�La monarchie n'est pas faite pour le Maroc (…) Les indicateurs montrent que le r�gime s'�croulera bient�t� et la Constitution �est bonne pour la poubelle� ! Ces propos tenus par Nadia Yassine, figure embl�matique de l'islamisme marocain et fille de Cheikh Yassine, leader du mouvement Adl oual Ihsane (Justice et bienfaisance), ont soulev� un toll� au Maroc. Un collectif d'intellectuels, d'acteurs politiques et de militants de la soci�t� civile a vivement r�agi en lan�ant une p�tition reproduite par la quasi-totalit� des m�dias du royaume pour d�fendre le pays contre tous ceux — Alg�rie et Polisario compris — qui visent � d�stabiliser le pays, exigeant des islamistes de �rectifier leur conduite� en souscrivant �au contrat liant la monarchie aux forces vives de la nation� ! Nadia Yassine est connue pour son sens de la provocation. Ce ne sont pas ses positions islamisantes qui lui vaudront d'�tre assign�e en justice pour �atteinte aux institutions sacr�es de la nation� mais d'avoir remis en cause le monopole de la monarchie sur le religieux et, partant, la sacralit� du royaume. Dans ce pays o� islam et politique sont �troitement li�s, le roi est consid�r� comme un descendant du proph�te, disposant ainsi d'une l�gitimit� religieuse et du statut de �commandeur des croyants�. De ce fait, accepter d'autres visions de l'islam que la sienne reviendrait pour le roi � renoncer � la raison d'�tre de la monarchie qui est par d�finition religieuse. Or, l'irruption de l'islamisme dans le champ politique marocain a eu pour cons�quence de remettre en cause cette dimension religieuse du royaume. Avant les attentats kamikazes du 16 mai 2003 � Casablanca, rares �taient au Maroc ceux qui croyaient qu'un jour l'islamisme menacerait l'existence du royaume. Beaucoup de Marocains pensaient �tre � l'abri d'une telle menace tant ils �taient convaincus que la fonction de commandeur des croyants du roi suffisait � �carter une telle probabilit�. Pourtant, la d�monstration de force des islamistes — plus d'un million de personnes — dans les rues de Casablanca en mars 2000 constituait plus qu'un avertissement. La victoire du PJD (Parti de la justice et du d�veloppement), fa�ade l�gale de l'islam politique, aux l�gislatives de 2002, alors qu'il n'a pr�sent� de candidats que dans 50% des circonscriptions, confirmait l'ancrage des islamistes dans la soci�t� marocaine. Et ce, m�me si cette formation, rentr�e dans les rangs en 2004, se proclame �parti royaliste� et pour la �marocanit� du Sahara Occidental. Mieux, en raison du discr�dit des partis traditionnels parmi la population marocaine, le PJD se pr�sente comme le seul parti capable de ramener la grande masse des sympathisants islamistes d'al- Adl oual Ihsane dans le giron royal, escomptant sans doute que le Palais lui renvoie l'ascenseur. Ce qui, selon certaines sources, ne saurait tarder puisque le roi Mohamed VI n'est plus tout � fait oppos� � l'entr�e de ce parti dans le gouvernement ! Reste que les propos de Nadia Yassine s'inscrivent dans le contexte d'une monarchie en proie � de s�rieux et graves probl�mes socio-politiques. Plus que par le pass�, elle est s�rieusement confront�e � des impasses sociales et politiques auxquelles pour l'heure elle n'a trouv� aucune r�ponse sinon de tenter de d�tourner le m�contentement populaire sur le voisin alg�rien, bouc �missaire bien commode. Pis, dans la situation pr�sente, tout porte � croire que le bouc-�missaire alg�rien, que le palais royal brandit opportun�ment pour faire diversion, ne lui sera d'aucun secours. Et si, jusque-l�, le palais a pu instrumentaliser l'islam pour se tirer d'affaire, le fait que les islamistes lui en contestent le monopole de la repr�sentation le place dans une posture inconfortable. Il est de fait condamn� � cesser de se voiler une r�alit� qui saute aux yeux !