On a du mal � croire que l�arm�e isra�lienne a �t� tenue en �chec par la r�sistance libanaise sur ce bout de territoire, d�environ 300 km2. Avant le conflit de juillet-ao�t 2006, le Sud-Liban avait connu une occupation isra�lienne ayant dur� 22 ans (1978-2000). L�arm�e isra�lienne et son arm�e de harkis locaux, l�ALS (l�Arm�e du Liban-Sud) command�e par le g�n�ral f�lon, Antoine Lahad, avait �t� contrainte de se retirer apr�s une r�sistance acharn�e men�e par le Hezbollah et ses alli�s de la gauche libanaise. Pour m�moire, ce sont les communistes qui ont �t� � l�origine des premi�res actions arm�es contre l�occupant isra�lien, et ce, en raison du fait qu�en 1978, le Hezbollah n�existait pas : il a �t� cr�� en 1982. Cette r�gion, th��tre sans pr�c�dent d�un d�luge de feu isra�lien permanent en juilletao�t 2006, commence � partir de Sa�da, l�ancienne Sidon. De cette ville, en allant vers Nabatiyeh, d�bute une r�gion faite d�une suite de monts, de collines s�encha�nant � des valons escarp�s et parfois tr�s accident�s, o� les villages et les hameaux sont tr�s proches les uns des autres. Les traces de la guerre sont visibles dans le paysage : ponts d�truits, crat�res creus�s par les bombes isra�liennes obligeant les automobilistes � des d�tours impossibles, villages en partie ras�s, impacts d�obus et de balles sur les murs des habitations, carcasses de blind�s et de canons isra�liens abandonn�es par leurs utilisateurs� Le trajet, serpentant � travers cette zone, est jalonn� principalement par des portraits des martyrs du Hezbollah, de leur leader Hassan Nasrallah (les plus nombreux), mais aussi, dans une moindre mesure, de ceux de son rival chiite, le parti Amal et de la gauche libanaise, principalement communiste. L�espace est ainsi mat�rialis� par la propagande de chaque parti. Des banderoles comm�morant la victoire sur �l�ennemi isra�lien�, de nombreux embl�mes jaunes, couleur du Hezbollah, indiquent au visiteur qu�il p�n�tre sur les terres du parti de Dieu (Hezbollah), fief de la r�sistance libanaise. Les bombes � fragmentation tuent encore Nabatiyeh, un peu plus de 100.000 habitants, est encastr�e dans une vall�e. A l�entr�e se trouve l�h�pital du Secours populaire libanais. Ali Hadj Ali, directeur de l�h�pital, �num�re devant ses visiteurs ce qu�a accompli son �tablissement et ses seize m�decins sp�cialistes durant le dernier conflit. �480 personnes gravement touch�es ont �t� op�r�es en urgence durant les premiers jours du conflit. Nous avons aid� et h�berg� les gens qui ont fui la guerre�, ditil. La guerre n�est pas pour autant termin�e. Pas un jour ne passe sans que des enfants, mais aussi des adultes, soient victimes des bombes � fragmentation. C�est le cas de cette paysanne qui, en chargeant une camionnette de feuilles de tabac � culture tr�s pratiqu�e dans le Sud- Liban � ne s�est pas aper�ue qu�une bombe � fragmentation s�est gliss�e parmi les feuilles et lui a explos� dans les mains. C�est le cas aussi de cet enfant qui en a ramass� une � elles sont de couleur jaune et ressemblent � des jouets � pour la montrer � ses parents. En explosant, elle a tu� l�enfant et son p�re. �Regardez�, dit Hadj Ali, en montrant des photos d�enfants allong�s sur les tables d�op�ration. L�arm�e isra�lienne en a d�vers� plusieurs centaines de milliers sur un territoire pas plus grand que la Mitidja. Vergers, champs mara�chers, oliveraies, principales activit�s vivri�res du Sud-Liban sont devenus autant de zones � risques que la Finul est en train de d�miner. Beaucoup de cultivateurs ont �t� tu�s ou bless�s par ces engins de mort � peine plus gros qu�un paquet de cigarettes, dispers�s � m�me le sol ou accroch�s aux branches des arbres fruitiers. Il suffit d�un geste � comme cueillir des olives ou des figues � pour provoquer une explosion mortelle. De ce fait, plus d�un tiers des terres cultiv�es ont �t� rendues inutilisables. Plusieurs cultures ont pourri sur pied, occasionnant selon la FAO un manque � gagner de 280 millions de dollars. Les hauts lieux de la r�sistance En se rendant de Nabatieyh � Bent Jabel, haut lieu de la r�sistance libanaise, on croise de temps � autre des convois de la Finul, mais pas trace de combattants du Hezbollah. Ils ne se montrent pas. A l�entr�e du village de Froun, proche de la fronti�re isra�lienne, une petite maison o� flotte l�embl�me de couleur rouge frapp� de la faucille et du marteau du Parti communiste libanais (PCL), et � moins de 100 m�tres, le local du Hezbollah. Quelques kilom�tres plus loin, � l�entr�e du village de Ghandouria, un char isra�lien fait figure de monument. Toujours sur cette route qui serpente la montagne, le village de Srifa, dont tout un quartier, d�nomm� �Moscou�, car habit� par des familles de militants communistes, a �t� en partie ras� par les bombardements isra�liens. Ici, six combattants