Quelques jours après que les patrons de la police et de la gendarmerie eurent été conviés pour la première fois à une réunion de la plus haute importance présidée par le président de la République, voilà le vice-ministre de la Défense qui, comme qui dirait, met ces deux corps des services de sécurité presque sur un pied d'égalité avec la toute-puissante ANP. Fait extrêmement rare, pour ne pas dire jamais relevé, pour ne pas être remarqué. Après cette espèce d'exclusivité accordée depuis des années à l'ANP dans son discours pour souligner l'évolution positive de la situation sécuritaire à travers le pays, voilà donc le vice-ministre de la Défense qui inclut «les autres services de sécurité» dans ses louanges adressées à ses éléments lors de l'allocution prononcée samedi au siège du Commandement de la 6e Région militaire, à Tamanrasset, suivie par visioconférence par les éléments de toutes les unités. Une allocution à travers laquelle Ahmed Gaïd-Salah a exprimé la grande satisfaction du haut commandement de l'ANP concernant le climat de sécurité qui prévaut dans le pays. «Au sein de l'ANP, digne héritière de l'ALN, et au sein des autres services de sécurité, nous exprimons notre indescriptible bonheur et grande satisfaction, quand nous voyons notre peuple, à travers tout le territoire national, vivant dans des conditions de sécurité stables, loin de tout danger ou péril (...) Alors saluons ces braves éléments de l'Armée nationale populaire, et tous leurs frères des autres corps sécuritaires, et félicitons-les de cet aboutissement», relevait, au tout début de son intervention, le chef d'état-major de l'ANP qui venait ainsi de donner une suite à ce haut fait, relevé la semaine dernière lors de la réunion restreinte convoquée et présidée par Bouteflika mercredi dernier, que constituait la présence, pour la première fois, pour une réunion du genre, du général-major Abdelghani Hamel, le directeur général de la Sûreté nationale, et du premier responsable de la Gendarmerie nationale, Menad Nouba. L'implication de Hamel et de son alter ego de la gendarmerie avait suscité de nombreuses interrogations le lendemain, puisque du domaine de la sécurité, depuis toujours «l'exclusivité» était du côté de l'armée. Dès lors, l'on comprend que le discours de Gaïd-Salah, avant-hier à Tamanrasset, ne fasse qu'épaissir encore un peu plus ces questionnements sur les nouvelles bonnes grâces dont jouit la police lorsqu'il s'agit de débattre au plus haut lieu des questions de sécurité nationale et de ne plus confiner le même service de sécurité dans le simple rôle d'exécutant surtout que la situation sécuritaire n'est pas, il est vrai, très rassurante, comme le suggère cette multitude d'opérations aussi spectaculaires les unes que les autres et qui, entre autres, ont permis, ces derniers mois, à l'armée à travers plusieurs contrées du pays de mettre la main sur de véritables arsenaux dont on ne sait quelles filières ils ont empruntées pour entrer sur des centaines de kilomètres dans le territoire national. Les autorités du pays auraient-elles compris que la mobilisation de milliers de militaires notamment pour la surveillance des centaines de kilomètres du pourtour frontalier à l'est et au sud, d'une part, poursuivre le nettoyage des maquis au nord d'autre part, ne sont pas une affaire à mettre entre les mains d'une seule entité, l'armée en l'occurrence. L'immensité de la mission requiert la mobilisation de toutes les forces, ces «frères des autres corps sécuritaires», comme les a appelés Gaïd-Salah dans son discours de samedi dernier au Commandement de la 6e Région militaire. Une allocution à travers laquelle on semble vouloir conforter les autres corps des services de sécurité dans un rôle autrement plus «valorisant».