La perte d'emplois due à la mauvaise conjoncture imposée à certains secteurs d'activité, tels le bâtiment et les services, et les départs massifs à la retraite, conjugués à la situation financière du pays depuis près de quatre ans maintenant, sont en train de jouer, depuis quelques années, un très vilain tour au système de retraite, au point de mettre en délicate situation la CNR. Invité à éclairer l'opinion sur l'état du système de retraite, à travers la CNR qu'il gère, Slimane Melouka, le directeur général de la Caisse nationale de retraite, a dressé un tableau qui éclaire encore un peu plus la lanterne de plus d'un, déjà assez informé de l'état des lieux du système de retraite brossé devant les deux chambres du Parlement par le Premier ministre. Passer de la proportion qui requérait un retraité pour cinq cotisants, pour pérenniser le système, à la donne qui fait que, depuis quelque temps, l'on se retrouve avec deux cotisants pour un retraité, cela s'est traduit par «une période de perturbations très importantes en matière de finances». Une situation très inquiétante qu'explique le DG de la CNR par les départs massifs à la retraite accentués notamment par la loi 97/13 qui permettait de mettre fin à sa carrière à un âge précoce, d'un côté. De l'autre, toujours selon Slimane Melouka, il y a la baisse de la création d'emplois engendrée par les difficultés financières que traverse le pays. Ceci, sachant que les retraités sont pris en charge exclusivement par les travailleurs, soit 6 millions de travailleurs pour 3 millions de retraités aux dernières statistiques. Une armée de retraités qui nécessite le versement de pensions d'un montant annuel de 900 milliards de dinars par an ajoutés aux 140 milliards versés par l'Etat au titre de la contribution. Pour avoir une idée encore un peu plus exhaustive sur l'état des lieux, il faut savoir qu'il y a deux ans, 150 000 partants à la retraite ont été recensés et 180 000 l'année dernière. Des chiffres qui donnent évidemment le vertige tant ils renseignent amplement sur la pénibilité de la conjoncture imposée à la Caisse de retraite. Les prévisions pour l'année en cours annoncent 50 000 nouveaux retraités au maximum, et ce, grâce aux mesures prises pour freiner les dépenses de retraite, dont l'abrogation de la loi y afférente. Une situation difficile qui, pourtant, n'avait pas engendré la crainte du DG de la CNR en 2015 alors que la crise était déjà là. En fait, expliquait-il hier sur la Chaîne III, c'est à partir de 2014 que le déséquilibre s'est accentué dans le système des retraites, lorsque les travailleurs commençaient à partir massivement à la retraite. Les milliers de travailleurs qui avaient bénéficié des augmentations de salaire ont profité des dispositions d'ouverture du droit à la retraite anticipée, accentuant ainsi le déséquilibre financier du système de pension. «Notre appel à l'époque, c'était afin de rassurer les travailleurs et freiner les départs à la retraite», s'est défendu Slimane Melouka, mais cela n'a pas suffi, alors, il a fallu que le gouvernement prenne la décision d'abroger la loi pour mettre fin aux départs à la retraite à un âge précoce, a-t-il précisé. En tous les cas, et malgré tout, que la CNR se retrouve incapable de verser les pensions de retraite, n'est pas envisageable parce que les pouvoirs publics ont toujours accordé une attention particulière au système de retraite, assurant que toutes les solutions appropriées seront apportées et que la décision prise par le Premier ministre l'indique à plus d'un titre, n'osant pas tout de même se féliciter de la probable forte bouffée d'oxygène que recevra la CNR ainsi que les autres caisses d'assurances grâce à la planche à billets.