communistes, dont les portraits ornent ce qui reste du local du PCL, sont tomb�s. Des habitants d�blaient les ruines et reconstruisent leurs maisons d�truites. Dahiz, 50 ans, militant communiste, p�re de quatre filles dont la plus jeune s�appelle Djivara � acronyme arabe de Che Guevara � montre fi�rement le lieu o� jeune il a combattu les forces isra�liennes durant l�occupation du Sud-Liban (1978- 2000). �Quelque part, le Hezbollah nous a vol� la victoire �, dit-il sur un ton am�re. �Ici, ajoute-t-il, le Hezbollah n�a pas pignon sur rue. Mais ce n�est pas le cas dans d�autres villages�. Aussi surprenant que cela puisse para�tre, le Parti communiste libanais est pr�sent dans tout le Sud-Liban : �Il dispose de 3.000 militants�, dit fi�rement Dahiz. Kalamay, localit� qui sent la richesse, est le fief de Nabih Berri, chef du parti chiite Amal. Sa maison est gard�e par des miliciens arm�s. Et comme pour montrer qu�Amal a pris part � la r�sistance, un char isra�lien Mirvana, d�truit par une roquette, orne l�entr�e de la ville. D�ailleurs, � l�entr�e de chaque localit� de ce Sud- Liban, le visiteur a droit en guise de monument � une arme lourde isra�lienne plac�e sur un socle en b�ton haut d�un m�tre avec au-dessus du char ou du canon � longue port�e isra�lien, un portrait de Nasrallah, de Nabih Berri (Amal) ou de Khaled Hadada (PCL). En exhibant ainsi ces troph�es de guerre, chaque village de ce Sud-Liban tend ainsi � montrer sa part de r�sistance. Bent Jebal, le village h�ro�que C�est dans ce village, � moins d�un km et demi de la fronti�re, que l�arm�e isra�lienne a �t� stopp�e et contrainte de faire demi-tour par le Hezbollah et ses alli�s. Ici, les traces des combats sont plus visibles qu�ailleurs. Habitations totalement d�truites ou �ventr�es, rues endommag�es par les chenilles des chars, impacts de balles et d�obus, tout montre que les combats ont �t� acharn�s. Pr�s des maisons d�truites, des habitants reconstruisent leurs anciens logis. A c�t� de leurs biens, des tentes o� logent leurs familles. Le commerce a repris. Les magasins, qui n�ont pas �t� trop endommag�s, ont rouvert. Pas de march� noir ou de sp�culation sur les prix. Bien que discrets, le Hezbollah y veille. Ses militants s�affairent pour venir en aide � une population qui, fuyant la guerre, n�a, pour la plupart, rien retrouv�. Le Croisant-Rouge qatari est �galement pr�sent, distribuant soins et dons aux victimes. En contrebas de Bent Jebal, Aytaroum, nich� dans une jolie vall�e. �C�est par ce village que les premiers blind�s isra�liens sont arriv�s. La faible r�sistance qui leur a �t� oppos�e leur a fait croire qu�il s�agissait d�une promenade. En fait, ils ne savaient pas que Bent Jebal sera leur tombeau. Les chars ont �t� stopp�s � l�entr�e du village�, explique un militant du Parti de Dieu. En effet, les chars devaient arpenter une rue en c�te qui les mettait � port�e des lance-roquettes des combattants libanais. L� �galement au milieu des carcasses de v�hicules civils, des blind�s isra�liens touch�s de plein fouet abandonn�s par leurs occupants. Khiam, le camp de la mort A la sortie de Aytaroum, Blida, jolie localit�, qui fait face � Isra�l. De l�, on longe la fronti�re. Dahiz montre les chemins ouverts au bulldozer ayant permis aux blind�s isra�liens de p�n�trer au Liban. En face de l�autre c�t� de la fronti�re, le Golan occup� et les fermes de Cheb�a. A Ada�sse, l�arm�e libanaise a d�ailleurs �tabli un poste � moins de 50 m�tres d�un poste isra�lien. Plus loin, avant Khiam, Kfar Kila, th��tre de violents combats. Khiam, village mi-chr�tien et mi-musulman, avec son �glise et sa mosqu�e, est c�l�bre dans tout le Liban. C�est ici que se trouve le fameux camp de torture tenu par l�arm�e du Liban-Sud (ALS) � la solde d�Isra�l. A l�int�rieur de ce camp ferm� depuis l�ann�e 2000, des cellules en b�ton d�un m�tre de large sur deux m�tres de haut, avec � peine une lucarne pour laisser passer un peu de lumi�re. �C�est ici que notre camarade Souha Bechara a �t� tortur�e et enferm�e durant dix ans dans ce r�duit�, dit Dahiz. En 1984, cette jeune chr�tienne, militante du Parti communiste, a tent� de tuer par balles le g�n�ral Antoine Lahad, chef de l�ALS, avant d��tre arr�t�e. Elle avait 20 ans. Dans ce camp, devenu lieu de m�moire, qu�on vient visiter de partout, sont expos�s des engins blind�s isra�liens d�truits par la r�sistance libanaise. Dahiz �num�re ses camarades morts sous la torture dans ce camp, ceux qui en sont sortis fous. �Ils �taient tr�s jeunes�, dit-il. Derni�re �tape, Marjayoun, petite ville �pargn�e par la guerre mais o� des soldats isra�liens fuyant les combats se sont r�fugi�s dans la caserne de la gendarmerie libanaise, avant que les combattants du Hezbollah n�acceptent de les laisser partir. C��tait � la veille de l�entr�e en vigueur du cessez-le-feu.