Coup de force des boulangers. Ces derniers et contre toute attente décident de passer à l'acte et affichent le prix d'une baguette de pain à 15 DA. Une décision qui ne s'est pas limitée à une seule wilaya. Elle est en «vigueur» sur l'ensemble du territoire national, depuis hier. Abder Bettache - Alger (Le Soir) - Le 4 novembre dernier, le club des artisans boulangers affilié à l'Association nationale des commerçants algériens (Anca) a appelé, lors d'une conférence de presse à Alger, à la création d'une commission comprenant les représentants des boulangers, ceux des minoteries, du ministère des Finances et celui du Commerce pour examiner la question de la hausse des prix du pain, qui est «une vieille revendication des boulangers». Selon le président du club des boulangers, M. Faouzi Bahiche, «le prix fixé par l'Etat est de 8,50 DA, mais la baguette est actuellement cédée à 10 DA». Il dira aussi que «les boulangers comptent porter le prix à 15 DA», tout en rappelant que «le prix réel du pain est de 11,50 DA». Selon un membre de cette organisation professionnelle, «ce sont le silence et le mépris affichés par les pouvoirs publics envers les boulangers qui ont poussé ces derniers à agir d'une manière unilatérale». Notre interlocuteur s'interroge réellement sur «la portée de cette politique de subvention que les différents gouvernements qui se sont succédé n'ont cessé de faire valoir». «Si l'on persiste à ne pas augmenter le prix du pain, une bonne partie des 21 000 boulangeries activant sur le territoire national risquent de fermer boutique. Le pain consommé actuellement est à base de farine blanche, et que celui-ci est à l'origine de nombreuses maladies. Il estime qu'une hausse des prix permettrait de recourir aux farines mixtes et améliorer la qualité du pain», explique-t-il. Et d'ajouter : « Si le département du commerce refuse d'augmenter le prix du pain, c'est le poids de la baguette qui devra être réduit de 250 à 200 grammes». Même son de cloche chez le président de la Fédération nationale des boulangers, M. Faouzi Bahiche, qui avait déclaré pour sa part que le «prix de la baguette ne doit pas être inférieur à 15 DA». Son argument est que l'actuel tarif de 8,50 DA (même si les boulangers vendant la baguette réellement à 10 DA) «ne suffit même pas à payer des salaires d'une profession qui emploie directement 100 000 salariés». Les boulangers demandent également la révision de l'actuel mode de subvention qu'apporte l'Etat pour la farine panifiable. Selon plusieurs sources, «le soutien de l'Etat à ce produit vital profite à d'autres industriels et transformateurs». Mieux, les professionnels justifient cette «légalisation du prix» par les dispositions contenues déjà dans la LF 2017 et celle avancée dans la LF 2018, «qui porte la taxe sur la valeur ajoutée de 17 à 19%, alors que la cotisation d'assurance passe de 32 000 à 42 000DA/an au moment où le prix de la farine panifiable a atteint les 2 000 DA le quintal». «Ces charges sont un manque à gagner pour les artisans qui réclament une diminution de ces taux dans le cadre d'une décision spécifique au secteur. Tout augmente ! La facture de l'électricité a doublé, le loyer a augmenté de 45% en trois ans, les apprentis sont de plus en plus rares et plus exigeants en matière d'honoraires». Face à cette situation, certains parlent d'une faillite avérée et qu'ils repoussent par amour du métier surtout qu'il s'agit pour beaucoup «d'une profession héritée de père en fils». Le prix actuel de la baguette de pain est en vigueur depuis 1996. C'est le seul prix, avec celui de lait en sachet, qui n'ont pas bougé depuis très longtemps. «La situation a poussé plus de 7 000 boulangeries à fermer leurs portes en quelques années», souligne-t-on.