La crise qui secoue de nombreuses zones frontalières avec l'Algérie a visiblement incité les autorités à intensifier leurs efforts diplomatiques en vue de contribuer à l'apaisement de tensions qui risqueraient fatalement de déborder sur le territoire algérien. Abla Cherif - Alger (Le Soir) - Ces foyers de tensions sont légion. La terrible crise libyenne, le chaudron malien, l'instabilité nigérienne, l'incommensurable détresse nigériane frappée par le fléau Boko Haram, la fragilité de la Tunisie ont pratiquement placé l'Algérie en étau. Position inextricable en raison de laquelle le maintien de la stabilité relève d'une gageure. Le pouvoir algérien le sait : une position de wait and see ne ferait qu'aggraver les problèmes déjà immenses qui secouent le territoire national. «Eviter l'épanchement de ces crises chez nous figure parmi les questions stratégiques premières. Nos partenaires le savent parfaitement et n'hésitent pas à le dire publiquement lors de rencontres officielles, mais ils savent aussi que le rôle joué par notre pays n'est pas des moindres. En moins de temps que nous l'aurions cru, l'Algérie s'est transformée en l'un des principaux médiateurs dans les crises qui secouent toute la zone», analyse pour nous un diplomate réputé pour être fin connaisseur des affaires de ce genre. A l'heure où il tient ce discours, le pays accueille à nouveau le Premier ministre malien. L'évènement ne marque en rien une nouveauté. Depuis plusieurs années, le pouvoir central de Bamako dépêche sans relâche des émissaires de haut niveau chargés, le plus souvent, de faire avancer le pacte pour la paix signé sous l'égide de l'Algérie. Ce pacte qui a notamment permis de parvenir à un cessez-le-feu entre les forces armées maliennes et la rébellion targuie bat cependant de l'aile aujourd'hui en raison des difficultés qu'éprouve Bamako à sécuriser le nord de son pays investi par les groupes terroristes. Les turbulences qui en découlent seront indéniablement au menu des discussions entre l'hôte de l'Algérie et ses partenaires. Des partenaires engagés dans une offensive sans pareille. Car au même moment, l'Algérie tente de déployer des trésors d'imagination pour parvenir à un premier accord salvateur entre deux pôles ennemis libyens au moment où l'un d'entre eux, le général Haftar, refuse de répondre aux appels à la réconciliation. «On peut dire sans se tromper que la diplomatie algérienne est actuellement focalisée sur le dossier libyen. Tout est fait en sorte que la médiation entreprise réussisse et je peux vous assurer que le Président Bouteflika suit personnellement le dossier. Les Algériens en ont fait presque une affaire nationale». Notre source hésite cependant à confirmer la tenue prochaine d'un sommet autour de la Libye entre les Présidents algérien, tunisien et égyptien. Cette rencontre avait été récemment annoncée par Ghannouchi, leader du parti tunisien Ennahdha, sans que cela soit officiellement confirmé par les parties citées. «Il y a effectivement des rencontres en haut lieu qui sont prochainement prévues, mais il est difficile de définir leur niveau pour l'instant. Tout dépendra du calendrier des uns et des autres, mais l'intention y est, c'est indéniable.» En attendant, la pression s'accentue de part et d'autre, contraignant les autorités algériennes à renforcer, une fois de plus, le dispositif de sécurité présent aux frontières depuis la chute du régime El-Kaddafi, et à prendre des dispositions parfois douloureuses pour tenter d'endiguer l'afflux de réfugiés en quête de cieux plus cléments. Selon nos sources, l'Algérie estime, cependant, s'en sortir à bon compte pour l'instant. «Nous avons non seulement réussi à préserver le territoire national d'une infiltration terroriste, et le fait n'est pas du tout simple en raison de l'ampleur du phénomène autour de nous, mais nous avons surtout réussi à le faire en maintenant nos principes de non-intervention en territoires étrangers, ce qui n'est pas simple du tout. Pour le reste, il s'agit, coûte que coûte, de tenter «d'exporter», c'est ainsi qu'on l'appelle chez nous, l'expérience de la réconciliation nationale, c'est le seul moyen qu'ont ces pays en crise de s'en sortir, et pour nous de réussir et de nous imposer à nouveau comme leaders dans la région et pourquoi pas au-delà.»