Les exportations de gaz russe vers l'Europe occidentale via la Biélorussie ne risquent plus d'être perturbées. En effet, la Russie et la Biélorussie ont signé dimanche soir à Moscou un accord sur le prix du gaz acheté par Minsk au géant russe Gazprom. Au terme d'âpres négociations, l'accord a été conclu quelques minutes avant la date-butoir au-delà de laquelle les approvisionnements de la Biélorussie risquaient d'être coupés, avec de possibles conséquences pour les consommateurs d'Europe occidentale. Dans le cadre de cet accord, la Biélorussie avait accepté de relever de 46 dollars à 100 dollars les 1 000 m3 le prix du gaz acheté à Gazprom. La Russie réclamait 105 dollars. A titre de comparaison, Gazprom facture son gaz plus de 250 dollars les 1 000 m3 à ses clients d'Europe occidentale. En même temps, Gazprom achèterait 50% des actions de Beltransgaz, société biélorusse spécialisée en transport de gaz naturel, et payerait 2,5 milliards de dollars cash sur une étendue de quatre ans. Par ailleurs, Les deux parties sont tombées d'accord sur le prix de transit du gaz naturel russe en Biélorussie à destination de l'Europe. Gazprom a accepté de payer près du double pour le transit de son gaz vers l'Europe. Le tarif de transit s'élèverait ainsi de 0,75 à 1,45 dollar les 100 km pour les 1,000 m3 de gaz naturel, à partir de 2007. Le différend entre les deux ex-Républiques soviétiques faisait penser à celui qui, l'an dernier à la même époque, a opposé la Russie à l'Ukraine et qui a brièvement perturbé les approvisionnements de l'Europe occidentale. La Russie couvre environ le quart des besoins en gaz de l'Europe occidentale et Gazprom fait transiter 20% de ses livraisons de gaz en Europe par la Biélorussie, le reste transitant plus au sud par l'Ukraine. Gazprom a expliqué que le relèvement de ses tarifs participait d'une volonté plus large de rapprocher ses prix de vente aux pays de l'ex-URSS de ceux pratiqués avec les clients européens. Au cours des douze derniers mois, des contentieux analogues avec l'Ukraine, la Moldavie, l'Arménie et la Géorgie ont fini par être réglés par la négociation. Le Kremlin a, trop souvent, été accusé en Occident de se servir des prix du gaz comme arme politique pour sanctionner certains de ses voisins auxquels il reproche leur rapprochement de l'Occident. La Biélorussie ne semble toutefois pas entrer dans cette catégorie. Son président, Alexander Loukachenko, est en froid avec les Occidentaux et cherche à renforcer ses liens avec Moscou. Au-delà du prix du gaz et de son transit, le réel enjeu de la bataille est le contrôle de la moitié des gazoducs biélorusses. Gazprom cherche depuis longtemps à acquérir des parts de Beltransgaz, la compagnie publique biélorusse par où transitent 20 % du gaz russe exporté vers l'ouest (les 80 % restant passent par l'Ukraine). Beltransgaz achemine en Europe centrale de 7 à 8% des exportations russes de gaz. Cependant, la valeur essentielle de Beltransgaz consiste en ce qu'il assume les fonctions d'opérateur du transit du gaz russe via le territoire biélorusse et contrôle le gazoduc russe Yamal-Europe (36 milliards m3).Ce contrôle exercé sur deux gazoducs est un atout politique non négligeable. Lors de sa précédente rencontre avec son homologue biélorusse à Minsk, le 28 novembre, Vladimir Poutine s'était déclaré certain que d'ici au 1er janvier 2007 une entreprise mixte de transport de gaz serait constituée par le monopole gazier biélorusse Beltransgaz et le russe Gazprom. Les parties se partageront équitablement les actions de Beltransgaz 50/50. Une certitude confirmée par l'accord signé durant les deux dernières minutes de l'année 2006.