Des mouvements de l'opposition syrienne et certains groupes armés doivent se réunir mardi et mercredi à Ryadh, capitale saoudienne, afin de bâtir une plateforme commune en vue des prochains pourparlers de paix avec Damas. Quelque 85 représentants de l'opposition, dont une quinzaine issus de groupes armés, devraient être présents à la réunion, dont sont exclues les organisations terroristes, comme le groupe radical autoproclamé «Etat islamique» (EI/Daesh) et le Front Al-Nosra, la branche syrienne d'Al-Qaïda, selon des sources de l'opposition. Les organisations kurdes, présentes dans une partie du nord de la Syrie, n'ont également pas été invitées à ces discussions, qui pourraient se poursuivre jusqu'à jeudi. Le 21 novembre, l'émissaire de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura, avait annoncé que l'Arabie Saoudite allait accueillir à la mi-décembre une réunion rassemblant des groupes armés syriens et des opposants politiques au gouvernement syrien. La réunion de Ryadh, la première du genre depuis le début du conflit syrien il y'a plus de quatre ans, doit permettre à l'opposition d'arriver plus unie aux prochaines discussions pour une sortie de crise en Syrie. A la mi-novembre à Vienne, 17 pays — dont les principaux acteurs engagés dans la crise syrienne comme les Etats-Unis, l'Iran et la Russie — avaient adopté une feuille de route pour une transition en Syrie. Les membres de ce groupe international de soutien à la Syrie ont fixé un calendrier qui prévoit une rencontre d'ici au 1er janvier entre représentants de l'opposition syrienne et du régime, la formation d'un gouvernement de transition dans les six mois et l'organisation d'élections d'ici 18 mois. De profondes divergences subsistent entre l'opposition syrienne sur l'avenir de Bachar al-Assad dans le cadre d'une telle transition. Une partie de celle-ci exigeant le départ du président syrien comme préalable à toute discussion. Pour Samir Nachar, membre de la Coalition nationale syrienne, principale composante de l'opposition basée à Istanbul, la mission s'annonce difficile et très risquée: parvenir à une plateforme commune et claire sur l'avenir de la Syrie, la transition et l'attitude à l'égard du (président syrien, ndlr) Bachar al-Assad. Il a dit «redouter que certains participants proches des pays soutenant le régime de Damas (...) ne réclament le maintien de Bachar durant la transition, ce qui risque de mettre en péril la réunion». De son côté, Ahmed Ramadan, également membre de la Coalition nationale, a déclaré que les négociations n'auront lieu qu'«après avoir convenu du principe et de la date du départ d'al-Assad». Au contraire, l'oppostion tolérée basée en Syrie estime que le sort du président al-Assad doit être décidé par le peuple. «Il y a une certaine entente internationale pour que cette question soit décidée par les Syriens», a déclaré Hassan Abdel Azim, chef Comité de coordination nationale pour les forces du changement démocratique (CCND), principale organisation de l'opposition de l'intérieur. Les Occidentaux, dont Londres, Paris et Washington, qui ont toujours affiché leur soutien à l'opposition, prônent également un départ rapide du président syrien, en dépit d'une certaine souplesse dans leur position après les attentats meurtriers à Paris, revendiqués par le groupe terroriste autoproclamé «Etat islamique» (Daesh/EI) et qui ont fait 130 morts. Le secrétaire d'Etat américain, John Kerry, s'était rendu la semaine dernière à Abou Dhabi où il a eu des entretiens avec des responsables émiratis et saoudiens pour chercher un moyen d'unifier l'opposition. Bachar al-Assad a récemment souligné qu'il ne pouvait y avoir de calendrier de transition prévoyant des élections en Syrie tant que des régions du pays étaient contrôlées par des groupes terroristes comme Daesh. «Ce calendrier pourra démarrer une fois qu'on aura commencé à vaincre le terrorisme. Vous ne pouvez rien obtenir politiquement tant que vous avez des terroristes qui s'emparent de nombreuses zones en Syrie», a-t-il dit. Le chef de la diplomatie syrienne, Walid Mouallem, qui assure que Damas est prête à participer aux discussions préliminaires proposées par l'ONU afin de préparer une conférence de paix, a déclaré, pour sa part, compter sur la Russie et l'Iran pour amener l'Occident à comprendre ce qui se passe en Syrie. Depuis 2011, la crise en Syrie a fait au moins 250 000 morts et des millions de réfugiés, selon l'ONU. Selon un responsable iranien, Téhéran a «le devoir de réduire les tensions» entre Moscou et Ankara, l'Iran «a le devoir de réduire les tensions» actuelles entre la Russie et la Turquie, a déclaré Ali Akbar Velayati, conseiller diplomatique du guide suprême Ali Khamenei, cité hier par l'agence officielle Irna. «Nous ne devrions pas prendre parti et nous avons le devoir de réduire les tensions entre ces deux pays» voisins de l'Iran, a déclaré M. Velayati. Selon lui, «il n'est pas bon d'avoir de nouvelles tensions venant s'ajouter à celles déjà existantes dans la région». La destruction le 24 novembre d'un bombardier russe par l'aviation turque à la frontière syrienne a déclenché une grave crise dans les relations entre Ankara et Moscou, accompagnée d'accusations de part et d'autre. Mercredi, Moscou a accusé nommément le président turc Recep Tayyip Erdogan et sa famille de profiter de la contrebande de pétrole à laquelle se livre l'organisation terroriste Daesh en Syrie. Le président Erdogan avait réagi en dénonçant des «accusations immorales» de la Russie et mis en cause en retour la supposée complicité de Moscou dans ce trafic. Les accusations de Moscou contre Ankara ont été relayées à Téhéran, provoquant la colère du président Erdogan qui, par téléphone, a averti son homologue iranien Hassan Rohani que l'Iran paierait «le prix fort» si elles devaient se poursuivre. L'Iran et la Russie entretiennent d'étroites relations économiques et soutiennent le régime du président syrien Bachar al-Assad, accusé le 19 novembre par le président Erdogan d'être «un terroriste d'Etat». Selon M. Velayati, la question du maintien du président Assad au pouvoir est «la ligne rouge» à ne pas dépasser par ceux qui s'opposent à lui dans son pays et à l'étranger. La Turquie a longtemps été accusée d'être complaisante, voire d'aider les groupes rebelles radicaux qui combattent le régime de Damas.