Momo aurait apprécié cet hommage au Bastion 23, au pied de sa Casbah bien-aimée et avec une vue imprenable sur la mer. Il aurait même lancé son fameux «Ya Bahdjati !» qui veut dire «ô ma joie !» et «ô mon Alger !», en même temps. Les éditions El-Ibriz, la Fondation Casbah et l'Association Lumières se sont associées samedi pour rendre hommage à Himoud Brahimi, artiste, comédien et poète de la Médina. Cette rencontre à l'occasion du 20e anniversaire de la disparition de Momo (le temps passe si vite) a été marquée par la présence de nombreux amis de l'artiste, de Belkacem Babaci, président de la Fondation Casbah, et de Doudja, la fille de Himoud Brahimi. Doudja est longuement revenue sur le parcours de son père, un homme «très affectueux et surtout studieux.» Il fréquentait les collèges français à Alger, alors sous occupation, sans toutefois y être inscrit. Adolescent, Momo, témoigne-t-elle encore, déclamait déjà des poèmes de sa propre composition. Doudja apprend à l'assistance que son père, un «mordu» de cinéma, était aussi un soufi. Belkacem Babaci, de son côté, se rappelle d'un homme «facétieux» et «passionné des lettres et des arts». Le président de la Fondation Casbah rappelle que Momo a côtoyé de grandes figures de la littérature, imprégnées de la culture algérienne, notamment l'écrivain et journaliste «Bébert» Albert Camus et l'écrivain et philosophe Roger Garaudy. M. Babaci fait remarquer que Momo était «très attaché» au plus vieux quartier d'Alger où il a vu le jour le 18 mars 1918. Il était, aussi, un des membres fondateurs de l'association Les Amis d'Alger qui deviendra plus tard la Fondation Casbah. Hocini Redouane Hamza, présent à l'hommage, a parlé d'un poète, d'un «père» et d'un ami «modeste et humain», tout en rappelant que l'influence du soufisme chez Himoud Brahimi est visible dans l'ouvrage Identité suprême, un manifeste sur la théologie et philosophie sorti en 1958 en pleine guerre de Libération nationale. Momo a également écrit plusieurs poèmes, recueillis et édités à titre posthume notamment Momo, la magie des mots, un recueil paru en 2006 aux éditions Alpha et Momo, les mots, le verbe et les paroles, un autre recueil de textes présentés par Jean-René Huleu, sorti en mars 2017 aux éditions El-Ibriz. Himoud Brahimi, l'homme aux multiples talents dont sportifs, s'est également illustré au cinéma dans les films Tahya ya Didou de Mohamed Zinet et Taxi El Makhfi (Le Clandestin) de Benamar Bakhti. Il est décédé le 1er juin 1997 à Alger à l'âge de 97 ans. Dans son livre Le Fou de La Casbah, Hommage à Himoud Brahimi, Jean-René Huleu a certainement tout résumé à son sujet : «Himoud Brahimi, dit Momo de La Casbah, rencontré sur les traces d'Isabelle Eberhardt il y a vingt-cinq ans, m'a transmis un savoir et un message que ce texte voudrait faire partager. Celui que les Algérois connaissent comme le poète de La Casbah était en réalité un soufi initié aux meilleures sources de son temps, aussi inspiré qu'il était ignoré de ses contemporains.»