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A FONDS PERDUS
T�h�ran dans l��il du cyclone Par Ammar Belhimer [email protected]
Publié dans Le Soir d'Algérie le 22 - 08 - 2006

Le compte � rebours a commenc� pour T�h�ran. La r�solution 1696, adopt�e par 14 voix contre une, celle du Qatar, "exige que l'Iran suspende toute activit� d'enrichissement et de retraitement, y compris la recherche et le d�veloppement, ce qui doit �tre v�rifi� par l'AIEA" (Agence internationale de l'�nergie atomique).
Il demande pour le 31 ao�t un rapport du directeur de l'AIEA, Mohamed El Baradei, sur la mani�re dont l'Iran se sera conform� � la r�solution. Il invoque l'article 40 du chapitre VII de la Charte de l'ONU, pr�voyant que des "mesures provisoires" peuvent �tre prises avant l'imposition d'autres mesures comme des sanctions. L'Iran sera isol� sur la sc�ne internationale et s'exposera � d'�ventuelles sanctions s'il ne respecte pas la r�solution du Conseil de s�curit�, estime le d�partement d'Etat am�ricain. Si cette r�solution n'est pas respect�e, l'Iran va s'engager "sur la voie d'un isolement accru", confirme le porte-parole du D�partement d'Etat am�ricain, Sean McCormack. Le propos am�ricain est plus conciliant que jamais � l'endroit de T�h�ran. Il traduit m�me un revirement que beaucoup d'observateurs qualifient de �spectaculaire�. A l'appui de leur observateur un premier rappel utile : il y a moins de six mois, l'�quipe de Bush envisageait comme une �option possible�, le lancement d'attaques s�lectives pour contraindre T�h�ran � �un des moteurs du terrorisme mondial�, selon M. Donald Rumsfeld, ministre de la D�fense � � abandonner son programme nucl�aire. Une option �voqu�e avec moult d�tails, comme l'emploi de bombes antibunkers � ogive atomique, des B61-11, visant en particulier le complexe de Natanz, situ� � 250 kilom�tres de T�h�ran, o� se trouve une usine d'enrichissement d'uranium. Aux yeux du Pentagone, ce durcissement �tait �la seule fa�on de r�gler le probl�me (qui) consiste � changer la structure du pouvoir iranien. Et cela signifie la guerre�. La page du sc�nario arm� semble �tre tourn�e et Washington pr�pare aujourd'hui activement la mise en �uvre de son dispositif de sanctions �conomiques. Comment expliquer le revirement am�ricain ? Il y a, d'abord, le droit indiscutable de l'Iran � puissance r�gionale de soixante-seize millions d'habitants et grand fournisseur d'hydrocarbures qui songe d�j� � l'apr�s-p�trole � de diversifier ses sources d'�nergie et de pr�parer son avenir �nerg�tique en d�veloppant les technologies nucl�aires civiles. Et rien n'indique qu'il envisage de donner � ces technologies un autre usage puisque les nombreuses inspections (plus de deux mille) effectu�es par l'Agence internationale de l'�nergie atomique (AIEA) depuis 2003 n'ont � aucun moment fourni le moindre soup�on de preuve attestant que T�h�ran poursuivait un programme nucl�aire militaire interdit par le trait� de non-prolif�ration nucl�aire (TNP). Les Etats-Unis �tant connus pour leur peu d'empressement � se conformer au droit, c'est l'Europe qui aura certainement �t� le principal artisan de ce changement de cap. �L'Europe et les Etats-Unis doivent vite proposer un contrat qui dissuaderait les Iraniens de se nucl�ariser�, �crivait Joschka Fischer, ancien ministre des Affaires �trang�res et vice-chancelier d'Allemagne entre 1998 et 2005, lundi 29 mai dernier dans le quotidien parisien Lib�ration. Selon le militant vert admirablement converti � la diplomatie, l'Iran ne peut �tre associ�e � la Cor�e du Nord parce qu'elle aspire �� devenir une puissance musulmane h�g�monique au niveau r�gional afin de traiter � �galit� avec les grandes puissances de la plan�te�, alors que cette derni�re �cherche � se doter de l'arme nucl�aire pour conforter son isolation �. Il voit dans la strat�gie iranienne, au demeurant dangereuse, �une combinaison d'une aspiration h�g�monique, d'une remise en question du statu quo r�gional et d'un programme nucl�aire�. L'histoire lui aura donn� raison puisque les Etats-Unis se sont ralli�s � la th�se