Les lampions du 19e Salon d'Alger se sont éteints hier samedi. Une édition qui n'aura nullement tenu ses promesses ou plutôt celles de ceux qui ont ardemment milité en faveur de son déroulement. Vidé de l'esprit foire qui a toujours fait sa spécificité et aussi sa force et son attractivité, ce rendez-vous n'aura pas en définitive fait des vagues. On ne se bousculait pas aux portillons, les travées du Palais des expositions des Pins-Maritimes n'étaient pas bondées comme lors des précédentes et historiques éditions où le record du million de visiteurs était dépassé. Il est aujourd'hui clairement établi que la vente de véhicules et surtout la multiplication des offres promotionnelles restent le critère fondamental de fréquentation. Certains concessionnaires, d'habitude fortement sollicités par les clients, reconnaissaient en aparté que leur chiffre d'affaires se démultipliait considérablement en l'espace de la dizaine de jours que durait le salon. On emménageait des espaces pour le service commercial et on faisait appel aux sociétés de sécurité pour le transport de fonds. C'est dire un succès et une réputation qui se perpétuent depuis 19 ans au grand bonheur de milliers de clients qui patientaient, thésaurisaient tout en guettant l'opportunité de la bonne affaire au détour d'une de ces allées bondées du salon. Le Salon d'Alger semble se préparer à faire sa mue et s'adapter aux nouvelles orientations du marché de l'automobile dans notre pays. Pourra-t-il pour autant évoluer vers le statut de salon des nouveautés et des innovations technologiques ? Le visiteur algérien aura-t-il l'aptitude psychologique à se contenter d'une telle éventualité et se réapproprier de nouveau les allées du salon? Une réponse immédiate à ces questions est à l'évidence impossible tant les perspectives d'avenir sont indéchiffrables et la réaction du public fortement imprévisible. L'édition 2016 a néanmoins su s'élever, grâce à la volonté de certains concessionnaires à préserver leur image et sauver du coup l'honneur de la manifestation, au moment où d'autres participants ont brillé par la qualité médiocre de leurs stands et même en l'absence des responsables de ces concessions. Plusieurs faits marquants ont retenu l'attention des visiteurs et des observateurs. C'est Renault, le leader qui crée l'évènement aussi bien sur sa colline aux lumières d'un trio de nouveautés que sur l'esplanade en installant des ateliers consacrés au service après-vente et en initiant des concours pour sensibiliser les visiteurs à la qualité des prestations. Au plan produit, la Symbol Made In Bladi a suscité les foules et cumulé les commandes. Sovac a également fait le buzz en rassemblant dans ses stands pas moins de 8 nouveautés sur les 13 enregistrées à travers l'ensemble des participants. Un évènement majeur, en soi, quand on sait les appréhensions qui ont longtemps plané sur l'arrivée incertaine de ces vedettes. Un autre habitué des hauts faits du Salon d'Alger, c'est la marque Peugeot qui a su offrir à ses visiteurs un stand aux standards internationaux avec en prime la présence d'un concept car, le Quartz, qui renseigne, à travers son design futuriste et le niveau technologique avancé de ses équipements, sur la qualité et la nature des prochaines productions. On ajoutera aussi le ballet de visites de hauts responsables du groupe qui ont fait le déplacement d'Alger. Il en est de même de l'autre marque du groupe PSA Citroën qui a rehaussé son stand par l'exposition d'un concept, Aircross, qui préfigure lui aussi de l'évolution stylistique des futurs modèles haut de gamme du label aux chevrons. Un des faits marquants de cette édition est incontestablement la présence inédite de deux représentants pour la marque Hyundai, HMA du groupe Cevital et Cima Motors et qui se sont partagé les nouveautés à présenter, le nouveau Tucson pour le premier et Creta pour le second. Cette dualité est révélatrice, du reste, de l'évolution prochaine du secteur de l'automobile en Algérie avec une redistribution des