoirie sans réagir. Dans la salle, des membres de la famille du général retiennent leur souffle. La peur et la douleur se lisent sur le visage de la mère, du frère, de la sœur... Le procureur de la République vient en effet de requérir deux ans de prison ferme et 50 000 DA d'amende. Me Mecheri à son tour. La demande du procureur de la République est jugée «étrange». Ses propos sont lourds. «Le citoyen algérien demande une justice équitable, si elle est utilisée à tort, ce n'est plus une justice, si elle s'écarte de sa mission ce n'est pas bon. Il faut respecter la loi et être neutre, nous demandons à la justice d'être forte, et la force, c'est le pardon. Evitons de politiser une affaire banale. Soyez forts», hurle Me Mecheri. La présidente de la cour veut réagir mais elle se maîtrise très vite. Les deux ténors du barreau s'échangent des regards et réclament l'innocence de leur client. Dignement, le fils Benhadid quitte la salle encadré par des policiers qui, selon la procédure, accompagnent tous les prévenus. Il évite de se retourner pour ne pas croiser le regard de sa famille éprouvée par son arrestation et celle de son père. Sa mère en larmes quitte, à son tour, la salle. Il est un peu plus de midi. Le verdict sera prononcé dans l'après-midi. Il est près de 17 heures. La justice a tranché. Nassim rentrera chez lui ce soir mais la joie de la famille est incomplète. Son père, lui, demeure en prison. L'instruction de son affaire n'est même pas terminée, apprend-on auprès de la défense qui, doit-on le rappeler, avait plaidé la nullité de la procédure en se basant notamment sur le fait que le dossier remis par le juge d'instruction ne comporte pas de plainte. Lors d'une conférence de presse, Mes Mecheri et Bourayou avaient déclaré que le général avait fait l'objet d'un «guet-apens» tant les conditions de son arrestation étaient rocambolesques. La famille Benhadid devra sans doute patienter davantage avant que du nouveau ne survienne dans l'affaire.