europ�enne et envisagent d'autres moyens de ripostes, notamment �conomiques. Selon le journal russe Kommersant, les Am�ricains ont d�cid� de sanctionner des soci�t�s russes de l'armement � propos de la vente de Soukho� � l'Iran, alors que d'autres sources militaires russes de haut rang �voquaient des repr�sailles � la suite de la r�cente vente de 24 avions Soukho� au Venezuela dans le cadre d'un contrat de fourniture d'armes de plus de 3 milliards de dollars. "Selon des sources au sein du complexe militaro-industriel, la d�marche de Washington contre les compagnies russes est formellement une r�action � un contrat conclu fin juillet par Rosoboronexport pour la modernisation de 30 bombardiers iraniens Soukho� Su-24, qui peuvent en th�orie �tre porteurs d'armes nucl�aires tactiques", �crit le journal �conomique. Washington accuse les soci�t�s russes vis�es avec cinq autres compagnies (indiennes, nord-cor�ennes et cubaine) de fournir � l'Iran du mat�riel pouvant �tre utilis� dans la mise au point d'armes de destruction massive. Washington avait appel� en vain en mai Moscou � reconsid�rer sa vente de missiles antimissiles de courte port�e TOR-M1 � l'Iran. Ces repr�sailles n'ont de chance d'aboutir que s'il est �tabli qu'elles ont des cons�quences notables sur les contrats et projets civils de Rosoboronexport (dont une de ses filiales, VSMPO-Avisma, est le champion russe du titane) ou de Soukho� aux Etats- Unis. Que peut encore faire la Russie pour l'Iran en plus d'opposer son veto � l'adoption de sanctions par le Conseil de s�curit� dont elle est membre permanent ? H�riti�re de "la grande culture des steppes" (l'expression, cit�e par le pr�sident russe, est de l'anthropologiste Lev Goumilev, 1912-1992), la Russie a vocation � devenir un "pont entre deux grandes civilisations, l'europ�enne et l'asiatique", selon le pr�sident Vladimir Poutine. Le sommet de l'Organisation de coop�ration de Shangha� (OSC), tenu le 15 juin � P�kin, lui a donn� l'occasion de le confirmer. De son statut initial de forum r�gional de lutte contre le terrorisme � sa cr�ation, en 1996, l'organisation, compos�e de six Etats (Chine, Russie, Kazakhstan, Tadjikistan, Ouzb�kistan et Kirghizstan), l'OSC est en passe de se transformer en une alliance politico-militaire susceptible de faire contrepoids aux Etats-Unis et � l'OTAN dans la r�gion. Le 15 juin � P�kin, elle s'est concentr�e sur la d�fense des int�r�ts nationaux de ses Etats membres. Mais le temps fort du sommet de P�kin a �t� la visite du pr�sident Mahmoud Ahmadinejad, convi� � y participer au moment o� la r�solution de la crise du nucl�aire iranien �tait dans l'impasse. Dot�e, depuis 2005, d'un statut d'observateur au sein de l'organisation � tout comme l'Inde, la Mongolie et le Pakistan �, la R�publique islamique s'est vu, � cette occasion, offrir un statut de membre � part enti�re. Pour Moscou et P�kin, unies dans une m�me approche du dossier nucl�aire iranien, l'OSC est le meilleur tremplin au service de leur int�r�t commun : faire contrepoids � l'h�g�monie du "camarade loup" am�ricain, selon l'expression utilis�e par M. Poutine dans un message � la nation. Alexandre Soljenitsyne, l'�crivain du Goulag, qu'on ne peut soup�onner de sympathies � l'endroit du pouvoir central, est, lui aussi, d'avis que l'Alliance atlantique m�ne "des pr�paratifs pour l'encerclement total de la Russie et la perte de sa souverainet�". D'autres consid�rations rassurent T�h�ran sur le dossier nucl�aire. Outre l'�chec de l'occupation de l'Irak, o� les chiites pro-iraniens sont, pour l'instant, les meilleurs alli�s de Washington, les observateurs mentionnent la menace iranienne de miner, en cas d'attaque, le d�troit d'Ormuz, par o� transitent 20 % de la production mondiale de brut, son intention d'exiger le paiement des exportations de p�trole et de gaz en monnaie europ�enne, apr�s avoir d�j� converti en euros la majeure partie de ses r�serves en devises. T�h�ran n'ignore pas que, en ce moment, le dollar est le talon d'Achille des Etats-Unis... A. B.

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