Seize ans apr�s la chute du Mur de Berlin, plusieurs sportifs souffrent encore des s�quelles de leur pass� est-allemand et continuent de demander r�paration pour avoir �t� dop�s � leur insu sous le r�gime de la RDA communiste, dictature qui voulait faire du sport une vitrine. Quelque 160 ex-athl�tes est-allemands ont d�cid� de poursuivre en justice la soci�t� Jenapharm, affirmant que le laboratoire a d�lib�r�ment fourni aux autorit�s sportives de RDA des st�ro�des anabolisants, les terribles pilules d'Oral-Turinabol, destin�es au dopage. Aujourd�hui, filiale de l'un des plus grands groupes pharmaceutiques allemands, Schering, Jenapharm clame son innocence et estime que ses responsables de l'�poque ne savaient pas � qui �taient destin�es ces "pilules bleues". Mais ceux qui ont couru, nag�, lanc� des javelots pour la gloire du r�gime communiste exigent des r�parations financi�res. Dopage d'�tat "On nous a vol� notre �me et notre corps. On a fait de nos corps des objets", explique Ines Geipel, une ancienne sprinteuse et sauteuse en longueur qui se bat depuis des ann�es pour faire condamner les responsables du dopage. Car c'est bien le dopage d'�tat qui a permis � l'Allemagne de l'Est de devenir une machine � m�dailles. Ainsi la RDA et ses quelque 16 millions d'habitants arrive deuxi�me en nombre de m�dailles aux jeux Olympiques de Montr�al en 1976, derri�re le grand fr�re sovi�tique. Une place qu'elle conserve � Moscou en 1980, des Jeux auxquels les �tats-Unis ne particip�rent pas, et � S�oul en 1988. La natation est le sport roi. A Moscou, les nageuses est-allemandes raflent 11 des 16 m�dailles d'or, ainsi que 10 d'argent et 8 de bronze. Dans 7 disciplines, elles remportent m�me les trois m�dailles. Mais � quel prix ? Andreas Krieger incarne sans doute le mieux les atroces d�rives de ce syst�me. Andreas �tait une femme, Heidi, lanceuse de poids sacr�e championne d'Europe en 1986 avec un lancer � 21,10 m. Elle est devenue un homme � force d'absorber sans le savoir des hormones m�les et a subi en 1997 une op�ration pour changer de sexe. Au total, le dopage a fait quelque 10.000 victimes en ex-RDA. Leuc�mies, graves probl�mes de dos, enfants aveugles ou st�rilit�, tels sont aujourd'hui quelques-uns des maux dont souffrent ces exgloires du sport. "Mesures d'adaptations" "Je connais une sp�cialiste d'aviron qui a aujourd'hui la quarantaine et qui ne peut plus bouger et doit rester constamment allong�e", raconte Ines Geipel. "Nous �tions jeunes, subissions une �norme pression", poursuit celle qui a racont� dans un livre, Les jeux perdus, les d�rives du syst�me est-allemand. "Quand j'avais 17 ans, mon entra�neur est venu me voir : �On doit �tre les meilleurs, cela n�cessite un certain nombre de mesures d'adaptation�. Il m'a donn� des pilules bleues, comme �a, sans emballage", raconte dans cet ouvrage Brigitte Michel, une ancienne lanceuse de disque. En juillet 2000, Manfred Ewald, ancien pr�sident de la Conf�d�ration des sports de RDA et du Comit� national olympique, et Manfred Hvppner, ex-directeur adjoint du Service de m�decine sportive (SMD) de la RDA, ont �t� condamn�s � respectivement un an et dix mois de prison avec sursis et un an et six mois avec sursis. Et, en septembre dernier, pour la premi�re fois, 193 anciens sportifs ont �t� indemnis�s par l'Etat allemand. 308 ex-athl�tes avaient entam� une proc�dure d'indemnisation aupr�s du Fonds d'aide aux sportifs victimes du dopage (DOHG), mis en place par le gouvernement en 2002 et dot� de deux millions d'euros.