Ban Ki-moon sera aujourd'hui dans les camps de réfugiés sahraouis à Tindouf. Cette visite tant attendue pour l'évolution du dossier de décolonisation du Sahara occidental intervient dans un climat de grande tension suscitée par le refus du Maroc de recevoir le Secrétaire général des Nations-Unies et de le laisser atterrir dans les territoires occupés d'El-Ayoune. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Officiellement, la position du roi Mohammed VI est dictée par un calendrier chargé devant le mener hors du Maroc. Une absence qui n'explique cependant pas le fait qu'aucune autorisation n'ait été délivrée pour l'atterrissage de l'avion qui devait transporter Ban Ki-moon à El-Ayoune où il désirait particulièrement se rendre pour s'enquérir lui-même, avait-il déclaré, de la situation des droits de l'Homme. Cette zone est fréquemment secouée par des émeutes de Sahraouis en faveur de l'indépendance, et violemment donc réprimées par les forces d'occupation marocaine. Le souhait du SG de l'ONU de se rendre dans ce territoire avait provoqué la colère du roi qui a ainsi entrepris de nombreuses démarches et manoeuvres visant sinon à annuler ce déplacement, du moins à le reporter au mois de juillet prochain. Cette date n'est pas fortuite, car elle se rapproche de l'expiration du mandat de Ban Ki-moon (en décembre 2016) qui ne peut ainsi inclure les résultats de sa visite dans le rapport qu'il doit présenter au Conseil de sécurité. Il est de tradition que ce rapport soit présenté annuellement au mois d'avril, et c'est ce qui se fera cette année encore en dépit de l'annulation de la visite du Secrétaire général des Nations-Unies à El-Ayoune mais aussi à Rabat, où le roi affirme qu'il ne se trouvera pas cette semaine. Le Maroc encaisse ainsi un très mauvais point surtout que cette visite tant controversée a été soutenue par tous les membres du Conseil de sécurité. Le déplacement est, par contre, très attendu par les Sahraouis en quête d'une avancée dans le règlement du dossier d'autant que Ban Ki-moon affiche une réelle intention d'œuvrer pour une relance efficace du processus devant mener à l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara occidental. En visite à Alger pour préparer la visite de Ban Ki-moon, Christopher Ross avait fait état de l'attention particulière que le SG de l'ONU accordait à cette question qui nécessite «une solution urgente». «La persistance du conflit du Sahara occidental pourrait constituer une bombe à retardement», avait-il ajouté, précisant que son règlement devait passer par une relance des négociations entre le Front Polisario et le Maroc. Pour l'heure, l'option de voir les deux parties à nouveau réunies autour d'une table de négociations paraît très peu probable, mais il est difficile, par contre, de dire jusqu'où le Maroc peut pousser sa logique de blocage en raison des pressions internationales auxquelles on assiste. La plus spectaculaire concerne bien sûr la récente annulation par la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) de l'accord sur la libéralisation du commerce des produits agricoles conclus en mars 2012 entre le Maroc et l'UE. En même temps, on assiste à une demande grandissante d'élargir les prérogatives de la MINURSO (Mission des Nations-Unies pour le référendum au Sahara occidental) à la préservation des droits de l'Homme. Enfin, on peut imaginer l'effervescence qui règne dans les camps de réfugiés des Sahraouis à Tindouf où les responsables espèrent que «cette visite marquera un tournant et qu'avant de quitter les Nations-Unies, Ban Ki-moon participera à faire avancer le processus qui réglera le dossier de la dernière colonie dans le continent africain».