De notre envoyée spéciale à Ghardaïa, Rym Nasri La réussite des exploitations agricoles privées dans la wilaya de Ghardaïa est un exemple à dupliquer à travers les différentes régions du pays, notamment celles du sud. Seulement, l'absence de l'alimentation en électricité, la difficulté d'écouler les différents produits et certaines lenteurs administratives continuent à entraver les efforts des investisseurs et agriculteurs. Indispensable pour le pompage de l'eau pour l'irrigation, l'électricité fait défaut dans les exploitations agricoles dans la nouvelle circonscription administrative d'El Menea au sud de Ghardaïa. Si les pouvoirs publics misent sur le recours aux panneaux photovoltaïques pour faire face à ce problème, les investisseurs, eux, ne sont pas de cet avis. Nombre d'entre eux estime et que cette solution demeure inaccessible du fait de l'immense investissement qu'elle nécessite. Selon le gérant d'une exploitation agricole privée à Hassi El Gara, à 50 km d'El Menea (Ghardaïa), Mohamed Ouchefenou, l'installation des panneaux photovoltaïques coûte cinq millions de dinars par fourrage. Un investissement qu'il qualifie d'«excessivement cher». Soulignant que 99% des problèmes rencontrés par les investisseurs agricoles dans la région sont d'ordre énergétique, il précise que l'intégralité de son exploitation de 200 hectares fonctionne avec six groupes électrogènes. «Chaque groupe consomme deux millions de centimes par hectare par mois», précise-t-il encore. Une somme «assez considérable» qui, pour lui, pourrait être largement réduite avec l'installation du réseau électrique. Même son de cloche chez un autre investisseur qui gère une exploitation agricole étendue sur 400 hectares. «Mon exploitation compte 2 000 palmiers, 5 000 poiriers, 1 000 orangers et 600 amandiers ainsi que deux pivots de blé dur et de maïs. Toutes ces plantations exigent l'utilisation de trois groupes électrogènes pour assurer leur irrigation», dira Ahmed Kheda. Envisageant l'extension de son exploitation, il estime que l'accordement au réseau électrique est indispensable. L'option des panneaux photovoltaïques est toutefois exclue d'autant plus que, dit-il, «les pompes immergées ne fonctionnent pas avec le système photovoltaïque». C'est justement sur le problème de l'alimentation en électricité que le ministre du secteur a été interpellé à maintes reprises par les agriculteurs, lors de sa visite de travail, lundi dernier dans la wilaya de Ghardaïa. Flegmatique, Sid Ahmed Ferroukhi dira que «personne ne peut nier les efforts fournis dans ce domaine». Il rappelle à cet effet, que plus de 400 km d'électrification rurale ont touché plusieurs périmètres agricoles dans cette même wilaya. Poursuivant sa visite de travail de deux jours dans la wilaya de Ghardaïa, le ministre de l'Agriculture, du Développement rural et de la Pêche a insisté, hier, sur l'intégration des énergies renouvelables dans les différents investissements des régions du sud, notamment dans les zones où les énergies classiques sont absentes. «Il faut concrétiser les recherches en matière d'énergies renouvelables sur les terrains agricoles», souligne-t-il, lors de son escale à l'Unité de recherche en énergies renouvelables dans la localité de Noumeret (12 km de Ghardaïa). Selon lui, il est question de créer des passerelles entre le secteur de l'agriculture et les unités de recherche en énergies renouvelables afin de concrétiser le programme gouvernemental de mise en valeur d'un million d'hectares dans les zones sahariennes avec l'appui des énergies éoliennes et solaires, notamment pour la mobilisation des ressources hydriques. De nouvelles formes de commercialisation à développer Rencontrés dans les différentes exploitations agricoles visitées notamment au sud d'El-Menea et à Hassi-Lefhal (120 km au sud de Ghardaïa), les agriculteurs ont soulevé plusieurs problèmes. Ils se sont plaints de l'absence d'accès aux exploitations agricoles et des lenteurs administratives, notamment pour l'obtention des autorisations de forages qui, selon eux, «freinent les projets et les investissements». Autre problème signalé : la commercialisation de leur production. A ce propos, Sid Ahmed Ferroukhi assure que des mesures vont être prises pour écouler les produits agricoles. «Plusieurs formes de commercialisation sont à développer, notamment les systèmes de coopératives, les systèmes de commercialisation moderne la contractualisation ainsi que la transformation», dit-il. Pour lui, les industries de transformation peuvent se mettre en place et être encouragées notamment dans «les régions lointaines des centres de consommations de frais». Il rappelle ainsi que nombre de dispositifs de soutien, mesures et avantages pour les investissements ont été mis en place. Le ministre rappelle également les nombreuses mesures d'accompagnement techniques, financiers, réglementaires et organisationnelles, préconisées par l'Etat pour permettre l'émergence d'une agriculture durable et équilibrée dans les zones qui recèlent un potentiel agricole important. «Aujourd'hui, la wilaya de Ghardaïa joue un rôle dans le développement de l'investissement intégré dans le secteur de l'agriculture», dit-il. La preuve : plus de cinquante mille hectares ont été attribués dans cette wilaya aux investisseurs et jeunes exploitants. «A ce jour, près de 400 000 hectares ont été distribués, ce qui représente l'objectif tracé pour 2016 et 2017, avec un retour d'investissement attendu de plus de 500 milliards de dinars», détaille-t-il. Une démarche qui, poursuit-il, va booster le secteur de l'agriculture et ouvrir de nouvelles perspectives aux filières du lait et des céréales et tous autres produits dont, précise-t-il, «nous devrons réduire l'importation». Promettant l'ouverture d'accès à plusieurs exploitations agricoles, il affirme également que plus de soixante opérations de réalisation de forages ont concerné quarante mille hectares dans la wilaya de Ghardaïa afin dit-il, «de renforcer l'agriculture existante». S'agissant des jeunes exploitants, Ferroukhi dira qu'ils ont déjà bénéficié de cinq périmètres et cinq autres périmètres leur seront attribués au cours de l'année 2016. Ghardaïa, la première à commercialiser le lait frais en sachet Le ministre de l'Agriculture, du Développement rural et de la Pêche semble apprécier le moindre effort d'investissement dans son secteur. La visite de la mini-laiterie «Noor» à Metlili située à 48 km au sud de Ghardaïa, ce lundi en fin d'après-midi, en est la preuve. Créée en août 2014, cette entreprise familiale assure à elle seule l'alimentation de toute la commune de Metlili. Elle produit ainsi entre 6 000 à 7 000 sachets de lait en deux jours. Selon Sid Ahmed Ferroukhi, Ghardaïa est la première wilaya à avoir commercialisé du lait frais en sachet. «Même si ce n'est qu'une mini-laiterie, aujourd'hui, la wilaya compte neuf laiteries», se réjouit-il. Une convention pour la formation des agriculteurs Une convention au profit des agriculteurs a été signée entre l'université de Ghardaïa et la Direction des services agricoles (DSA) hier mardi, au sein même d'une exploitation agricole privée dans la commune de N'tissa à 6 km de Ghardaïa. Portant sur la formation des agriculteurs sur terrain, cette convention permettra également aux étudiants d'effectuer des stages pratiques sur des exploitations agricoles encadrés par les spécialistes de la DSA. A cet effet, le ministre de l'Agriculture a appelé le centre de formation de Menea, le centre de l'agriculture saharienne et le centre des grandes cultures à «se réunir et se concerter sur un plan de travail pour mener cette formation et cet accompagnement technique sur le terrain».