La problématique du m-paiement (paiement électronique) et l'e-banking ont été au cœur du débat qui a eu lieu hier lors de la matinale du think tank CARE (Cercle d'action et de réflexion autour de l'entreprise). Younès Djama - Alger (Le Soir) - Les participants qui ont fait, à l'occasion, le constat récurrent du retard de l'Algérie dans le domaine de la dématérialisation des moyens de paiement «grand public», ont mis en avant l'effet négatif de ce retard sur la croissance et sur l'attractivité du pays, mais aussi le facteur bloquant de ce retard dans la vie de tous les jours des citoyens, obligés de manipuler des sommes importantes d'argent liquide, avec les contraintes inhérentes pour les établissements financiers en termes de mise à disposition de ces liquidités. «Le m-paiement ne peut pas se développer sur la base des anciennes techniques, il faut voir autre chose, l'utilisation actuellement des terminaux (TPE), c'est uniquement pour le retrait de l'argent. Pour ce qui est du m-Mobile, actuellement, les Algériens se baladent avec beaucoup de cash car ils n'ont pas la possibilité d'utiliser leurs téléphones comme porte-monnaie électronique. Les applications aujourd'hui existent, si la régulation permet d'utiliser le téléphone pour un transfert d'argent ou simplement pour payer, cela va marcher. L'intérêt de ce type d'opération est qu'il permet de renforcer la confiance dans la monnaie nationale et le système bancaire et on réduit la manipulation du cash avec un impact positif sur l'économie nationale», a indiqué Dr. Naceur Bourenane, expert financier auprès d'institutions de financement du développement en Afrique, et spécialiste du financement du développement de l'entreprise privée. Ce dernier préconise pour encourager le m-paiement et e-banking de «mettre tout le monde autour de la table et instaurer un dialogue entre les différents acteurs et c'est ce que la matinale de CARE s'est proposée de faire aujourd'hui», dit-il. «Ce qui bloque en Algérie c'est ce qu'on appelle le cashing-in cashing-out, c'est-à-dire qu'un opérateur ne peut pas prendre en main un outil pareil tant que la réglementation l'interdit», dira de son côté Salhi Abdelkader gérant de Kepler Technologies. Il ajoute qu'au lieu d'attendre que la réglementation change, «nous avons décidé de modifier l'approche technologique comme l'a fait le service de mobile banking M-PESA au Kenya». L'idée, en effet, consiste à ne plus utiliser des transactions financières mais de faire «une agrégation d'informations, c'est-à-dire créer un ‘'tuyau'' qui connecte le téléphone et la banque juste à titre d'information. Ce ‘'tuyau'' doit être totalement sécurisé. La principale valeur ajoutée c'est qu'on n'est pas sur la transaction monétaire mais sur la déclaration d'un ordre de virement», explique-t-il. La société Kepler Technologies a mis en place ce procédé depuis 2014 avec la Seaal et la banque privée BNP Paribas. Grâce à ce dispositif, un client de la banque en question peut aujourd'hui payer sa facture Seaal à partir de son terminal portable avec un simple SMS. Cette technique peine toutefois à se généraliser en raison de la réticence des banques, notamment publiques, à l'adopter, regrette Salhi Abdelkader. Pour sa part, Fodhil Kerkache ancien directeur des ventes auprès de Wataniya, Télécom Algérie et aujourd'hui General Manager de 2 Forces, a appelé les banques à «ne pas avoir peur» des opérateurs qui sont avant tout un levier de croissance. «Les opérateurs bancaires n'ont pas cette culture d'aller chercher les opportunités de nouveaux business dans d'autres métiers», constate-t-il, ajoutant qu'avec 43 millions d'abonnés à la téléphonie mobile, les banques peuvent ‘'scorer'' autant de clients, c'est-à-dire savoir si un client est solvable ou pas. «Ailleurs dans le monde, la banque n'attend pas que le client vienne lui demander quoi que ce soit, c'est à elle de se rapprocher de lui en le suivant à travers leurs transactions. Ce n'est pas forcément celui qui a beaucoup d'argent dans son compte qui est solvable. Le client solvable, c'est celui qui fait plusieurs transactions», note-t-il.