cartes en cours de préparation loin des feux de la rampe. B. Bellil Ils ont déclaré Yves Peyrot des Gachons, DG de Peugeot Algérie : «Nous avons pu conserver un niveau d'activité correct» Le responsable de la filiale de Peugeot en Algérie nous fait part de ses réflexions sur le déroulement du Salon d'Alger, les offres de la marque et les attentes de ses clients. Il revient également sur la situation du marché de l'automobile et ses perspectives de développement. Le Soir d'Algérie : Quelle appréciation faites-vous de cette édition du Salon d'Alger ? Yves Peyrot : C'est un salon de bon niveau en termes de stand et d'exposition et celui de Peugeot en est la parfaite illustration. C'est un stand aux standards internationaux qui a rassemblé l'ensemble de notre gamme ainsi qu'un concept car qui a suscité la curiosité et l'intérêt des visiteurs durant les jours du salon. Pour ma part, j'ai beaucoup apprécié la fréquentation qui confirme la passion qui anime le public algérien et que j'ai pu ressentir auparavant. Et en plus de cette passion, c'est également l'attachement des Algériens à la marque Peugeot que je relève particulièrement. Vous avez annoncé, dès l'ouverture du salon, le lancement de nouvelles offres liées à l'amélioration de la qualité de services. S'agit-il de mesures alternatives pour faire face à la crise qui secoue le secteur ? Je ne pense pas qu'il faille parler de mesures alternatives. Je dirai plutôt que l'évolution vers les services est un phénomène qui doit continuer et s'amplifier. Il est vrai que nous avons saisi l'opportunité du salon pour faire la promotion de ces offres inédites notamment en Algérie, le show-room Nomad, la «Griffe», un concept pour le véhicule d'occasion et Peugeot professionnel, mais cela n'est pas pour autant une conséquence de la pénurie de voitures. L'offre service doit poursuivre son développement et son renforcement parce qu'elle répond d'abord à une attente sans cesse exprimée par les clients et que le rapport à l'automobile a nettement évolué. On ne peut donc se contenter en tant que concessionnaire d'être uniquement un importateur et distributeur de véhicules. On se doit d'offrir des packages globaux pour notre clientèle aussi bien pour le véhicule neuf qu'occasion ainsi que le service. Mais la crise qui paralyse le secteur de l'automobile est bien réelle, n'a-t-elle pas impacté d'une manière ou d'une autre le fonctionnement de Peugeot Algérie et de son réseau d'agents agréés ? Il y a forcément un impact, dès lors que nos importations sont bloquées. Nous en subissons nécessairement les conséquences. Nos clients attendent leurs véhicules et il y a inévitablement une baisse importante de nos activités. Je souhaite que la situation se débloquerait rapidement et, comme annoncé par le ministère du Commerce, nos quotas nous seraient affectés dans les prochains jours afin qu'on reprenne notre flux d'activité habituel et pouvoir servir nos clients. N'y a-t-il pas eu des perturbations majeures dans le fonctionnement du réseau comme c'est le cas chez d'autresconcessionnaires ? S'agissant du réseau Peugeot, nous avons pu, malgré la baisse de nos volumes en 2015, conserver un niveau de vente et des parts de marché corrects. Ce niveau d'activité a permis au réseau de continuer de fonctionner et on n'a pas enregistré de défection ou de départ liés à cette crise. Le début de l'année en cours a été un peu compliqué et on espère que la reprise de l'activité interviendra rapidement pour qu'on puisse contenir autant que faire se peut les impacts de cette crise sur Peugeot et son réseau. Propos recueillis par B. B. Hassen Khelifati, P-DG de Alliance Assurances : «Les assurances et l'automobile dans un contexte difficile» Acteur important dans le secteur des assurances et participant fidèle du Salon de l'automobile d'Alger, Alliance Assurances est devenue, au fil des années, une compagnie qui multiplie les actions et les offres innovantes. Dans l'entretien qui suit, son président, Hassen Khelifati, revient sur la situation