Le projet du géant allemand en Algérie revient de nouveau au-devant de la scène à la faveur de la récente visite d'une délégation de hauts responsables de la firme qui ont été reçus par le ministre de l'Industrie, Abdesselam Bouchouareb. C'est un projet qui semble avoir emprunté, dès les premières annonces, des chemins tortueux où se sont entrecroisées les déclarations, les intentions et en filigrane les ambitions. Entre la détermination de Sovac, le représentant officiel de Volkswagen, à créer une unité d'assemblage et des démarches en sourdine en vue d'une nouvelle redistribution des cartes dans le marché de l'automobile national, en cours d'exécution, l'écheveau s'avère difficile à démêler. Nous revenons ci-après sur les principales étapes de ce projet. Mercedes au lieu de VW - La toute première annonce d'un projet d'usine de Volkswagen a été faite vers la fin de l'année 2015 par le ministre de l'Industrie tout en précisant que des discussions seront entamées au cours de la visite officielle du Premier ministre en Allemagne qui est intervenu en début d'exercice courant. - 7 janvier 2016, cinq jours avant le déplacement de la délégation algérienne à Berlin et dans le site internet TSA, le patron de Sovac, Mourad Oulmi, dévoile l'existence d'un projet d'usine que réalisera Sovac «avec l'assistance technologique de Volkswagen» dans la wilaya de Relizane et qui emploierait 5 300 personnes. Les Algériens apprendront aussi que 3 modèles seront montés dans cette unité, en l'occurrence, VW Polo Classique, Skoda Octavia et VW Amarok. - 12 janvier 2016, le projet était évoqué lors de la visite du Premier ministre, Abdelmalek Sellal, et le groupe allemand aurait confirmé son engagement et surtout son choix de son partenaire, à savoir Sovac. De même qu'il aurait exigé le bénéfice des avantages fiscaux et parafiscaux accordés aux constructeurs français, Renault et Peugeot. Mais contre toute attente, le communiqué final sanctionnant la visite du Premier ministre ne mentionnera nulle part les résultats des discussions avec les représentants de Volkswagen qui étaient, du reste, accompagnés du P-dg de Sovac. En revanche, il fera état d'un accord avec l'autre marque germanique, Mercedes, pour la réalisation d'une unité de fabrication de la pièce de rechange. Un dossier sans suite - 29 février dernier et au cours d'un débat en marge du salon Equip Auto à Alger et prenant à témoin le directeur des investissements au ministère de l'Industrie présent dans la salle, Mourad Oulmi précisera qu'un dossier a été déposé auprès des services compétents du département de Bouchouareb et qu'il est toujours en attente de l'agrément nécessaire au lancement des travaux. - 8 mars 2016, Une délégation du groupe Volkswagen est reçue par le ministre de l'Industrie qui rappellera les «conditions à remplir», notamment «l'engagement du constructeur à prendre des participations dans la société mixte à constituer à hauteur de 49% contre une part majoritaire de 51% qui sera détenue par les associés publics et/ou privés algériens». Abdesselam Bouchouareb affirmera par ailleurs que «Volkswagen a la volonté de produire plusieurs types de véhicules comme Seat et d'autres marques». Le même jour et toujours dans le même support médiatique (TSA), le P-dg de Sovac réitère la détermination de son groupe à «réaliser ce projet et à participer à la mise en place d'une industrie automobile dans notre pays... L'objectif est de lancer la production de véhicules en 2017». - 9 mars et depuis Annaba, le ministre de l'Industrie tranchera fermement : «N'entrera en Algérie que le constructeur qui accepte d'avoir des participations dans le capital. Nous ne permettrons pas à une marque étrangère de venir faire le montage à travers une société commerciale locale, c'est l'entreprise mère qui doit être impliquée directement dans le projet. C'est ce que nous avons fait avec Renault et Peugeot et c'est ce que nous avons dit hier (ndlr, mardi 8 mars) aux représentants de Volkswagen.» Sovac doit revoir sa copie Ceci étant, que devra-t-on retenir de cet imbroglio autour d'un projet pas comme les autres ? Est-ce que la démarche publique de Sovac constituerait une gêne pour des actions discrètes menées en parallèle pour le supplanter ? Volkswagen est-il aujourd'hui et sans le vouloir, otage d'un conflit d'intérêts autour de sa représentation dans notre pays ? Volkswagen est-il prêt désormais à investir à hauteur de 49% dans un projet qui n'était nullement intégré dans ses plans de développement à l'international ? En tout état de cause, il est aujourd'hui de notoriété publique qu'une course effrénée bat son plein pour la conquête du groupe allemand dont les parts de marché cumulées de ses différentes marques commercialisées en Algérie atteindraient les 19%, de la part de certains acteurs du secteur encouragés par la disposition réglementaire contenue dans le nouveau cahier des charges interdisant l'exclusivité. Au même moment, nous relevons la loyauté de Volkswagen envers son représentant historique, Sovac, et son engagement sans faille à ses côtés pour la concrétisation de ce partenariat et aussi pour toutes les opérations commerciales en dépit des blocages actuels. Néanmoins, les dernières déclarations du premier responsable du secteur de l'industrie tonnent comme un niet catégorique à la formulation du partenariat telle que présentée par Volkswagen et son partenaire algérien. Un projet avec comme seul actionnaire, le groupe Sovac serait ainsi incompatible avec les orientations du gouvernement. Les Allemands sont aujourd'hui clairement fixés sur le ticket d'entrée au marché de l'automobile algérien, partcipations dans le capital et association avec des partenaires publics et/ou privés locaux. Les portes de la négociation ne sont pas pour autant fermées, d'autres rencontres sont d'ores et déjà au programme et chacun devra revoir sa copie pour permettre enfin à une marque hautement appréciée localement de se positionner dans l'industrie automobile algérienne naissante.