Nouveau rebondissement dans l'affaire Saipem-Sonatrach, du côté de la justice italienne : la Cour suprême est montée au créneau au moment où on ne s'y attendait pas. L'ex-PDG de l'ENI (Paulo Scaroni) — ENI, groupe italien pétrolier, maison-mère de Saipem —, qui était en poste lors du déclenchement de cette énorme affaire de corruption internationale, sera de nouveau au banc des accusés. Terrible coïncidence : la décision de la Cour suprême italienne a été annoncée le... 24 février 2016, jour anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures en Algérie. Le 2 novembre dernier, les juges de Milan avaient décidé de relaxer l'ex-PDG de l'ENI, considérant qu'il n'y avait pas de preuves suffisantes montrant son implication dans cette affaire de corruption entre l'Italie et l'Algérie. Pour rappel, le procès Saipem-Sonatrach, qui s'était rouvert le 2 décembre 2015 à Milan, avait été renvoyé au 25 janvier 2016. Dans cet énorme scandale, il est question notamment de pots-de-vin pour un montant de 200 millions de dollars versés par les Italiens à des intermédiaires et des dirigeants algériens : Bedjaoui Farid and Co, Chakib Khelil, etc. Le groupe pétrolier italien ENI — tutelle de Saipem— avait été mis en cause dans une affaire de pots-de-vin. Quelques années en arrière, le 7 février 2013, le parquet de Milan avait ouvert une enquête pour «corruption internationale» visant le directeur général du groupe pétrolier italien ENI, dans le cadre d'une affaire de pots-de-vin qui auraient été versés en Algérie. Toute la presse internationale, ainsi que les journaux algériens l'ont largement évoquée, à longueur de colonnes. Les bureaux de l'ENI et le domicile de son directeur général avaient été perquisitionnés. Pour s'adjuger huit contrats de travaux dans les projets algériens du gazoduc Medgaz et du gisement Menzel Ledjmet Est, évalués à 11 milliards de dollars (8,2 milliards d'euros), ENI et sa filiale d'ingénierie Saipem (détenue à hauteur de 42,93%) auraient versé à une société de Hong Kong, Pearl Partners Limited, appartenant elle-même à un intermédiaire franco-algérien, Farid Bedjaoui, neveu de Mohamed Bedjaoui, ancien ministre des Affaires étrangères et ancien président du Conseil constitutionnel, la somme de 197 millions d'euros. Chakib Khelil revient au-devant de la scène en... Italie Dans un communiqué qui avait été diffusé le même jour, ENI et son directeur général se sont dits «étrangers» aux enquêtes visant les activités de la Saipem en Algérie. Ils rappellent que lorsque les soupçons se sont portés sur la société d'ingénierie fin 2012, ils ont exigé une «rupture» dans le management de la Saipem, traduite par la mise à l'écart des cadres incriminés. «L'ENI, avait conclut le communiqué, a fourni et fournira une coopération maximale à l'enquête.» Selon les informations rendues publiques par la presse italienne, et non contredites, l'enquête du parquet de Milan porte sur plusieurs grands contrats conclus par la Saipem avec Sonatrach avant 2010, date de l'arrestation de son ancien PDG par les autorités algériennes. Le parquet de Milan avait déjà ouvert en avril 2011 une enquête pour corruption présumée autour des activités de Saipem en Algérie. Cette décision inattendue de la Cour suprême italienne a mis le Parquet de Milan en difficulté, car ce dernier en disculpant l'ex-PDG de l'ENI, Paulo Scaroni, épargnait indirectement l'ex-ministre algérien de l'Energie, Chakib Khelil. En fait la Cour suprême transalpine replace ce «couple» au-devant de la scène judiciaire. Est-ce à dire que le tribunal de Milan reconsidérera l'ensemble de l'enquête ? Pas si sûr... Le procès reprend à Milan le 21 mars. Chakib Khelil est de nouveau dans la tourmente au moment où le pouvoir à Alger fait tout pour le blanchir, tout en enterrant définitivement les grands scandales de corruption, les relations politiques, économiques et commerciales entre Alger et Rome risquent de nouveau d'être mises à mal, surtout du fait de la partie algérienne.