Un pourvoi en cassation a été introduit hier matin dans le dossier du général Hassan, condamné ce dimanche à 5 ans de prison par le tribunal militaire d'Oran. Le verdict a scandalisé l'opinion qui s'est exprimée à travers plusieurs voix dont celle du général Nezzar lequel a cependant apporté une révélation de taille à même de remettre toute l'affaire en question pour peu qu'une volonté de faire éclater la vérité soit entreprise. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Cette volonté, on le sait, ne peut émaner que des plus hautes autorités du pays, du président de la République même puisque, selon Nezzar, il est détenteur d'une lettre signée par le général Toufik au moment où il était encore en fonction dans laquelle ce dernier affirme l'entière responsabilité des faits reprochés à son ancien collaborateur. Les propos de l'auteur de la révélation sont sans équivoque : «Alors qu'il était encore en service, le général Toufik a adressé une correspondance au président de la République pour expliquer les tenants et les aboutissants de cette affaire. Il a souligné qu'en tant que chef hiérarchique direct du général Hassan, il était responsable de tout ce qui pouvait être reproché à ce dernier et qu'en conséquence, il en assumait l'entière responsabilité. Il n'y a pas eu de réponse à ce jour» L'information relevait jusque-là du domaine secret. Naturellement. Mais aujourd'hui, elle relève du domaine public. Logiquement, elle devrait amener les tenants du dossier à se pencher sur ce point nodal, ce pavé ou du moins enclencher des recherches plus vastes auprès des principaux concernés puisque c'est entre leurs mains que se situent toutes les informations. L'on comprend mieux d'ailleurs la démarche de Me Mokrane Aït Larbi qui, en défenseur averti, a mis le doigt sur l'élément principal pouvant conduire à l'éclatement de cette vérité tant réclamée par les avocats du général Hassan. Me Mokrane Aït Larbi avait compris que seul le témoignage du chef hiérarchique direct de son client pouvait faire la lumière sur cette affaire préférant se garder de toute déclaration même durant toute la semaine qui a précédé le procès dans l'espoir de pouvoir mener à bien la lourde entreprise dont il était en charge. Au lendemain du verdict, cet avocat informe l'opinion, d'un ton amer et scandalisé, que le tribunal militaire d'Oran avait rejeté la convocation du général Toufik. Le général Nezzar saisit la balle au vol et l'envoie de l'autre côté de la cour de la présidence de la République. Elle est désormais chez Bouteflika, le premier magistrat du pays auquel Nezzar lance un appel afin qu'il «mette un terme» à la situation qui prévaut dans le pays. Inévitablement, le procès, le verdict qui l'a sanctionné, et la manière même dont a été ficelée l'affaire dès son début ont été perçus comme des éléments attestant de la dérive en cours. «Il est curieux, écrit Nezzar à ce sujet, que ce procès intervienne à ce moment précis où des turbulences sont enregistrées au plus haut sommet de l'Etat, la maladie du Président, la course effrénée pour le pouvoir, la lutte des clans (...) quelque chose va mal dans la maison Algérie (...) le Président doit y mettre un terme». Et voilà qu'il rejoint involontairement l'appel du groupe des 16 qui avaient introduit une demande d'audience au Président Bouteflika afin d'attirer son attention sur toutes ces dérives. La demande est restée lettre morte. Selon les initiateurs de cette demande, le premier responsable du pays est volontairement isolé de la réalité par un groupe occulte. Difficile de s'avancer sur une quelconque piste envisageant une réaction du premier magistrat du pays au sujet de la révélation de Nezzar. Pourtant, et à en croire la même source, les poursuites dont faisait l'objet le général Hassan «n'auraient jamais dû relever du domaine pénal et auraient dû se limiter à l'aspect disciplinaire». Sachant les risques qu'il encourt, Me Mokrane Aït Larbi a accusé le tribunal militaire d'Oran d'avoir «chargé» le général Hassan en convoquant deux témoins controversés comme témoins à charge : un «grand trafiquant qui fait l'objet de plusieurs mandats d'arrêt et un officier mis à la retraite par l'accusé pour des raisons que je ne veux pas évoquer». Le trafiquant, faut-il le souligner, a été condamné pour deux affaires de trafic de drogue. Il doit comparaître dans deux autres dossiers. L'avocat, lui, sait qu'il a pris des risques en transgressant la règle qui interdit à quiconque, la défense y compris, de commenter ou rapporter le déroulement des procès à huis clos, surtout dans les tribunaux militaires. La gravité des faits semble l'y avoir contraint. Comment pourrait-il en être autrement ?