Ibn Arabi estime que la morale doit se proposer d'être le bonheur de l'homme, dans le présent aussi bien que pour l'avenir et que «Le bonheur que nous goûtons en traitant nos semblables avec respect et charité ne peut être produit par aucune autre chose». Surnommé El Cheikh Al Akbar, Muhyi Eddine Ibn Arabi, né le 7 août 1165, à Murcie, en Andalousie (Espagne) et mort le 16 novembre 1240 à Damas dans l'actuelle Syrie, est considéré comme la figure la plus prestigieuse et la plus originale de l'histoire du soufisme. Il a laissé, en outre, une œuvre écrite immense et précieuse. «Il fut, en effet, le premier à exprimer par écrit ce vaste ensemble de doctrines et d'enseignements qui avait été jusqu'à son époque limité à la transmission orale et aux allusions voilées. En faisant cela, Ibn Arabi rendit accessible un immense corpus d'enseignements sur une multitude de sujets, des plus hautes doctrines métaphysiques à la signification de l'ablution rituelle, y compris la cosmologie, la numérologie, l'onirologie, la pratique soufie, les états spirituels, etc.», écrit W. J. Austin dans la présentation de sa traduction de l'ouvrage Ibn Arabi, les Soufis d'Andalousie. La librairie de philosophie et de soufisme (Alger) vient de rééditer la version française du livre du philosophe turc Mehemmed-Ali Aïni intitulé Pourquoi j'aime Ibn Arabi. La quintessence de la philosophie d'Ibn Arabi, paru en 1926 aux éditions Paul Geuthner à Paris. Le livre est d'abord paru en langue turque en 1923 à Constantinople (Istanbul) sous le titre éponyme de Seyh-i Ekberi nicin severim. Il sera traduit en français par Ahmed-Réchid Bey, ami et compatriote de l'auteur, ancien sous-secrétaire d'Etat au ministère des Affaires étrangères, et publiée sous le titre La quintessence de la philosophie de Ibn Arabi aux éditions Paul Geuthner. Mehemmed-Ali Aïni (1870- 1945) parle de la vie mystique de Muhyi Eddine Ibn Arabi. Il relate sa mémorable rencontre avec le grand philosophe andalou Ibn Rochd (Averroès) alors qu'il n'était qu'un tout jeune garçon. L'essentiel de la doctrine de Ibn Arabi est dans le principe de l'amour universel. Cité par Abderrahmane Rebahi dans la présentation de l'ouvrage, Titus Burckhardt a écrit que Ibn Arabi «place l'amour intégral au sommet de son ‘échelle' des demeures de l'âme; on peut donc le considérer comme la synthèse de toutes les vertus, et en effet, si toute vertu est une forme de la volonté, l'amour spirituel est la volonté même, transfigurée par l'attraction divine. L'amour de Dieu est imparfait et même inconcevable sans l'amour de Dieu dans la création (tout aspect de sa Révélation y compris l'intellect pur) et sans amour de la moindre créature de Dieu; on peut dire, en un certain sens, qu'il faut aimer Dieu d'abord dans la création, dans Son Verbe révélé et Sa Vérité, ensuite en lui- même, dans Son aséité transcendante, et enfin dans ces ‘‘plus petits'' qui exigent notre charité.» Le lecteur Algérien francophone méditera ces lignes de Mehemmed-Ali Aïni : «J'aime beaucoup Ibn Arabi, car c'est dans ses admirables œuvres que je trouve les réflexions les plus pénétrantes sur les questions de métaphysique et de morale. Si les hommes avaient, ne fût-ce que dans la plus modeste mesure, conformé leur conduite aux principes qu'il énonce dans ses écrits, combien ils seraient heureux !» Ibn Arabi estime que la morale doit se proposer d'être le bonheur de l'homme, dans le présent aussi bien que pour l'avenir. Pour l'élévation morale, il conseille : «Dans quelque situation religieuse que tu puisses te trouver, prie toujours Dieu de la rendre meilleure, et dans tous tes actes et paroles, n'oublie jamais Dieu.» Le cheikh estime par ailleurs, qu'il n'est pas juste de blâmer la personne de l'homme (les médias et les politiciens devraient méditer ça), car «l'homme ne peut être blâmé que par ses actions.» Tous ceux qui courent derrière le bonheur devraient se rappeler cette réflexion d'Ibn Arabi : «Le bonheur que nous goûtons en traitant nos semblables avec respect et charité ne peut être produit par aucune autre chose ». Kader B. Pourquoi j'aime Ibn Arabi de Mehemmed- Ali Aïni, traduit du turc par Ahmed-Réchid Bey. Lettre-préface de Louis Massignon. 112 pages. Réédition par la librairie de philosophie et de soufisme.