générale dans laquelle évolue le secteur des assurances et les perspectives d'avenir. Le Soir d'Algérie : Peut-on connaître votre avis sur le Salon de l'automobile qui vient de s'achever ? Hassen Khelifati : Le Salon de l'automobile 2016 intervient dans un contexte particulièrement difficile, en raison de la crise économique qui secoue le pays et de la nouvelle réglementation instituant le régime des licences d'importation. C'est effectivement des perspectives complexes qui guettent le marché de l'automobile durant les prochaines années. C'est inévitablement des impacts négatifs pour l'activité d'Alliance Assurances ? Pour nous, le Salon de l'automobile n'a jamais été l'occasion pour augmenter nos volumes, mais beaucoup plus pour entretenir l'image, consolider la notoriété et aussi le rapprochement auprès du public et la vulgarisation de nos offres. Et comme toute compagnie d'assurances, nous avons enregistré une baisse de nos activités dans l'automobile en 2015 de l'ordre de -55%. Le recul des importations de voitures a en effet touché de plein fouet le secteur des assurances. En deux années, nous avons enregistré un déficit de 300 000 véhicules, soit un montant global de 15 milliards de dinars qui vient manquer au chiffres d'affaires des compagnies. Un manque important qui vient s'ajouter à celui lié aux assurances des grands projets publics dont les travaux ont été soit reportés, annulés ou gelés par les pouvoirs publics. C'est vous dire que cette multiplication des effets négatifs et un taux de croissance de 0.2% risquent de mettre le secteur des assurances dans une situation complexe et de quasi-stagnation. Quelles sont alors vos prévisions pour l'année 2016 ? Des prévisions encore plus complexes. Les compagnies devront avoir un plan de riposte à deux niveaux, le premier au plan interne avec des actions de conquêtes, de diversification et de fidélisation de la clientèle. C'est ce que nous avons fait durant le Salon de l'automobile, en lançant les nouveaux produits, notamment les packs et la carte bonus qui assure des cadeaux pendant trois années. De même que nous activons actuellement sur la réduction des délais de remboursement de sinistres et nous avons pu régler quelque 40 000 dossiers de sinistres qui étaient en attente. Et je vous informe aussi que nous avons décidé de l'ouverture de nos structures durant la journée du samedi pour permettre à nos clients de profiter de leur jour de repos. Autant d'actions pour diversifier nos activités et fidéliser notre clientèle. Le second plan, c'est une démarche secteur avec l'implication des confrères à travers l'Union des assureurs, afin de tenter de limiter l'impact de la baisse des importations mais aussi de l'effritement continu de la valeur du dinar qui se répercute directement sur les remboursements des sinistres. A cela s'ajoute un changement dans le comportement du consommateur qui achète de moins en moins l'assurance tous risques lui préférant les autres formules en plus du fait que le prix de la RC qui ne reflète nullement la valeur économique de l'assurance. C'est vous dire les efforts accomplis avec les confrères pour endiguer les effets négatifs de cette conjoncture difficile en même temps que le règlement des litiges entre les compagnies avant la fin de l'année 2016. Qu'en est-il de la nouvelle convention appelée IRSAM ? En effet, on prévoit à partir de cette année l'activation de la convention IRSAM (Indemnisation et règlement des sinistres automobiles matériels), qui définit les mécanismes de règlement des sinistres entre les compagnies en moins de deux mois. C'est une procédure qu'on est en train de mettre en place mais je dois avouer que beaucoup reste à faire. Je dois également préciser que les acteurs importants du secteur public et qui représentent surtout la majorité du marché sont actuellement engagés avec nous dans cette démarche pour faire changer l'image du secteur et revendiquer ensemble l'augmentation des tarifs notamment la RC qui ne correspond plus à la réalité.