En coupant le gaz � l�Ukraine, Vladimir Poutine entend manifestement lui faire payer au prix fort son d�sir de s��manciper de la tutelle russe. Jusque-l�, l�Ukraine payait 50 dollars les 1000 m�tres cubes de gaz. Depuis le 1er janvier, elle doit payer quatre fois plus, soit 230 dollars les 1000 m�tres cubes. Or, la Russie facture � 110 dollars le prix du gaz � la Turquie, 110 dollars pour les pays du Caucase et les pays baltes et 47 dollars � la Bi�lorussie. Pour l�Ukraine, Moscou pratique ainsi une politique du deux poids deux mesures et refuse de payer le prix demand� par son puissant voisin. Mieux, elle a d�cid� de pr�lever 15% du gaz russe transitant par son territoire � destination de l�Europe de l�Ouest, suscitant de ce fait l�inqui�tude de l�Union europ�enne qui craint une p�nurie de gaz. Il faut dire que l��lection de Viktor Iouchtchenko en d�cembre 2004 � la t�te de l�Ukraine a d�plu fortement � Moscou. D�autant que ce dernier n�a pas cach� sa volont� de rapprochement avec l�Union europ�enne et, surtout, le d�sir de faire adh�rer son pays � l�OTAN. Pire, en organisant en d�cembre dernier � Kiev une r�union des dirigeants de huit pays de l�Europe de l�Est et du Caucase, dont la G�orgie pro-am�ricaine, le pr�sident ukrainien a fini par irriter la Russie qui s�est sentie vis�e par cette initiative. Moscou est donc pass� � l�acte en usant de son arme favorite, le gaz. Via Gazprom, le num�ro un mondial du gaz, qui d�tient 20% des r�serves mondiales, la Russie dispose en effet d�une arme dont elle entend jouer pour faire valoir ses int�r�ts. Cette entreprise d�Etat, qui p�se 159 milliards de dollars, est utilis�e par le pouvoir de Poutine pour renationaliser les entreprises p�troli�res et industrielles russes d�tenues par les oligarques. Il en est ainsi de Ioukos, de Sibneft, acquises par des oligarques dans la foul�e de la lib�ralisation entreprise par l�ancien pr�sident Boris Eltsine. Gazprom dispose �galement de sa propre banque, Gazprombank, d�une compagnie a�rienne, de m�dias et a d�cid� de faire main basse sur la principale cha�ne de t�l�vision russe, NTV. Qui plus est, Gazprom a d�cid� d�ouvrir son capital � hauteur de 49% aux investisseurs �trangers afin de se faire coter sur les principaux march�s boursiers de la plan�te. Mais en obligeant les investisseurs � ouvrir au pr�alable un compte chez Gazprombank qui restera ainsi le principal d�positaire des titres. Cette ouverture du capital de Gazprom ob�it en fait � une strat�gie de conqu�te du march� mondial de l��nergie. Selon l�AIE (Agence internationale de l��nergie), la demande �nerg�tique mondiale devrait cro�tre de plus de 50% d�ici 2030, une demande n�cessitant 17 000 milliards de dollars d�investissements. Dans cette optique, la Russie, premier producteur mondial de gaz et deuxi�me producteur mondial de p�trole, entend renforcer son influence dans ce secteur strat�gique et peser sur le march� mondial de l��nergie. Au regard de cet enjeu, l�Ukraine ne p�se pas lourd. Moscou, d�cid� � retrouver tout son poids sur la sc�ne internationale, entend, via Gazprom (gaz) et Rosneft, l�entreprise d�Etat p�troli�re, faire valoir ses int�r�ts de grande puissance et ne pas laisser les compagnies am�ricaines continuer � faire la loi sur le march� de l��nergie. Ce retour en force de Moscou sur la sc�ne internationale co�ncide avec l�entame de la pr�sidence russe du G-8 durant toute l�ann�e 2006, ce groupe informel regroupant, en plus de la Russie, les sept pays les plus riches de la plan�te. Ceux qui pensaient qu�avec la chute de l�ex-URSS, la Russie s��tait affaiblie, sont en train de revoir leur copie. Le temps de la Russie de Boris Eltsine, qui a laiss� les firmes occidentales piller ses richesses au nom de l�ouverture au march�, est r�volu. Poutine est en train de d�montrer qu�un pays qui privatise ses entreprises d�Etat strat�giques se prive en fait des moyens de sa d�cision politique.